Depuis près de deux ans, le nom de Louis Dassilva, Sénégalais de 35 ans, résonne dans les couloirs de la justice italienne. Accusé de l’assassinat de Pierina Paganelli, une Italienne retrouvée morte à Rimini, en octobre 2023, il vit aujourd’hui une épreuve qui dépasse sa personne : celle d’un combat contre une justice qui, aux yeux de nombreux observateurs, s’acharne sans preuves irréfutables.
Arrêté en 2024 et placé en détention à la prison des « Casetti », Louis Dassilva attend toujours son procès, fixé au 15 septembre 2025. Une attente interminable, vécue dans la douleur de l’isolement et de la stigmatisation, et qui soulève une question fondamentale : peut-on maintenir un homme en prison pendant des mois, voire des années, sans jugement, au nom de la seule suspicion ?
C’est cette question qui a poussé des centaines de personnes à se mobiliser. En quelques jours, une pétition lancée sur internet a recueilli près de mille signatures. Son titre est sans équivoque : « Liberté immédiate pour Louis Dassilva : stop à la détention préventive infinie ». Pour les initiateurs, il ne s’agit pas seulement de défendre un compatriote, mais de dénoncer une pratique judiciaire qui bafoue le principe de présomption d’innocence, pourtant inscrit dans toutes les constitutions modernes.
« Ce n’est pas un procès équitable. On veut faire de Louis un coupable idéal, parce qu’il est étranger, noir et immigré », accuse un militant sénégalais basé en Italie. Ces mots traduisent un sentiment largement partagé : celui que Dassilva paie le prix de son origine et de son statut social plus que celui des faits qui lui sont reprochés.
Sur le plan judiciaire, l’acte d’accusation est lourd : homicide volontaire aggravé, avec préméditation et cruauté. Mais, derrière la solennité des mots, les éléments matériels convaincants manquent. Pour ses avocats et ses soutiens, il existe trop d’incertitudes et d’ombres dans le dossier. Pourquoi alors maintenir un homme derrière les barreaux depuis si longtemps, si ce n’est pour satisfaire une opinion publique italienne ébranlée par ce crime odieux ?
Dans les rues de Rimini, la solidarité ne faiblit pas. Des manifestations de soutien ont déjà eu lieu, rassemblant la communauté sénégalaise et des défenseurs des droits humains. Mais ces mobilisations se heurtent aussi à la douleur légitime de la famille de la victime, qui demande le respect de la mémoire de Pierina Paganelli. La tension est palpable, entre la quête de vérité et l’exigence de justice.
Au Sénégal, cette affaire résonne comme un symbole. Elle pose la question du traitement réservé aux immigrés africains en Europe, souvent présumés coupables avant même d’avoir été jugés. Elle interpelle les consciences, mais aussi les autorités consulaires et diplomatiques sur la nécessité de défendre les droits de nos compatriotes au-delà des frontières.
À quelques semaines du procès, l’issue reste incertaine. Mais une chose est sûre : Louis Dassilva n’est plus seul. Derrière lui, il y a désormais une mobilisation citoyenne, une voix collective qui refuse l’injustice silencieuse. Et quelle que soit la décision de la justice italienne, cette affaire restera comme un révélateur des fragilités d’un système judiciaire où l’équilibre entre sécurité et droits fondamentaux est encore loin d’être trouvé.
Aujourd’hui, la balle n’est pas seulement dans le camp des juges italiens. Elle est aussi entre les mains des autorités sénégalaises. Le peuple attend que l’État prenne ses responsabilités, qu’il soutienne officiellement Louis Dassilva et exige pour lui un procès juste, rapide et équitable. Car au-delà d’un homme, c’est la dignité d’une communauté tout entière qui est en jeu.
Samba THIAM













