
Une réunion soutenue par des ambassades étrangères sur les droits LGBTQ provoque une levée de boucliers. Guy Marius Sagna sonne l’alerte, les organisations religieuses s’indignent et tout le pays observe la posture que prendront le Président Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko sur ce sujet explosif.
C’est une épreuve de vérité pour le tandem au pouvoir. Alors qu’une réunion de la coalition internationale Equal Rights Coalition (ERC) est annoncée à Dakar aujourd’hui 11 juillet, avec projection du film «MIWA» sur les femmes LBTQI et les hommes trans en Afrique de l’Ouest, le député Guy Marius Sagna a lancé une alerte publique appelant à l’interdiction immédiate de l’événement. La réunion est soutenue par des ambassades occidentales, dont celle des Pays-Bas, et par le Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l’homme.
GMS tire la sonnette d’alarme
Dans un communiqué offensif, le député et militant panafricaniste dénonce «une provocation étrangère» en contradiction totale avec les lois et valeurs sénégalaises. «Les Pays-Bas et d'autres pays sont libres chez eux d'encourager les LGBTQ. Ici au Sénégal, ce n'est pas possible», dit-il. Il exige que l’État interpelle sans délai les institutions impliquées et interdise l’événement prévu au siège onusien à Dakar, de 9h30 à 11h00.
MIWA, Égides, PI7 : les acteurs en question
Le cœur de la réunion : la projection du film «MIWA (Nous Sommes Là)», centré sur les femmes et hommes trans d’Afrique de l’Ouest. Elle est organisée par Égides (une organisation internationale francophone basée au Canada, qui regroupe plus de 200 associations LGBTQI dans 33 pays, très active au Sénégal à travers des programmes de formation et de plaidoyer comme le projet MIWA) et PI7 (Plateforme Initiative des 7) ; une coalition régionale d’organisations LGBTQIA+ en Afrique francophone, partenaire d’Égides pour le projet.
Les deux structures militent pour l’accès aux droits, la visibilité, et la protection des personnes LGBTQI, y compris dans des pays comme le Sénégal où l’homosexualité est pénalement réprimée.
And Samm Jikko Yi se réveille
Plusieurs groupes religieux et traditionnalistes se sont joints à la contestation : le collectif And Samm Jikko Yi, soutenu par Jamra, accuse les partenaires internationaux de vouloir «imposer une idéologie LGBT à l’Afrique» et le mouvement Noo Lank a dénoncé le silence complice du gouvernement et la passivité du Premier ministre.
Tous réclament une criminalisation plus stricte de toute activité liée à la promotion de l’homosexualité et appellent à des manifestations si l’événement n’est pas interdit.
Sonko et Diomaye : entre promesses et réalités diplomatiques
Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye ont tous deux promis, dès leur campagne, de durcir la loi criminalisant l’homosexualité, avec une peine de 10 à 15 ans, incluant la bisexualité et la transidentité. Un projet de loi en ce sens est en discussion à l’Assemblée.
Mais depuis leur arrivée au pouvoir, aucune mesure concrète n’a encore été prise. L’opinion publique, notamment religieuse, commence à s’impatienter et s’interroge sur l’authenticité de leurs engagements. «Ce qui se prépare à Dakar est un test. Vont-ils défendre nos valeurs ou céder à la pression des partenaires internationaux ?», interroge un imam membre d’And Samm Jikko Yi.
Un test pour la souveraineté culturelle du Sénégal
La réunion Equal Rights Coalition, sous l’apparence d’un événement culturel, agit comme un révélateur géopolitique : celle d’une tension croissante entre valeurs nationales et normes internationales sur les droits humains. Le pouvoir exécutif sénégalais se retrouve donc sous les projecteurs d’un double jugement : à l’international, pour le respect des libertés fondamentales et à l’intérieur, pour la fidélité aux valeurs religieuses, sociales et culturelles du pays.
Et maintenant ?
Le gouvernement reste, pour l’instant, silencieux. Mais une décision est attendue dans les prochaines heures. Interdire l’événement pourrait satisfaire les conservateurs mais provoquer un malaise diplomatique. L’autoriser serait vu comme une trahison électorale par une frange importante de l’électorat. Ce 11 juillet, Diomaye Faye et Ousmane Sonko seront jugés non par la justice, mais par l’histoire.
Samba THIAM