
La suspension, jusqu’à la fin de l’année, du service de la dette bilatérale va permettre aux deux pays de dégager des marges de manœuvre budgétaire pour faire face à la crise.
Nul doute, cependant, sur son sort : comme le rappelait la présidente du Club de Paris, Odile Renaud-Basso, le 10 juin, « tous les pays dont les dossiers sont en cours d’instruction avaient été préalablement sélectionnés comme éligibles, et se verront donc proposer un accord ». Le ministère sénégalais des Finances et du Budget a d’ailleurs d’ores et déjà évalué les liquidités qui seront rendues disponibles par la suspension, entre le 1er juin et le 31 décembre 2020, de l’ensemble de sa dette du secteur bilatéral officiel : 90,568 milliards de F CFA (138 millions d’euros), indique-t-il dans un communiqué en date du 10 juin.
Les créanciers privés pas concernés
Cette somme, qui représente « 13,51 % du service de la dette extérieure dû en 2020 », permettra de faire face aux « dépenses sanitaires, sociales et économiques » impliquées par la pandémie et le ralentissement économique qui en découle, précise le ministère. Une utilisation des fonds à laquelle le FMI et la Banque mondiale sont chargés de veiller.Si le président sénégalais, Macky Sall, a été parmi les premiers à appeler à une suspension, et même à une annulation, de la dette des pays africains, Dakar n’envisage pas de solliciter de moratoire auprès de ses créanciers privés, « dans le souci de protéger la relation de confiance qui lui a notamment permis d’emprunter à des maturités allant jusqu’à trente ans ».
« Tous les pays africains sont embarrassés devant la possibilité de cette démarche, car ils ont peur qu’elle soit interprétée défavorablement par leurs créanciers privés, et donc de perdre leur accès aux marchés internationaux. Mais ceux qui finissent par franchir le pas ont jugé que les avantages dépassaient les inconvénients », commente Andrew Roche, associé fondateur de Finexem, spécialiste de la dette souveraine, qui rappelle que « si le geste est important par son symbole, il reste modeste par les montants concernés, en comparaison avec l’ensemble des dettes des pays africains ».
« Il faut se rappeler que les inquiétudes au sujet des dettes africaines sont antérieures au Covid, qui vient aggraver une situation déjà tendue », estime de son côté Stephan Alamowitch, responsable du département banque et finance du cabinet d’avocats Franklin et associé d’Andrew Roche dans le cadre du partenariat African Debt Franklin Finexem – un consortium destiné à accompagner les États africains dans le processus de renégociation de leurs dettes -, qui estime que « des discussions devront tôt ou tard s’ouvrir avec le privé ».
À ce jour, l’Institut de la finance internationale (IIF), qui rassemble les prêteurs privés à l’échelle mondiale, insiste sur sa participation « strictement volontaire et au cas par cas » à l’initiative de suspension du service de la dette.












