
Son discours sur la justice sénégalaise n’a pas changé. Ousmane Sonko garde toujours une dent contre les magistrats qui l’ont chargé «sur aucune base légale» ces dernières années, avec une dizaine de dossiers. Le Premier ministre continue de contester la décision de la Cour suprême dans l’affaire qui l’oppose à Mame Mbaye Niang et se dit déterminé à aller jusqu’au bout. Pour laver son honneur. Il a d’ailleurs décidé de saisir via ses avocats le ministère de la Justice pour la réouverture de tous ces dossiers.
Abordant la décision de la Cour suprême, Ousmane Sonko assure que c’est lui-même qui a écrit au ministre de la Justice, en tant que citoyen, pour que la justice réactive tous les dossiers le concernant, parce qu’il n’oubliera jamais tout ce par quoi le pays est passé ces dernières années. «La principale cause de ces nombreuses et dures épreuves par lesquelles nous sommes passés, c’est l’attitude de magistrats instrumentalisés ou corrompus avec des terrains et argent». On a mobilisé tout un appareil pour m’empêcher d’être candidat. «Cet acharnement contre moi et tout ce qu’il a eu comme conséquences ne peuvent passer par pertes et profits. Cela ne passera pas», assure le Pm, qui est certain que si ces affaires restent en suspens, cela va inéluctablement se reproduire.
Ousmane Sonko soutient que la justice est attendue sur les meurtres et les tortures que les citoyens sénégalais ont subis durant cette période, mais aussi les détournements des nombreux milliards.
Le Premier ministre assure qu’il n’a jamais appelé un magistrat pour une quelconque demande. «À chaque fois que l’on a arreté quelqu’un, on m’accuse directement alors que je n’ai jamais appelé un magistrat. Je n’ai jamais parlé à un juge ou un procureur par rapport à un dossier. C’est un choix que j’ai fait pour garder mon indépendance. Je l’ai dit haut et fort, que personne ne leur fasse croire qu’un tel dossier vient du Premier ministre ou du président de la République, nous ne donnerons jamais une directive à un magistrat. Qu’ils prennent alors leurs responsabilités», déclare le Premier ministre qui poursuit : «je veux pouvoir observer la justice et donner librement mon avis, comme tous les Sénégalais. Le poste de Premier ministre ne peut pas être un frein à mes positions, je sais quand porter mes habits de Premier ministre et où mettre les habits de citoyen simple, je sais aussi quand faire valoir mes fonctions de chef de parti politique. C’est le même Sonko que vous avez connu qui est toujours là, l’Etat ne me changera pas, encore moins un poste de responsabilité», dit-il.
Rappelant encore ses bisbilles avec la justice, le Premier ministre soutient : «ils m’ont créé énormément de dossiers : terrorisme, viol, tentative de coup d’Etat, diffamation, falsification de dossiers administratifs. Des affaires inédites qu’aucun autre homme politique n’a encaissées jusqu’ici», rappelle Ousmane Sonko, qui promet qu’il ne laissera passer aucune d’elles.
«La justice s’est ridiculisée dans le dossier pour lequel j’ai été jugé par contumace»
Selon lui, la justice s’est ridiculisée dans le dossier pour lequel il a été jugé par contumace. «Si on suit la logique de la justice, je suis toujours en contumace, moi le Premier ministre du Sénégal. Jusqu’à présent, je ne suis pas parti récupérer mes passeports qu’ils avaient confisqués, mais ils sont venus jusqu’à mon bureau pour me confectionner un passeport diplomatique. C’est la justice qui se discrédite elle-même. Si je ne suis pas en contumace, qu’on vienne m’arrêter, si la procédure est terminée que l’on réouvre le dossier pour le juger», assène Sonko.
Le Premier ministre affirme que de la même façon qu’il y a des magistrats vertueux, il en existe des véreux qui ont accepté d’être instrumentalisés par les hommes politiques.
Poursuivant, le Premier ministre déclare qu’on lui a fabriqué près de 10 dossiers et malgré ses 6 plaintes, aucune d’entre elles n’a été instruite : «j’ai demandé au ministre de la Justice que les dossiers soient traités à charge et à décharge. Il m’a répondu le 26 mars pour me signaler que les fonctions de Premier ministre risquent d’être une entrave pour certains dossiers ; je lui ai automatiquement demandé de faire la part entre le Premier ministre et Ousmane Sonko et c’est le citoyen qui a introduit cette demande», explique Sonko, qui précise que cette demande concerne l’ensemble de ses dossiers. «Certains soutiennent que je sélectionne les dossiers à vider par la justice, c’est faux. Je demande le traitement de tous les dossiers parce que je sais que personne ne peut me condamner dans l’un d’eux. J’ai demandé au ministre de la Justice d’adresser ses réponses à mon avocat qui l’a saisi, tout en lui assurant que si toutefois la justice demande à me voir, j’irai répondre en tant que citoyen».
«L’un des plus grands problèmes du Sénégal, c’est la justice»
Sonko rappelle que c’est à cause de son dossier qui l’oppose à Mame Mbaye Niang que sa candidature à la présidentielle a été écartée : «cette décision prise aujourd’hui ne me surprend guère, parce que c’est la même Cour suprême avec les mêmes magistrats. Ils ne veulent pas se dédire. Que l’on sache que ceci n’est que la première phase, il est loin d’être terminé», assure-t-il avant de jurer que «cette décision n’a aucun impact sur ma candidature. Pour le reste de la carrière politique, à moins que je le décide personnellement, je pourrai participer à toutes les élections. Ils m’avaient certes écarté du fichier électoral, mais c’est eux même qui m’ont réintégré sans que je ne bouge le plus petit doigt. C’est ce qui m’a permis de voter lors de la présidentielle, diriger une liste et gagner les législatives, d’où mon mandat de député que j’ai suspendu. Lors des prochaines élections locales aussi, je vais intégrer une liste».
Selon le président du parti Pastef, ils avaient instrumentalisé un ministre (allusion à Mame Mbaye Niang) qui a d’ailleurs pris la fuite, à la suite d’une de ses déclarations. «Ils ont accéléré la procédure sans jamais me laisser aller au tribunal. Je n’ai pas pu me défendre dans ce dossier, jusqu’à la Cour suprême. Ils n’ont respecté aucun délai. La méchanceté avec laquelle ils ont traité ce dossier est flagrante. En me réclamant 200 millions, ils visaient ma maison, la seule que je possède. J’ai dû la mettre aux noms de mes enfants et de mes épouses», déplore-t-il.
D’après le leader de Pastef, ses détracteurs ont tout tenté pour l’ensevelir une bonne fois, mais Dieu est juste, puisque qu’un des membres de la Cour suprême a refusé de signer la décision. Ousmane Sonko d’exhiber le rapport en question et le pré-rapport, pour dire que toute cette affaire est bâtie sur un mensonge : «j’ai demandé à mes avocats de saisir dès demain (ndlr : aujourd’hui) le ministre de la Justice pour lui signifier les faits nouveaux dans ce dossier pour qu’on rouvre ce dossier. Ce qui est plus marrant dans cette affaire, c’est que c’est le ministère de Finances d’alors, Amadou Ba, qui a signé l’ordre de mission», renseigne Sonko, qui déclare que l’un des plus grands problèmes du Sénégal, c’est la justice. «Je ne me lasserai pas, les Sénégalais ont le droit de savoir qu’il n’y a jamais eu de diffamation, ni de falsification de documents, encore moins d’accusations non fondées. C’est un combat de principe que je compte mener jusqu’au bout», prévient-il.
Nd. Kh. D. F