Les autorités sénégalaises sont appelées à faire toute la lumière sur la répression violente des manifestations qui ont secoué le pays entre 2021 et 2024, ayant causé la mort d’au moins 65 personnes et des milliers d’arrestations. Un an après l’adoption de la loi d’amnistie exonérant les forces de sécurité de toute poursuite pour ces événements, Amnesty International exhorte le gouvernement à lever cet obstacle à la justice. Si des indemnisations ont été accordées à certaines victimes et à des familles de manifestants tués, ces mesures restent insuffisantes pour répondre aux exigences de vérité, de justice et de réparation. L’organisation de défense des droits humains appelle donc les autorités à abroger cette loi et à engager des poursuites contre les responsables des violations, conformément aux engagements pris par le nouveau pouvoir.
Les autorités sénégalaises doivent assurer justice, vérité et réparation aux milliers de victimes de la répression violente des manifestations survenues entre 2021 et 2024, a déclaré Amnesty International à l’occasion du premier anniversaire de la loi d’amnistie accordée aux forces de sécurité. Adoptée le 6 mars 2024, cette loi couvre tous les actes susceptibles d’être qualifiés de crimes ou délits en lien avec des «manifestations ou événements à motivation politique» ayant eu lieu entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024.
Durant cette période, Amnesty International et d’autres organisations de la société civile estiment qu’au moins 65 personnes ont perdu la vie, majoritairement par arme à feu, tandis que plus de 1000 ont été blessées et plus de 2 000 arrêtées. «La justice, la vérité et la réparation exigent que les forces de sécurité responsables d’un usage excessif et illégal de la force soient poursuivies. La loi d’amnistie est un obstacle que les autorités sénégalaises doivent lever, conformément à leurs engagements», a affirmé Marceau Sivieude, directeur régional par intérim d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. «L’aide financière accordée en 2024 à certaines victimes de détention et celle annoncée en 2025 aux familles des personnes tuées constituent un premier pas. Toutefois, cela ne répond ni à leur besoin de justice ni ne garantit que de tels abus ne se reproduiront pas. Les autorités doivent abroger la loi d’amnistie et rendre justice aux victimes des violations des droits humains lors des manifestations», a ajouté Seydi Gassama, directeur exécutif d’Amnesty International Sénégal.
Dans son communiqué, l’organisation de défense des droits humains rappelle que c’est l’arrestation en mars 2021 d’Ousmane Sonko dans le cadre d’une enquête judiciaire a déclenché une vague de manifestations à travers le pays, qui se sont prolongées sur trois ans. Des mobilisations ont également eu lieu contre la présumée volonté du président Macky Sall de briguer un troisième mandat ainsi que contre le report des élections présidentielles de février 2024. «Pendant la campagne des législatives anticipées de novembre 2024, le Premier ministre Ousmane Sonko avait promis d’abroger la loi d’amnistie pour rendre justice aux victimes des manifestations», rappelle encore le document.
Amnesty International revient aussi sur l’aide financière à certaines victimes de détentions arbitraires par l’Etat du Sénégal via le ministère de la Famille et des Solidarités. «En janvier 2025, cette assistance a été étendue aux familles des personnes tuées lors des manifestations et à d’autres victimes de détentions arbitraires. D’après un communiqué du ministère de la Famille et des Solidarités, le bilan des manifestations s’élève à 79 morts et 2172 anciens détenus assistés. Cette assistance s’est déroulée en dehors d’un cadre judiciaire, mais en concertation partielle avec des comités de prisonniers politiques et des organisations de la société civile, dont Amnesty International», note encore le document.
Sidy Djimby NDAO














