Après avoir reçu la somme de 500.000 dollars de la justice américaine pour l’indemnisation de son époux, Makhtar Sakho, victime d'une erreur médicale, Awa Diop, sur la base d'un supposé faux certificat de mariage, encaisse les sous qu'elle dissipe par la suite. Elle encourt 2 ans de prison ferme pour escroquerie, abus de confiance, faux et usage de faux. Délits pour lesquels son ex-époux l'a traînée hier, jeudi 20 février 2025, devant le tribunal correctionnel de Dakar.
Voilà un autre couple qui se déchire devant le tribunal pour une affaire de sous qui date d’il y a 15 ans. Le montant du préjudice est colossal par rapport à ce qu'on avait l'habitude de voir à la barre entre d'autres conjoints. C'est la somme de 500.000 dollars qui est la pomme de discorde entre Makhtar Sakho et Awa Diop, jadis mariés. L'histoire entre ces ex-époux a commencé au pays de l'oncle Sam, où ils se sont rencontrés avant de se marier. Awa exerce la profession d'enseignante. Hélas, tout a basculé le 15 octobre 2010, quand Makhtar Sakho a eu un accident par suite d’une erreur médicale. Il plonge ainsi dans le coma. Awa Diop, alors son épouse, intente une procédure judiciaire devant la Cour suprême de l'Etat de New York pour demander réparation pour son mari, en confiant le dossier à un avocat américain. À cet effet, elle produit un faux certificat de mariage datant du 8 octobre 2000 et qui a été délivré par le centre d'état civil de Leona Thiaroye et non de celui de Thiès où leur mariage religieux a été célébré. Heureusement pour elle, elle a gagné cette bataille judiciaire à l'issue de laquelle Makhtar Sakho a été indemnisé à hauteur de 500.000 dollars. Mais, curieusement, le 20 septembre 2015, elle rapatrie son mari auprès de sa famille au Sénégal, alors qu'il était très malade. Mais pour ce faire, Awa Diop avait demandé aux Américains un rapatriement sous sauf-conduit en le présentant comme un émigré qui travaillait dans le noir et qui était en situation irrégulière, alors que le passeport américain de son époux était toujours en cours de validité.
Une fois au Sénégal, elle laisse une personne malade et en situation inconsciente à sa famille, sans leur confier qu'il a été indemnisé.
C’est 7 ans plus tard, en 2022, que sa famille découvre que Makhtar Diop a été indemnisé. Le pot aux roses a été découvert par les proches du plaignant au cours d'une des émissions qu'animait à la Tfm Kebs Thiam, où Awa Diop, ‘’devenue Madame Diouf’’, était présentée comme une mécène. Pour quelqu'un qui avait abandonné le père de ses deux enfants malade et sans soutien financier entre les mains de sa famille, les bonnes œuvres que faisait Awa Diop avaient surpris. C'est là que le malade en personne, Makhtar Sakho, a donné une procuration à son frère Cheikh pour qu'il aille auprès des autorités consulaires des États-Unis procéder à des vérifications. C'est ainsi qu'on leur a confié qu'il avait reçu de l'Etat américain un dédommagement après l'erreur médicale qu'il a subie.
Awa Diop, interrogée à ce sujet, a reconnu avoir remis à son ex sa part du montant perçu des autorités américaines.
Awa Diop réfute
Makhtar Sakho décida alors de la traduire en justice pour abus de confiance, escroquerie, faux et usage de faux dans un document administratif. L'affaire a atterri hier, jeudi 20 février 2025, devant le tribunal correctionnel de Dakar. Devant le juge, Awa Diop a réfuté ces faits. "Lorsqu'on est allé à l'hôpital, on m'a dit qu'il y avait deux de ses nerfs de la tête qui sont endommagés. Pendant 3 mois, il était dans le coma. J'ai pris soin de lui en l'internant dans une maison de retraite de 2010 jusqu'à 2015, sans l'aide de personne. J'ai porté ce combat toute seule et j'ai été dédommagée au même titre que lui. J'ai cherché l'avocat pour la procédure judiciaire. On a gagné et fait le partage avec l'avocat. Je perçois un salaire de 60 millions de F Cfa en tant qu’enseignante aux Usa. Je n'ai donc pas besoin de l'escroquer. Je ne lui dois absolument rien. J'ai été indemnisée à hauteur de 1 million de dollars et on devait se partager l'argent. Il a pris sa part. En plus, je n'ai pas besoin de dire à sa famille qu'il avait obtenu une compensation. C'est à lui de le leur dire puisque je ne m'entendais pas avec eux. En plus, je garde pour moi la somme que j'ai gagné puisque c'est ma vie privée", a-t-elle allégué avant que son mari ne bondisse de son siège en criant que c'était faux. Elle poursuit : "j'ai été indemnisée au même titre que lui parce que je suis sa femme. Il m'a par ailleurs offert 100 mille dollars et c'est lui-même qui me les a virés".
Makhtar Sakho
L’ex-époux, Makhtar Sakho, traînait visiblement toujours des séquelles de son Avc. Cette partie civile qui ne s'est toujours pas remise peinait non seulement à tenir sur ses deux jambes, mais arrivait difficilement à répondre aux questions du juge. Depuis le siège où il est assis, il a essayé de donner sa version des faits. "J'ai subi un Avc et j'étais plongé dans le coma. Ce qui fait que je ne savais rien de ce qui s'est passé. C'est une fois rentré au Sénégal que j'ai su que l'Etat américain m'a indemnisé", a-t-il lancé avant que sa vieille mère qui était juste assise derrière lui cria : "c'est mon fils. Je suis sa mère. Il a été dédommagé à hauteur de 1milliard et 8 millions F Cfa. Mais Awa Diop s'est cherché un nouveau mari après avoir encaissé l'argent de mon fils. Elle nous l'a ramené malade au Sénégal". Très agitée à côté de sa sœur, la mère de Makhtar Sakho a été éconduite de la salle d'audience par un gendarme sur ordre du juge. Après cet incident, Makhtar Sakho a continué sa narration des faits. "Je n'ai pas vu la couleur de cet argent. C'est ma famille qui me donne l'argent pour le petit-déjeuner, le transport pour mes soins. Je n'ai aucun sou", a-t-il lancé.
La partie civile réclame 1 milliard
L'avocat de la victime, Me Diène Ndiaye, a dit au tribunal que Awa Diop a cherché à manipuler le tribunal en racontant du toc. Me Diène a précisé que son client avait la nationalité américaine, ce qui fait que si sa femme avait montré ce document à ces autorités, elles n'allaient pas laisser leur fils quitter leur territoire dans cet état. Pour cela, il a réclamé 1 milliard de F de dédommagement.
Le procureur requiert 2 ans
Le procureur, pour sa part, estime que Awa Diop a caché le passeport américain de son époux pour encaisser les 500.000 dollars que l'Etat américain lui avait alloués avant de le transporter au Sénégal en sauf-conduit. Makhtar Sakho, selon le ministère public, avait besoin d'une assistance et non de l'accaparement de son argent. Qualifiant les faits de graves, il a requis 2 ans de prison ferme contre la prévenue qui a comparu en liberté provisoire.
La défense plaide la prescription, délibéré le 3 avril prochain
Me Abdou Dialy Kane, avocat de la défense, a fait état de faits prescrits, avant de demander au tribunal de déclarer les poursuites éteintes et de relaxer sa cliente. "Il y a prescription puisque les faits datent de 15 ans. Au moment où il déposait sa plainte, les faits étaient prescrits. Aucune manœuvre frauduleuse n'a été décelée. On ne peut pas lui reprocher d'avoir saisi la justice américaine pour obtenir réparation. En plus, l'argent devait être partagé à parts égales. La famille de la partie civile a attendu 2022 pour déposer plainte alors qu'il est rentré au Sénégal en 2015", a tonné Me Kane qui a souligné que cette affaire relève d'une mauvaise foi, puisqu'on avait tenté de la taxer de faussaire lorsqu'elle a produit l'acte d'opposition qui lui a été délivré par le juge de Thiès qui a ordonné la discontinuation des poursuites. Délibéré au 3 avril prochain.
Fatou D. DIONE
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