Les travailleurs de la justice ont décrété encore une grève de 48 heures, les 31 juillet et 1er août 2025, à l’appel de l’Entente Sytjust–Untj. Cette mobilisation dépasse le cadre professionnel pour devenir un acte de résistance syndicale contre une gouvernance jugée autoritaire et sourde aux revendications sociales. Une escalade révélatrice d’un malaise profond entre l’État et ses agents.
L’atmosphère est tendue au palais de Justice. Ce jeudi 31 juillet, au lieu des bruissements habituels de dossiers et des allées et venues des greffiers et agents judiciaires, c’est le silence de la mobilisation qui règne. Deux jours durant, les travailleuses et travailleurs de la Justice observent une grève d’avertissement, dans un contexte de tensions croissantes entre syndicats et autorités.
Le mot d’ordre, lancé par l’Entente Sytjust–Untj, marque une rupture avec les formes classiques de contestation. «Ce n’est plus une simple grève professionnelle. C’est un acte de résistance», clame le communiqué, dans un ton grave et déterminé. Pour les syndicalistes, la coupe est pleine avec «des réquisitions jugées abusives, suspensions de salaire, pressions administratives, et surtout un silence persistant des ministères concernés, notamment celui de la Justice et celui de la Fonction publique», se désole le texte.
Depuis cinq mois, les préavis de grève s’enchaînent sans réponse concrète. Selon les greffiers grévistes, «le ministre de la justice s’est contenté de circulaires et de communiqués impersonnels, tandis que son homologue de la Fonction publique brille par un mutisme qui frise le déni». Une attitude que l’Entente interprète comme un mépris assumé, voire une tentative d’intimidation.
Mais ce sont justement ces tentatives de répression qui semblent galvaniser les grévistes. Loin de plier, ils dénoncent «une doctrine autoritaire qui assimile l’exercice du droit de grève pourtant garanti par la Constitution à une menace contre l’État». Pour l’Entente, «cette dérive signe une volonté de criminaliser l’action syndicale et de briser l’élan collectif des travailleurs de la Justice», lit-on dans le document rendu public qui ajoute : «il y a une entreprise de démolition des acquis syndicaux en cours», accuse un membre du bureau de l’UNTJ, qui déplore également l’absence de toute tentative de médiation ou de dialogue franc.
La grève de 48 heures intervient donc comme un signal fort. L’Entente Sytjust–Untj appelle à une mobilisation nationale au-delà du seul secteur judiciaire.
Les graves conséquences de la grève
Dans certains palais de justice du pays, les effets de la grève se font déjà sentir. «Audiences suspendues, greffes fermées, retards dans les procédures, la machine judiciaire tourne au ralenti». Mais pour les grévistes, il s’agit d’un mal nécessaire pour faire entendre une parole trop longtemps ignorée. Ils refusent d’être les «invisibles» de la chaîne judiciaire, alors qu’ils en sont les chevilles ouvrières. «Nous ne demandons pas la lune. Juste le respect, la reconnaissance de notre rôle dans l’État de droit, et des conditions de travail dignes », explique une greffière rencontrée devant le tribunal de grande instance de Dakar. Selon elle, ce combat dépasse le cadre salarial. «C’est une lutte pour notre dignité. Pour que le droit de grève ne soit pas vidé de sa substance.»
Si aucune réponse n’est apportée après cette grève d’avertissement, l’Entente envisage d’intensifier le mouvement. D’autres actions pourraient suivre, potentiellement plus longues et plus impactantes pour le fonctionnement des institutions judiciaires.
La grève des 31 juillet et 1er août ne s’inscrit donc pas seulement dans une logique revendicative. Elle est aussi, et surtout, le cri d’un corps professionnel en quête de justice… pour lui-même.
Baye Modou SARR












