Les Sénégalais continuent d’analyser et d’interpréter la dernière sortie du Premier ministre. La possibilité de son retour à l’Assemblee nationale, comme il l’a evoqué si jamais il est remercié par le President Bassirou Diomaye Faye. Mais, selon plusieurs experts sur les questions électorales, ce retour va se heurter à certains obstacles.
Malgré la confiance et l’entente qu’il avait scellée avec son poulain Bassirou Diomaye Faye qu’il «a fait élire», Ousmane Sonko a tenu à s’aménager des portes de sortie en cas de crise, en suspendant son poste de député. Une manœuvre politique que l’Assemblee nationale a voulu légiférer durant l’adoption de son nouveau règlement intérieur à son article 124, qui stipule : «le député, nommé membre du Gouvernement, ne peut siéger à l’Assemblée nationale pendant la durée de ses fonctions. Il est provisoirement pourvu à son siège vacant par le suppléant de droit selon les modalités fixées par le Code électoral. La suppléance cesse au plus un (1) mois après la fin des fonctions du membre du Gouvernement concerné, sauf en cas de renonciation écrite irrévocable. Le député qui retrouve ainsi son siège est réintégré par le Bureau de l’Assemblée nationale. Une Instruction générale du Bureau définit les modalités de fin de suppléance et de réintégration du titulaire». Néanmoins, cette disposition qui a tout l’air d’avoir été taillée sur mesure pour Ousmane Sonko ne semble pas aussi parfaite qu’elle aurait dû.
Babacar Gaye : «la loi n’est pas rétroactive…»
Babacar Gaye estime que le Premier ministre a fait une interpretation erronée de la loi en affirmant pouvoir retrouver son mandat de député, si jamais il quitte la primature. Ce dernier d’évoquer l’article 55 de la Constitution pour rappeler l’incompatibilité du mandat de député avec la fonction de membre du gouvernement. «La qualité de membre du gouvernement est incompatible avec un mandat parlementaire et toute activité professionnelle publique ou privée rémunérée, sous réserve des dispositions prévues à l'article 56.” Poursuivant, M. Gaye rappelle aussi que même si les dispositions de l’article 56, qui précise : «le député, nommé membre du gouvernement, ne peut siéger à l'Assemblée nationale pendant la durée de ses fonctions ministérielles», ont été complétées par la nouvelle loi organique portant règlement intérieur de l’Assemblee nationale adoptée ce 27 juin 2025, Ousmane Sonko ne va pas en tirer profit. Et d'après le principe juridique qui veut que "la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif", même promulguée après avis du Conseil constitutionnel, souligne-t-il, cette loi ne sera applicable qu'aux députés en fonction.
L’ancien président du groupe parlementaire Sopi de préciser par ailleurs : «pour qu'il puisse bénéficier des nouvelles dispositions de la loi, il eût fallu que le président de la République le reconduisît officiellement et postérieurement à son installation comme député».
Alioune Souaré : «deux obstacles se dressent devant Sonko…»
Alioune Souaré abonde dans le même sens en confirmant la thèse de Babacar Gaye sur la non-rétroactivité de la loi sur cette question avec le principe juridique : la loi ne dispose que pour l'avenir. «Il est vrai que le nouveau règlement intérieur permet à tout député qui est nommé membre du gouvernement de revenir dès la cessation comme le stipule l’article 124 du nouveau règlement intérieur de l’Assemblee nationale, mais l’obstacle qui se dresse sur leur chemin, c’est que la loi n’est pas rétroactive», souligne-t-il avant d’enchaîner : «le texte n’est pas encore promulgué et il n’y a aucune disposition qui parle de suspension de mandat, c’est juste une pratique parlementaire. Les députés auraient dû expliquer la procédure qui permettrait au député qui n’est plus membre du gouvernement de signer son retour à l’Assemblée».
La condamnation définitive : un autre obstacle
A ceux qui évoquent la loi d’amnistie pour contrer le rejet du rabat d’arrêt de Sonko par la Cour suprême, Alioune Souaré dira que l’autre obstacle qui va se dresser devant Ousmane Sonko, c’est l’application de l’article 61 de la Constitution qui est une loi organique. «Il prend le dessus sur la loi d’amnistie qui est une loi ordinaire. Et des lors que le rabat d’arrêt est rejeté par la Cour suprême, l’article 61 s’applique à lui et il subit le même sort que Barthélemy Dias et perd son mandat. Mais cette perte de mandat ne sera constatée par l’Assemblee nationale que sur demande du ministre de la Justice».
Nd. Kh. D. F













