Comme annoncé lors de leur conférence de presse de la semaine dernière, les députés de la coalition Benno Bokk Yakaar, actuellement majoritaires à l’Assemblée nationale, vont entreprendre les démarches pour modifier l’article 87 de la Constitution. Abdou Mbow et Cie sont déterminés à enlever au Président Bassirou Diomaye Faye son pouvoir de dissolution du parlement.
Les remous notés ces temps-ci entre le Premier ministre et les députés de Benno Bokk Yakaar vont aller crescendo. Répondant aux «menaces» de Ousmane Sonko et son refus de passer à l’hémicycle pour sa Déclaration de politique générale sous le Règlement intérieur en vigueur à l’Assemblée, le groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar, majoritaire dans le bureau, a déjà posé un premier acte, avec l’annulation du Débat d’orientation budgétaire. Ils ont maintenant décidé de passer à la vitesse supérieure avec la modification de l’article 87 de la Constitution qui donne au président de la République le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale deux ans après son installation. Il nous revient que Abdou Mbow et Cie sont en pleine manœuvre pour faire passer ladite proposition de loi en session extraordinaire.
En effet, comme le stipule la Constitution en son article 103 alinéa 1, «L'initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au président de la République et aux députés».
À l’alinéa 3 du même article, il est souligné que «le projet ou la proposition de révision de la Constitution doit être adoptée par l'Assemblée nationale selon la procédure prévue à l'article 71 de la présente Constitution. La révision est définitive après avoir été approuvée par référendum. Toutefois, le projet ou la proposition n'est pas présenté au référendum lorsque le président de la République décide de le soumettre à l'Assemblée nationale. Dans ce cas, le projet ou la proposition n'est approuvé que s'il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés (…)».
Les députés de Benno Bokk Yakaar vont donc s’appuyer sur les dispositions de l’article 103 de la Constitution pour entreprendre une révision de l’article 87 du même texte.
Pour rappel, ce dernier permet au Président Bassirou Diomaye Faye de dissoudre l’Assemblée nationale dès le mois de septembre. Il est dit dans cet article : «Le président de la République peut, après avoir recueilli l'avis du Premier ministre et celui du président de l'Assemblée nationale, prononcer, par décret, la dissolution de l'Assemblée nationale. Toutefois, la dissolution ne peut intervenir durant les deux premières années de législature. Le décret de dissolution fixe la date du scrutin pour l'élection des députés. Le scrutin a lieu soixante jours au moins et quatre-vingt-dix jours au plus après la date de publication dudit décret. L'Assemblée nationale dissoute ne peut se réunir. Toutefois, le mandat des députés n'expire qu'à la date de la proclamation de l'élection des membres de la nouvelle Assemblée nationale».
Si Benno réussit à acter la modification de l’article 87 par majorité absolue, ce sera au Président Diomaye de la promulguer
Ce qui permettrait au Président Bassirou Diomaye Faye de renverser la tendance en cherchant une majorité absolue ou relative au parlement afin d’éviter les bras de fer entre l’exécutif et le parlement. Pour faire valider leur coup, Abdou Mbow et Cie veulent introduire une proposition de loi en session extraordinaire, puisqu’ils sont actuellement en vacances parlementaires. Même s’ils sont majoritaires à l’hémicycle, les députés de Benno comptent s’accorder, nous dit-on, avec des députés de Taxawu Sénégal et certains membres du Pds pour avoir une majorité absolue comme le stipule l’article 71 de la Constitution. «Après son adoption par l'Assemblée nationale à la majorité absolue des suffrages exprimés, la loi est transmise sans délai au président de la République pour promulgation». L’article 72 vient ensuite détailler les délais. «Le président de la République promulgue les lois définitivement adoptées dans les huit (08) jours francs qui suivent l'expiration des délais de recours visés à l'article 74 (…)».
Le président Faye peut demander une nouvelle délibération
Néanmoins, cela peut ne pas épuiser la procédure. Le président de la République à qui il revient de promulguer la loi peut renvoyer le dossier à l’Assemblée nationale pour un autre round. C’est l’article 73 de la Constitution qui traite la question dans son premier alinéa : «Dans le délai fixé pour la promulgation, le président de la République peut, par un message motivé, demander à l'Assemblée une nouvelle délibération qui ne peut être refusée. La loi ne peut être votée en seconde lecture que si les trois cinquièmes (3/5) des membres composant l'Assemblée nationale se sont prononcés en sa faveur».
En seconde lecture, il faudra 99 députés favorables… pour faire passer la loi
Dans le cas actuel, les 3/5 des membres composant l’Assemblée représentent 99 députés. Sachant que le groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar compte 82 députés, Abdou Mbow et Cie sont en train de chercher l’appui de leurs collègues des autres sensibilités présentes à l’Assemblée, qui ne sont pas totalement fermés à la proposition de Benno, nous souffle notre source.
Si le délai constitutionnel est dépassé, il revient au président de l’Assemblée de promulguer la loi
Si cette seconde procédure est engagée, «le délai de promulgation est suspendu jusqu'à l'issue de la seconde délibération de l'Assemblée nationale ou de la décision du Conseil constitutionnel déclarant la loi conforme à la Constitution», note on dans l’article 75 de la constitution alinéa 1. Le deuxième alinéa du même article stipule : «dans tous les cas, à l'expiration des délais constitutionnels, la promulgation est de droit ; il y est pourvu par le président de l'Assemblée nationale».
Ndèye Khady D. FALL












