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INTERDICTION DU TELEPHONE A L’ECOLE : Le ministère face à la riposte des syndicats et des parents d’élèves



INTERDICTION DU TELEPHONE A L’ECOLE : Le ministère face à la riposte des syndicats et des parents d’élèves

 
 
 
L’interdiction pure et simple du téléphone à l’école, annoncée par le ministre de l’Éducation, déclenche une vive réaction au sein des syndicats et de l’Union des parents d’élèves. Entre approches radicales, inquiétudes sur la cohérence des mesures et appel à une large concertation, le débat s’étend au-delà de la salle de classe. Pour tous, une chose est claire, on ne gouverne pas l’école dans la précipitation.
 
 
 
Le ministère de l’Éducation nationale doit-il proscrire le téléphone portable dans tous les établissements scolaires ? La décision, certes claire dans son esprit, suscite des remous nourris, syndicalistes, représentants des parents d’élèves et acteurs de terrain dénoncent un mode de gouvernance trop brusque, une contradiction institutionnelle, et réclament un dialogue de fond avant toute application.
 
 
 
Les syndicats : incrédulité et condamnation
 
Pour Mbaye Sarr, secrétaire général du Sadef (Syndicat autonome pour le développement de l’éducation et de la formation), la mesure n’est pas seulement mal calibrée ; elle est le symptôme d’un pilotage « amateuriste » du ministère. « On croyait au début des annonces et des réformes, mais aujourd’hui, le discours s’effrite », assène-t-il. Le téléphone, selon lui, n’est qu’un prétexte : « quand on prend des décisions sans organiser les acteurs, quand on avance à tâtons, on compromet le système éducatif lui-même. »
Ibrahima Guèye, SG du Sudes, partage ce constat, bien qu’il reconnaisse les effets perturbateurs du téléphone en classe (distraction, abus comme l’enregistrement et la diffusion de professeurs sur TikTok…), il pointe la contradiction de demander aux élèves de bannir un outil qui pourrait leur servir, notamment dans le cadre des efforts du ministère pour introduire l’intelligence artificielle dans les apprentissages. L’enjeu technologique, estime Guèye, impose une cohérence : « si tous les élèves ne disposent pas d’ordinateur portable, il serait bon de leur permettre d’utiliser leur téléphone. »
 
 
 
L’Unapes, une voie médiane, plus de dialogue
 
L’Union des parents d’élèves et étudiants du Sénégal (Unapes), par la voix de son président Abdoulaye Fané, propose une démarche moins tranchée. Plutôt que d’aller vers une suspension radicale de l’usage du téléphone pour tous, il suggère de laisser aux proviseurs et aux principaux le pouvoir de décision dans leurs établissements. « L’administration scolaire existe, la surveillance existe. Il suffit que le proviseur ou le principal prenne la décision d’interdire les téléphones dans les salles de classe, voire dans certains lieux d’apprentissage », dit-il.
Unapes réclame aussi que le ministère revoie la circulaire encadrant l’usage du téléphone plutôt que de décréter une règle générale avec effet immédiat. Pour les parents, l’école n’est pas un espace clos : son bon fonctionnement suppose l’adhésion, la sensibilisation, et une responsabilisation collective, élèves, parents, enseignants, encadreurs, dès la maison autant que dans les établissements.
 
Contradictions et enjeux : de l’AI à la gouvernance
 
Le cœur de la polémique réside dans une contradiction perçue d’un côté, le ministère engage une réforme ambitieuse autour de l’intelligence artificielle, la formation de 105.000 enseignants, et la modernisation des méthodes pédagogiques ; de l’autre, il propose une restriction draconienne d’un outil qui pourrait, dans certains cas, accompagner cet effort numérique.
Les syndicats pointent ce paradoxe. Comment encourager l’usage des technologies de l’information pour apprendre, explorer, et innover, tout en interdisant d’emblée un moyen d’accès qui reste accessible à beaucoup le téléphone portable ? L’absence de clarté dans le message, dans l’agenda, dans l’organisation suscite légitimement inquiétude et méfiance.
 
 
 
Vers une concertation large, une exigence partagée
 
Un thème revient dans tous les discours : la concertation. Les syndicats veulent participer aux décisions, les parents se sentent exclus de réformes majeures, les élèves restent souvent silencieux dans les consultations officielles.
Mbaye Sarr insiste. « Toutes décisions qui doivent être appliquées par les élèves et pour les élèves doit être partagée par tous les acteurs de l’enseignement afin que tout le monde en décide. » L’Unapes réclame également que le ministère organise des rencontres avec les associations de parents d’élèves avant l’ouverture des classes, pour stabiliser la prise de décision puisque, selon eux, « il en va quand même de la sécurité de nos enfants ».
 
 
 
Propositions concrètes, des pistes à explorer
 
Plusieurs ressorts sont suggérés pour rendre cette interdiction acceptable.
Sensibilisation à la maison : éducation parentale visant à expliquer les risques et les règles autour du téléphone dès le foyer ; Agents de sécurité de proximité (Asp) : certains établissements pourraient avoir des agents dédiés à la collecte ou à la sécurisation des téléphones, pour éviter les abus ; Règlements d’établissement clairs : permettre à chaque proviseur d’adapter la mesure selon le contexte — urbain, rural, ressources disponibles ; Révision de la circulaire ministérielle : pour inclure les nuances, les modalités, les sanctions, et assurer la cohérence avec d’autres directives (IA, numérique éducatif).
 
Pour un ministère à la hauteur, sortir de l’improvisation
 
Ce que mandatent les syndicats et l’Unapes, au-delà du téléphone, c’est une gouvernance claire, stable, réfléchie. Le ministre de l’Éducation est mis au défi : comment allier ambition, réforme, modernité y compris dans l’usage des nouvelles technologies tout en maintenant l’ordre, la discipline, et la qualité de l’enseignement ?
Le système éducatif, affirment-ils, ne supporte pas l’à-peu-près. Il ne supporte pas les annonces tonitruantes déconnectées de la réalité des écoles, des classes, des familles les plus éloignées ou les mieux équipées.
 
Un appel à la raison et à l’inclusion
 
L’interdiction du téléphone à l’école pourrait être une mesure salutaire si appliquée dans un cadre concerté, réfléchi, partagé. Mais dans sa version actuelle, elle s’apparente davantage à un coup de force. Pour ne pas fragiliser un système déjà sous tension, le ministère se doit d’écouter les syndicats, les parents, les enseignants tous ceux qui vivent chaque jour la complexité de l’école au Sénégal. Un dialogue sincère, à l’approche de la rentrée et de l’ouverture des classes, pourrait non seulement éviter le rejet, mais créer une adhésion. Sinon, c’est l’autorité même du ministère qui risque de s’éroder, tout autant que la confiance dans les réformes promises. Le défi est posé : l’école ne doit pas être le lieu des décisions unilatérales, mais celui d’un projet partagé.
 
 Baye Modou SARR
 
 
 
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