Appel au boycott: Me Wade lâché par tous

 
Le pape du Sopi arrive aujourd’hui pour prendre pied dans la campagne de la présidentielle. Il n’est pas candidat et décrète que, son fils Karim et Khalifa Sall n’étant pas retenus, il n’y aura point d’élection. A-t-il les moyens politiques de mener le programme qu’il a promis de dérouler pour arriver à ses fins ? Rien n’est moins sûr, au vu du rejet par beaucoup de leaders de l’opposition de cette perspective du boycott, mais également de la posture des populations qui, jusque-là, n’ont pas répondu aux initiatives subversives, mais comptent s’exprimer dans les urnes. Le bras de fer risque donc de ne pas être payant pour le leader du Pds, dont la sortie de la scène politique pourrait être un peu plus ternie.
 
 
 
Le Parti démocratique sénégalais (Pds) est à un nouveau tournant de son histoire, à l’occasion de cette élection présidentielle du 24 février 2019. Pour la première fois, depuis sa création en 1974, le parti libéral ne contribuera pas à l’expression des suffrages des Sénégalais, du moins pas de la manière orthodoxe consistant à briguer ceux-ci. En effet, son candidat, Karim Meïssa Wade, bien qu’ayant passé l’écueil redoutable du parrainage, a finalement été recalé par le Conseil constitutionnel, sur la base de ses démêlés judiciaires, dont les conséquences l’empêchent de prétendre à la magistrature suprême du pays. Et comme le parti de Me Abdoulaye Wade n’a pas de plan B et avait déclaré urbi et orbi qu’il n’y aurait pas d’élection sans la participation de son candidat, le message délivré avant-hier par l’ancien chef de l’Etat, à l’intention aussi bien de ses partisans, du Président Macky Sall, des challengers de ce dernier à la présidentielle et des Sénégalais en général, doit être décrypté.
Me Abdoulaye Wade a été très va-t’en guerre dans le message qu’il a délivré, avant-hier, à travers une vidéo, depuis sa retraite de Versailles en France. L’image est loin d’être fortuite, pour qui connait l’homme. Pour avoir blanchi 26 ans durant sous le harnais de l’opposition, avant de goûter aux délices du pouvoir sous les lambris du palais, le secrétaire général national du Pds, aujourd’hui âgé de 93 ans, conserve toute sa verdeur guerrière. Mais, ce dernier baroud qu’il veut conduire contre le régime de Macky Sall contribuerait à ternir un peu plus son image d’ancien président de la République sorti par la petite porte, pour avoir subi la vindicte populaire du 23 juin 2011, avant d’être battu en cherchant un 3^emandat. 
 
Le Pds a perdu nombre de ses responsables, qui ont rejoint Madické ou Idy
 
Oui, au sein de son parti, d’abord, des responsables ont pris des initiatives, bien avant sa déclaration, pour se ranger soit derrière le «rebelle» Madické Niang, soit pour refuser toute idée de boycott de l’élection. Ensuite, les caciques de l’opposition que le pape du Sopi avaient convoqués à Versailles, après le verdict du Conseil constitutionnel relatif aux candidats retenus pour briguer les suffrages des Sénégalais, Pape Diop de Bokk Gis-Gis et Diop Decroix de Aj, ont tous rallié la coalition Idy 2019, à l’instar de nombre de leur pairs, candidats à la présidentielle recalés lors du parrainage. Enfin, le peuple sénégalais, dont Me Wade loue le courage dans son message, est loin d’être prêt à le suivre dans une aventure tendant à perturber le scrutin du 24 février prochain. Bien au contraire, comme le relève le mouvement citoyen Yen a marre, l’option qui semble se dessiner au sein des populations, c’est de se rendre massivement aux urnes, afin d’exprimer le sentiment qui les anime. Est-ce un rejet du régime du Président Macky Sall, étayé par la mal gouvernance, le népotisme, l’instrumentalisation de la justice, entre autres errements ? Est-ce, au contraire, une adhésion sans faille à la politique conduite depuis 7 ans, dont les réalisations sont visibles à travers le pays ? nul ne sait. 
 
Les populations préfèrent la bataille par les urnes
 
En tout cas, les quatre candidats de l’opposition, qui ont fait leur deuil d’un quelconque soutien du Pds et de son chef, poursuivent leur campagne électorale et ne semblent non plus disposés à rallier la cause que compte défendre le pape du Sopi. Et si tous lui vouent un respect déférent, à l’instar du ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye, ce dernier dit prendre les dispositions afin que le scrutin se prépare dans les meilleures conditions et que le matériel soit en place à temps, bien surveillé par les forces de l’ordre mobilisés.
 
L’accueil de Wade, un bon baromètre
 
Maintenant, le Président Wade arrive en principe aujourd’hui. L’accueil qui lui sera réservé par ce qui reste de ses troupes, au Pds comme parmi ses sympathisants, donnera une idée claire de la qualité du rapport de force que le pape du Sopi veut imposer au régime du Président Sall. La question cruciale sera de savoir quel discours va distiller Me Wade pour maintenir une mobilisation jusqu’au jour du scrutin et quelles seront les actions déroulées et leur impact sur le processus conduisant à l’élection du 24 février. Une chose est néanmoins sûre, pour cette journée du 7 février, l’ancien chef de l’Etat, même s’il n’est pas candidat à l’élection présidentielle, va damer le pion aux cinq prétendants en lice.
 
 
Mansour KANE