La décision de la Cedeao continue de faire parler d’elle. Hier, c’était au tour des membres de «Initiative 2017», coalition qui avait porté la candidature du maire de Dakar lors des derniers législatives, de donner son point de vue sur cette affaire. Comme s’il s’étaient passé le mot, Cheikh Bamba Dièye, Hélène Tine et Moussa Taye, qui faisaient face à la presse, ont tiré à boulets rouges sur Macky Sall et son gouvernement, avant d’inviter les magistrats à se ressaisir.
Ils avaient fait de Khalifa Sall leur tête de liste lors des dernières législatives et malgré qu’il soit élu député, le maire de la ville de Dakar est demeuré en prison. Avec la sortie de l’arrêt de la Cour de justice de la Cedeao, Cheikh Bamba Dièye, Hélène Tine et Moussa Taye ont encore témoigné leur soutien au député-maire. Selon le leader du Fsd/Bj, la Cedeao ne fait que confirmer leur position depuis le début de cette affaire.
Cheikh Bamba Dièye : «Macky Sall et ses ministres doivent se taire. Ils ont sali l’honorabilité de ce pays, ils nous ont ridiculisés aux yeux du monde»
Pour Cheikh Bamba Dièye, pendant longtemps, dans ce dossier, beaucoup ont pensé qu’il s’agissait d’un débat de politiciens. «Il n’y a pas une autorité politique ou religieuse qui n’a pas été visitée et interpellée. La décision de justice de la Cedeao ne nous apprend absolument rien, mais elle a quand même le mérite de prouver que dans ce dossier, rien n’a été fait dans les règles de l’art», déclare M. Dièye, avant d’ajouter : «maintenant, la question qui se pose, c’est est-ce qu’il est normal qu’au Sénégal, un citoyen et pas n’importe quel citoyen, puisse être brimé, martyrisé, ridiculisé et roulé dans la farine à travers un procès inéquitable ? Il faut le constater, des juristes qui ont été formés dans les mêmes écoles que les magistrats qui ont été à la base de cette forfaiture, ont eu une lecture distante sur cette affaire».
A l’en croire, il y a malheureusement dans le Sénégal d’aujourd’hui beaucoup trop d’hypocrites, beaucoup de gens qui se conglomèrent autour des intentions et de la volonté de Macky Sall de construire son association de malfaiteurs. «Son dessein est clair, il veut attenter aux libertés de toutes les personnes crédibles de ce pays pour que le jour de l’élection présidentielle, il soit le seul à dérouler. Macky Sall et ses ministres sont disqualifiés dans ce dossier, ils doivent se taire. Ils ont sali l’honorabilité de ce pays, ils nous ont ridiculisés aux yeux du monde. S’ils veulent persister dans l’erreur, qu‘ils aient au moins la décence de reconnaître leur erreur avant de recommencer le procès», affirme Cheikh Bamba Dièye.
Moussa Taye : «les propos qui ont valu 6 mois de prison à Barth ne sont pas plus graves que ceux du ministre de l’Hydraulique à l’encontre des magistrats de la Cedeao»
Selon Moussa Taye, le débat n’est pas aussi compliqué qu’on veut le faire croire. «Le président de la République a fait une sortie, son parti, à travers son porte-parole et secrétaire général du gouvernement, a fait une sortie et comme si cela ne suffisait pas, son ministre en charge de l’Hydraulique, comme s’il n’avait pas déjà la pénurie d’eau sur le dos, a décidé de s’y mettre. Ce qu’il a dit n’est pas moins grave que les déclarations qui ont valu 6 mois de prison à Barthélemy Dias. Il a sous-entendu que les magistrats de la Cedeao ont été soudoyés», renseigne le conseiller politique de Khalifa Sall. D’après ce dernier, la déclaration du président de la République est un aveu de taille. «Il paraît qu’il a décidé de ne céder à aucune pression, ni nationale encore moins internationale. Cette sortie nous confirme au moins que c’est lui qui décide. Et nous qui pensions que la décision que nous attendions devait venir de la Cour d’appel de Dakar», peste M. Taye.
Sur le refus des tenants du pouvoir de respecter l’arrêt de la Cour de justice de la Cedeao, Moussa Taye lâche : «Pourtant, nous nous sommes à maintes reprises basés sur la Cedeao dont la décision est aujourd’hui remise en question par les autorité sénégalaises. Elle nous a permis d’intervenir en Gambie, nous avons un juge à la Cedeao et un autre Sénégalais est le président du Parlement de la Cedeao. Ce qui est aberrant, c’est qu’à chaque fois que le Sénégal a soumis une affaire à un juge qui n’a pas été nommé par Macky Sall, l’Etat a perdu», révèle-t-il.
Hélène Tine : «une procédure viciée ne peut produire un jugement acceptable»
La coordonnatrice du Mouvement pour un Sénégal d’éthique et de travail estime que c’est indécent que des ministres attaquent la Cour de justice de la Cedeao. «Nous avons tous entendu un ministre de la République sous-entendre que la Cour a été soudoyée. Il devait normalement avoir d’autres chats à fouetter. Au moment où les Sénégalais sont assoiffés, il se permet d’attaquer la Cour de la Cedeao en rabaissant le pays davantage. Ils osent nous dire que la décision de la Cedeao n’a jamais demandé la libération de Khalifa Sall ; pourtant, elle a fait mieux, en déclarant que toute cette procédure est nulle et non avenue. Une procédure viciée ne peut produire un jugement acceptable. Le Sénégal a pris des engagements vis-à-vis des organismes internationaux, qu’il faudrait respecter», souligne Hélène Tine avant de préciser : «cela fait presque un an et demi que Khalifa Sall est emprisonné de façon arbitraire et qu’on est épinglé au plan communautaire, on cherche des échappatoires, c’est inacceptable. Nous interpellons les chefs religieux, c’est le moment même de jouer leur rôle de régulateurs», conclut-elle.
Ndèye Khady D. FALL
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