Alors que la variole du singe et la fièvre de la vallée du Rift menacent le pays, l’Alliance des syndicats autonomes de la santé (Asas) And Gueusseum dénonce l’inertie de l’État et tire la sonnette d’alarme sur l’absence d’actes promis par le gouvernement, la rétention d’informations sanitaires et surtout la gestion «hors cadre» des patients référés par des infirmiers dans les centres de santé, qui exposent les populations à des risques accrus.
Les syndicats du secteur de la santé sonnent le tocsin. Dans un contexte sanitaire déjà fragilisé par l’apparition de nouvelles épidémies telles que la variole du singe et la fièvre de la vallée du Rift, l’Alliance des syndicats autonomes de la santé (Asas), And Gueusseum, met en garde le gouvernement sénégalais contre «l’inertie» et «le statu quo» qui prévalent dans l’application des accords signés.
And Gueusseum rappelle qu’une trêve humanitaire avait été décrétée «pour épargner les populations». Mais, selon les syndicalistes, cette trêve touche à sa fin. «Comme si l’histoire bégayait, le gouvernement reste dans un mutisme incompréhensible», déplore l’organisation. Elle avertit qu’à l’issue de sa prochaine rentrée syndicale, elle sera «contrainte de déterrer la hache de guerre», lançant ainsi un quatrième plan d’actions.
Une crise sanitaire qui couve
And Gueusseum insiste : une grève dans un tel climat sanitaire «serait dramatique» et la responsabilité en incomberait au gouvernement. Les syndicalistes exhortent le ministère de la Santé, renforcé par la nouvelle Direction de l’Hygiène publique, à opérer un véritable changement de paradigme. «Le Service national de l’information et de l’éducation pour la santé hiberne dans un profond sommeil alors qu’il devrait éveiller et accompagner les populations», accuse le directoire. Dans le même temps, «l’Action sociale est en migration forcée», ajoute-t-il, dénonçant un vide dans l’accompagnement communautaire.
And Gueusseum demande expressément l’organisation de séances massives d’information et de sensibilisation à destination des citoyens, la formation et la protection des agents de santé, et un plan cohérent pour endiguer les épidémies avant qu’elles ne deviennent «de macabres endémies». «Nous ne pouvons pas attendre que l’irréparable se produise», martèle l’organisation.
Le risque des «gestionnaires improvisés»
L’un des points les plus sensibles soulevés par les syndicalistes concerne la gestion des patients référés. Dans les centres de santé, déplore le directoire, «ce sont les infirmiers qui, en lieu et place des médecins, gèrent illégalement les cas référés par leurs homologues des postes de santé». Une pratique que le syndicat juge «dangereuse» et susceptible d’accroître les complications médicales en cas d’épidémie. «Comment peut-on prétendre créer une fonction de “Médecin-ICP” au moment où les infirmiers assument déjà des charges pour lesquelles ils ne sont ni mandatés ni formés ?», s’interroge And Gueusseum.
Les syndicalistes rappellent que ces dérives interviennent alors que même des directeurs expérimentés ont été défénestrés et que des gestionnaires restent oisifs, tandis que la gestion des hôpitaux continue d’être confiée à des médecins malgré un déficit criant dans ce corps.
Réformer, mais pas en catimini
And Gueusseum s’insurge également contre l’approche «quasi solitaire» du ministère de la Santé qui «en catimini planche sur des révisions de la réforme hospitalière et de la carte sanitaire». Ces projets, estime le syndicat, devraient être débattus publiquement et impliquer les acteurs de terrain, au risque sinon de reproduire «les monstres» qu’ont pu devenir certains Comités de développement sanitaires (Cds).
Baye Modou SARR