Dans un hémicycle électrisé par l’adoption du projet de loi n°14/2025 relatif à l’accès à l’information, la voix de Me Aïssata Tall Sall s’est élevée avec autorité et précision. Celle qui fut ministre de la Justice sous Macky Sall a livré une leçon de droit appliqué et un plaidoyer méthodique pour repenser l’accès à l’information judiciaire au Sénégal. «L’avocat du barreau du Sénégal est souvent confronté à un problème d’accès à l’information judiciaire», a-t-elle posé d’emblée, dénonçant une situation bien connue des professionnels du droit, mais trop souvent ignorée du grand public.
Le casier judiciaire : un document capital entre de mauvaises mains
Au cœur de son intervention, le casier judiciaire, un document-clé dans la vie juridique, administrative et même sociale d’un citoyen. Pourtant, selon elle, il reste trop souvent sous la seule responsabilité des greffiers, sans encadrement hiérarchique judiciaire adéquat. «Il faut judiciariser le casier judiciaire, qui est souvent laissé entre les mains des greffiers. Il serait bon, à la tête du casier judiciaire, qu’il y ait un magistrat assermenté, rompu, connaissant l’importance et la teneur de ce document pour que nous puissions le fiabiliser».
Dans la même logique, Me Tall Sall a élargi son propos au registre de commerce, un autre pilier de l’information judiciaire, mais également de l’économie nationale. «Je vous appelle à moderniser le registre de commerce pour nous permettre d’avoir un bon classement dans le Doing Business».
Des archives judiciaires trop négligées : un enjeu mémoriel et pratique
Me Tall Sall n’a pas manqué d’aborder un point crucial souvent oublié : les archives judiciaires. Pour l’avocate, la mémoire judiciaire est une richesse nationale qu’il faut préserver, organiser et rendre accessible «Un dossier ne meurt jamais. Même 15 ans ou plus après, le client aura toujours besoin de quelque chose : un jugement rendu, un arrêt, une décision, des conclusions, une jurisprudence. » Elle souligne que si les cabinets d’avocats s’imposent cette rigueur, les tribunaux doivent en faire autant. Et pour cela, la digitalisation est incontournable. «Il serait bon que nous y travaillions sérieusement en digitalisant les archives, pour que la jurisprudence nous soit accessible et qu’elle soit livrable en un clic.»
Baye Modou SARR