Dans une note de service signée hier par son Directeur général, Serigne Fall Guèye, le Grand Théâtre national du Sénégal a officiellement interdit le port de greffages, de perruques et la pratique de la dépigmentation à l’ensemble de son personnel. Cette décision, qui entre en vigueur dès la date de signature, soulève de nombreuses questions dans le monde du travail.
Une mesure pour «préserver l’image de l’institution»
Les femmes sont averties : interdiction formelle du port de greffages, de perruques et la pratique de la dépigmentation. C’est la décision prise au Grand Théâtre par son Directeur Général, Serigne Fall Guèye qui affirme que ces pratiques sont formellement interdites dans l’administration. Dans le document estampillé du sceau du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Culture, l'administration du Grand Théâtre explique que cette interdiction vise à préserver l’image de l’institution. Elle justifie cette décision par la nécessité de promouvoir les valeurs panafricaines, conformément à sa mission de représentation culturelle nationale et africaine. «L’institution se doit de promouvoir les valeurs panafricaines, conformément à l’une de ses missions», lit-on dans la note.
Le Directeur général dit accorder une attention particulière à l’application stricte de cette décision.
Entre esthétique personnelle et identité culturelle
Cette mesure risque de susciter un vif débat sur les réseaux sociaux et dans les cercles culturels. Si certains y verront une initiative visant à réaffirmer l’esthétique africaine, d’autres y voient une atteinte à la liberté individuelle et une intrusion dans l’apparence physique des employés.
La question de la dépigmentation, en particulier, renvoie à un enjeu de santé publique au Sénégal, où les autorités sanitaires et Ong ont souvent alerté sur les dangers des produits éclaircissants. Cependant, son interdiction dans un cadre administratif pose la question des critères de contrôle et de la mise en œuvre.
Le cadre juridique encore flou
Aucune loi sénégalaise ne proscrit à ce jour la dépigmentation volontaire ni le port de perruques ou greffages, ce qui rend cette note de service juridiquement délicate. Des spécialistes du droit du travail interrogés "estiment que si l’apparence physique ne nuit pas à la fonction, il pourrait être difficile de justifier une telle interdiction".
Une mise à l’épreuve de la nouvelle orientation culturelle
Cette annonce survient dans un contexte politique où plusieurs voix appellent à une revalorisation de la culture africaine et à une rupture symbolique avec les canons esthétiques occidentaux. Le Grand Théâtre, vitrine culturelle du pays, semble vouloir jouer un rôle pionnier dans cette démarche.
Reste à savoir si cette initiative sera suivie par d'autres institutions culturelles, ou si elle fera l'objet d’un retrait ou d’un réaménagement face aux critiques attendues.
Samba THIAM