La place de la nation était noire de monde. Des centaines de manifestants ont pris d’assaut la mythique placepour répondre à l’appel des organisations de la société civile qui ont initié un rassemblement pour dénoncer les détournements des fonds de riposte Covid-19.Tantôt, ilsscandaient «Sunuymilliards du rees», tantôt ils réclamaient la libération des nombreux détenus par ce «régime dictateur».
La société civile a réussi son pari. Jeunes, femmes et même des personnes dutroisième âge ont répondu à l’appel de la société civile. Les organisateurs avaient calé l’heure du démarrage des activités à 15 heures, maisà 14 heures et quelques minutes déjà,on notait une affluence de jeunes. L’un deux, très enthousiaste, s’est confié. «Ils nous ont demandé de venir à 15 heures, mais j’ai préféré arriver avant pour être parmi les premiers et bien me placer. Je n’ai même pas déjeuné,mais cela importe peu. Le rassemblement est d’une importance capitale,surtout pour nous la jeunesse», renseigne Salif Diop qui a quitté Malika pour assister à la manifestation.
Non loin de lui, se tenait Ahmed Danfakha,sac au dos, suant à grosses gouttes. Le jeune homme dit avoir couru de la gare du Ter de Colobane à la place de la nation,pour ne rien manquer.«J’aiquitté Pikine pour faire entendre ma voix. Il est temps que ce régime sache dans quelle galère il nous a plongés depuis son arrivée. Et comme si cela ne suffisait pas, il se met à nous voler sans gêne. Ça suffit, nous réclamons la restitution de nos milliards pillés», clame-t-il.
Pendant ce temps, les manifestants continuaient à arriver par toutes les ruelles qui mènent à la place de la nation et la foule prenait forme. Des cars Ndiaga Ndiaye déversent eux aussi des passagers venus d’un peu partout, nous dit-on. Brandissant banderoles et pancartes à la main, les jeunes ont commencé à scander «Sunuy milliards du rees».
Une dizaine d’intervenants ont pris la parole pour répéter presque le même discours. Si ce n’est pour réclamer le remboursement des sommes détournées avec le suivi des recommandations de la Cour des comptes,c’est la libération des nombreux jeunes détenus dans les prisons pour des motifs, disent-ils, fallacieux.
C’est Moundiaye Cissé de l’Ong 3D qui a lu lemémorandum qui déclare : «toutes les personnes détenues pour leur engagement politique ou citoyen doivent être libérées sans délai».Poursuivant, ce dernier souligne que le rapport de la Cour des comptes a révélé des manquements, des irrégularités et de gravesprésomptions de détournements de derniers publics et de fautes de gestion. A cet effet, la société civile,dans son rôle de veille,exige une suite judiciaire. «Nous avons appris que le président de la Cour des comptes a transmis les dossiers au ministère de la Justice. Il revient à Ismaïla Madior Fall de faire la lumière sur cette affaire», affirme-t-il avant de témoigner leur soutien aux membres de la Cour des comptes pour les attaques injustifiées dont ils sont victimes. La société civile dit exiger «la démission de tous ceux qui sont cités ;à défaut, qu’ils soient demis de leurs fonctions sans délai ; le remboursement des montants ou la confiscation des biens matériels ;et l’ouverture des 12 informations judiciaires et la mise en place d’un comité de gestion des recommandations avec l’implication de la société civile».
Aucune prise de parole pour les hommes politiques
Plusieurs hommes politiques notamment ceux de la coalition Yewwi AskanWi ont fait le déplacement pour manifester leur soutien à la société civile dans ce «noble combat». Mais aucun d’eux n’a pris la parole. Daouda Guèye, qui faisait office de micro central, a salué leur présence tout en précisant que cette fois-ci, la parole était réservée aux citoyens.
Ababacar Abba Mbayetrouve que le combat doit être mené par tous les Sénégalais de tous les bords.«Ma présence à ce rassemblement obéit à deux points : je peux arborer ma casquette de membre de Yewwi, mais aussi de simple citoyen. Ce qui se passe est extrêmement grave. Les détournements en masse sont assez choquants, mais les manipulations qui ont suivi le sont encore plus. Des gens ont perdu la vie, d’autres leur emploi et pendant ce temps, nos gouvernantspillaient nos milliards tranquillement», déplore-t-il.
Aminata Touré,elle, estime que quand on est cité dans un rapport, on doit se libérer de ses fonctions pour aller se justifier devant la justice. «Ce rapport incrimine des ministres et directeurs clairement identifiés, alors qu’ils aillent répondre à la justice. Nous les avons appelés à l’Assemblée par le biais de leur Premier ministre, mais ils font le mort. Je rappelle que la question d’actualité est inscrite dans le règlement intérieur,alors ils ont l’obligation de venir nous éclairer», clame la députée.Beaucoup d’autres leaders dont Moussa Tine, Birame Soulèye Diop, Khadija Mahécor Diouf, Mamadou Goumbala et tant d’autres se sont tenus aux côtés des manifestants pourdénoncer eux aussi le détournement des fonds ForceCovid-19. Aliou Sané de Y’en a Marre a précisé que ce rassemblement n’est que le premier acte. Une conférence de presse va se tenir très bientôt pour indiquer la suite des actions.
NdèyeKhadyDIOUF












