Honte et désolation ! Ce sont les sentiments qui habitent la rédaction de «Les Echos» après la déclaration du ministre des Sports Matar Bâ sur la pelouse du stade Léopold Sédar Senghor. En effet, «Les Echos» avait barré à sa Une : «Le Stade Léopold Sédar Senghor dans un piteux état» avec à l’appui des photos de la pelouse prises le mardi 25 septembre à 16 heures 22 minutes, sans oublier les alentours du stade transformés en décharge publique. Contre toute attente, le ministre a fait une déclaration qu’on a failli attribuer au mythomane Patin, tellement cela sortait de l’imaginaire. «J’ai vu dans un journal, des images très anciennes, très anciennes de la pelouse de Léopold Senghor, pour nous dire que c’est un champ de patate. Or, aujourd’hui, celui qui va à Léopold Senghor saura qu’on a une meilleure pelouse que celle qu’on avait en 2014, quand on recevait l’Egypte. Et c’est un paradoxe. Quand on joue à Madagascar, avec ce qu’on a vu, on doit savoir qu’on a de meilleures conditions au Sénégal», a déclaré le ministre.
Faux, M. le ministre ! Nous vous offrons même la possibilité de venir à Front de Terre vérifier avec le photographe la date exacte des prises de vue. Soucieux d’informer juste et vrai, nous relatons ici comment nous avons déjoué la sécurité pour accéder au champ de patate que vous appelez pelouse. Les journalistes qui ont fait ce reportage ont fait savoir aux préposés de la sécurité qu’ils allaient au bureau du Cng. Ne se doutant de rien, ils les ont laissés passer. D’ailleurs, durant la séance de photo, un agent nous a interpellés pour nous dire que c’était interdit. M. le ministre, nous vous respectons et nous vous demandons de respecter les Sénégalais et de surtout dire la vérité. Loin de nous l’idée de semer le doute à quelques semaines d’un match important. A maintes reprises, Me Senghor et le coach Cissé se sont plaints des pelouses africaines. «AVANT DE BALAYER CHEZ LES AUTRES, BALAYEZ DEVANT VOTRE PORTE», dit-on. Alors, c’est notre devoir d’informer juste et vrai, mais aussi c’est votre devoir de dire la vérité aux Sénégalais. En matière de sport, le mensonge ne peut triompher, quelle que soit la discipline, sauf si vous faites appel au Var dont les décisions prêtent toujours à confusion.
Matar Bâ, champion des démentis
A ce jeu, il risque de battre tous les records. Chaque fois qu’un problème est soulevé concernant le sport, Matar Bâ enfile son costume, rue dans les brancards pour apporter des démentis proches souvent de contrevérités.
En 2016, l’équipe nationale de Beach-Soccer a eu des difficultés au Nigeria, malgré son statut de championne. A leur retour, les Lions, qui attendent toujours d’être reçus par les autorités, n’ont vu l’ombre d’une convocation et même des primes promises par le ministre Matar Ba. Après cet épisode, les Lions de retour de la Coupe du monde (quart de finalistes) n’avaient même pas reçu de félicitations de la part du patron du sport sénégalais.
On change de discipline pour aller voir du côté de la balle orange. Oui, l’équipe nationale féminine de basket fait partie des meilleures, celle des moins de 18 ans est vice-championne d’Afrique et est qualifiée à la Coupe du monde U19, mais où en est-on avec les poulains de Abdourahmane Ndiaye «Adidas» ?
Ce dernier a été même sévèrement clashé par le ministre des Sports après sa sortie dénonçant les conditions de préparation des Lions. Pourtant, une semaine plus tard, les Lions du basket ont passé une nuit blanche dans les rues de Lagos où ils devaient disputer le second tour du tournoi qualificatif au Mondial 2019. Maurice Ndour a récemment dénoncé leurs conditions dans la Tanière et on peut être sûr qu’il ne sera pas le dernier. Sans oublier quand Gorgui Sy Dieng s’était substitué à l’Etat pour régler la note à hauteur de 39 millions francs Cfa, alors que les Lions étaient sur le point d’être virés de leur hôtel lors de la préparation de l’Afrobasket 2017 en Espagne.
«La pelouse meilleure qu’en 2014 », vraiment ?
Nous avons failli tomber des nues en lisant votre sortie en déphasage avec la réalité, Monsieur le Ministre. Dire qu’on a une pelouse meilleure que celle qu’on avait en 2014, quand on recevait l’Egypte, ne reflète pas la réalité. Nous vous comprends, car vous n’êtes jamais au courant de quoi que ce soit, car votre point fort, c’est la communication, la cosmétique. Vous surfez juste sur les vagues. Vous n’allez jamais en profondeur. Mais, au-delà de votre amnésie criarde, Monsieur le Ministre, soit il y a écart entre la notion d’"ancien", qui signifie "qui existe depuis longtemps" dans le dictionnaire et la conception que le patron du sport sénégalais en a. En tout cas, force est de reconnaitre que soit le ministre raconte des contrevérités en toute connaissance de cause -ce qui devrait, dans un Etat normal, entrainer son limogeage-, soit il a été mené en bateau par des fonctionnaires de son ministère. Cette dernière possibilité étant beaucoup plus grave, si l'on sait que le ministre doit normalement être au fait de ce qui se fait dans son Département ministériel.
Mansour SAMB, Samba THIAM ET Marième NDIAYE
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