Les avocats de la défense ont à nouveau obtenu le renvoi du procès de leur client Ousmane Sonko contre le ministre du Tourisme et des Loisirs Mame Mbaye Niang. Face à la réticence du procureur et des avocats de la partie civile, ils ont encore réussi à faire pencher la balance de leur côté. Les motifs qu'ils ont évoqués pour obtenir gain de cause sont les conseils nouvellement constitués, une projection de quelques éléments à l'audience, une communication du dossier etc.
Pour une seconde fois, Ousmane Sonko et le ministre du Tourisme et des Loisirs, Mame Mbaye Niang étaient hier, jeudi 16 février 2023, devant le tribunal correctionnel de Dakar. C'est Mame Mbaye Niang qui a été le premier à arriver au tribunal. Sonko a accédé à la salle d'audience vers 10h accompagné des cris de ses sympathisants venus lui apporter leur soutien. Hier encore, c'est le même scénario qui a prévalu, puisque quand le dossier a été évoqué, d'autres avocats, qui se sont nouvellement constitués pour le compte de Ousmane Sonko, ont sollicité le renvoi pour s'imprégner de l'affaire. Il s'agit de Etienne Ndione, Ndoumbé Wane, Martin Diatta etc.
Pour éviter tout débordement, le juge a d’abord appelé au calme et à la sérénité des avocats pour que l'audience se tienne bien. Réponse immédiate de Me Ousseynou Fall: «il y a certes des juges respectueux, mais il y a aussi des avocats respectueux. Nous n'accepterons aucun écart venant de la part des avocats de la partie civile». Après les interventions de Mes Abdou Aziz Djigo, Martin Diatta et Djiby Diagne, Me Ciré Clédor Ly a évoqué une projection de quelques éléments qu'il voudrait faire. «Chaque fois que des affaires passent, les avocats obtiennent des renvois. Et je ne sais pas pourquoi cette affaire Ousmane Sonko vous entrave ? J'ai saisi le parquet par correspondance le 10 février 2023 pour demander toutes les dispositions pour qu'une projection ait lieu. Parce qu'il y a des pièces dans le dossier. Le parquet n'a pas à dicter les règles. Nous avons demandé à obtenir le dossier, mais on ne l’a jusque-là pas», a-t-il dit.
Son confrère Abdoulaye Tall, sans que la parole lui soit donnée, bondit et sollicite un renvoi pour le 18 mai prochain.
Le procureur et la partie civile opposés au renvoi
Niet catégorique du procureur qui s'est opposé au renvoi du procès. «Nous avons été saisis par correspondance par Me Babacar Ndiaye le 7 pour que le dossier lui soit communiqué. C'est le 8 que le parquet a accepté sa demande», a déclaré le parquetier. Son nom cité, Me Babacar Ndiaye de préciser : «c'est à ma seule demande et pas pour une autre. Je suis allé au greffe et on m'a notifié que le dossier n'était pas au service de l'enrôlement. Il y a certaines pièces du dossier qui ne m'ont pas été communiquées, en l'occurrence la clé USB. C'est une affaire ordinaire et on ne voit pas l'urgence de la retenir. Il faut permettre à la défense de se préparer et de venir sereinement la plaider». Me Ousseynou Ngom d'ajouter : «notre client n'a reçu aucune citation et je défie quiconque de nous en rapporter la preuve. Le temps des hommes politiques n’est pas le temps de la justice. C’est un dossier ordinaire. Il faut qu’il soit jugé comme tel».
Reprenant la parole, Me Ousseynou Fall s’est associé à cette demande de renvoi. «M. Le Président, si vous voulez rendre une justice impartiale dans ce procès, vous devez nous accorder le renvoi. Il n’y a aucun empressement pour le juger. C'est un dossier ordinaire. Si les politiques ont un agenda bien fixé, vous les magistrats, vous devez faire preuve de sérénité et de magnanimité».
Pour leur part, les avocats de Mame Mbaye Niang ont opposé un refus ferme à la demande de leurs confrères de la défense. Me Baboucar Cissé, premier à prendre la parole, a précisé que cette affaire est en état d’être jugée, puisque tous les conseils sont là. «Nous nous opposons fermement, je dis fermement à cette demande de renvoi», a martelé Me Cissé qui a été coupé net par Me Ousseynou Fall. D'un ton ferme, il lui lance : «Baboucar Cissé, vous racontez du n'importe quoi».
Me Moustapha Dieng, lui aussi avocat du ministre d’embrayer : «c’est une procédure banale et personne ne peut prouver que les droits de la défense ont été bafoués. Nous ne sommes pas des ennemis. Chers confrères, retenons cette affaire, plaidons-là et passons à autre chose. À la fin, nous nous retrouverons tous ensemble».
Renvoi ferme sur intervention du bâtonnier
Après plusieurs tiraillements, le président de l'audience a de nouveau appelé à la sérénité des uns et des autres avant de menacer d'évacuer toute la salle. Mais après d'autres interventions, il a voulu retenir l'affaire pour jugement tout en essayant de les convaincre. «Je sais que vous êtes excellents et j'en ai appris beaucoup avec vous. Je sais que pour ceux qui viennent de se constituer peuvent s'imprégner du dossier maintenant pour venir plaider ensuite», a-t-il dit. C'est à la suite de cette note de discorde qu'il a suspendu l'audience à 11h26mn pour ensuite revenir à 12h06mn pour renvoyer le dossier au 16 mars prochain sur intervention du bâtonnier. Cette fois-ci dit-il, c'est un renvoi ultime pour mettre tout le monde à l'aise.
Fatou D. DIONE
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