Alors que le Sénégal s’engage dans une nouvelle phase de concertations politiques, l’ancien député Cheikhou Oumar Sy appelle à un préalable indispensable : poser les bases d’un dialogue socio-économique inclusif pour bâtir un véritable projet de société.
Le Sénégal s’apprête à ouvrir un nouveau cycle de concertations entre partis politiques et mouvements, centré notamment sur la rationalisation de l’espace partisan et les réformes électorales. Une dynamique de pacification démocratique à saluer, reconnaît Cheikhou Oumar Sy. Mais l’ancien député et président de l’Observatoire de suivi des indicateurs économiques en Afrique (Osidea) prévient : «peut-on réformer durablement le champ politique sans avoir d’abord défini le projet de société autour duquel il devrait s’ordonner ?»
Pour lui, les défis socio-économiques sont profonds. Le système éducatif est à la croisée des chemins, contraint d’intégrer les compétences numériques et les nouveaux métiers. Le chômage des jeunes demeure élevé 18,8% en 2023 selon la Banque mondiale et l’économie peine à se diversifier. «Il ne s’agit pas seulement de se pencher sur des indicateurs macroéconomiques, mais bien de réfléchir à un modèle de société fondé sur la justice sociale, la valorisation du capital humain et la souveraineté économique», plaide-t-il. À l’échelle mondiale, les équilibres géopolitiques se recomposent rapidement. Conflits entre grandes puissances, guerre en Ukraine, crises en Afrique de l’Ouest… Dans ce contexte, l’Afrique, riche en ressources, attire aussi bien convoitises que partenariats. « Si nous ne définissons pas nous-mêmes notre modèle de développement, d’autres le feront à notre place», alerte Cheikhou Oumar Sy.
Selon lui, la transition énergétique, l’économie numérique, la sécurité alimentaire ou la réforme foncière doivent structurer un dialogue économique de fond. « À quoi sert-il de rationaliser les partis politiques si ceux-ci ne sont pas capables de proposer des visions économiques claires et cohérentes ? », interroge-t-il. Pour donner un sens au politique, il faut d’abord redonner sa centralité au social et à l’économie.
Le président de l’Osidea appelle à un dialogue élargi et participatif. «Ce dialogue ne doit pas être technocratique ou réservé à une élite. Il doit associer les collectivités territoriales, les syndicats, les entreprises, les universitaires, les jeunes et les femmes. » Il cite notamment le programme Pasc et son mécanisme de «Dialogue Structuré» comme initiative innovante et prometteuse. «Réconcilier les Sénégalais entre eux, restaurer la confiance dans les institutions, promouvoir la stabilité, cela commence par définir ensemble ce que signifie vivre dignement dans le Sénégal du XXIe siècle», conclut Cheikhou Oumar Sy. Un socle partagé, sans lequel aucun dialogue politique ne pourra produire un véritable renouveau démocratique.
Khadidjatou D.GAYE












