Après une année 2024 marquée par d’importantes difficultés opérationnelles et financières, Air Sénégal amorce un redressement visible au premier semestre 2025. C’est ce que révèle une fiche comparative interne analysant les performances de la compagnie entre les deux périodes. Baisse de la dette, amélioration de la ponctualité, rationalisation du réseau : les premiers résultats de la restructuration engagée il y a quelques mois sont désormais tangibles.
En juillet 2024, Air Sénégal n’opérait qu’avec la moitié de sa flotte, soit quatre avions sur huit, en raison de pannes successives touchant plusieurs appareils et d’une indisponibilité prolongée des pièces de rechange. La compagnie, qui desservait alors 21 destinations, était également contrainte de louer quatre avions supplémentaires (A319 et A321) pour maintenir son programme.
Cette situation a entraîné une explosion des coûts, des retards fréquents, des vols annulés et une forte hausse des réclamations. Les pertes mensuelles oscillaient alors entre 6 et 7 milliards F Cfa, avec une dette atteignant 118 milliards F Cfa au 31 juillet 2024. L’organisation interne, dimensionnée pour huit avions, se retrouvait par ailleurs en décalage total avec la capacité réelle d’exploitation.
Un recentrage stratégique engagé en 2025
Le nouveau management a initié une restructuration en profondeur articulée autour de quatre axes et douze actions prioritaires. En commençant par la suspension des lignes non rentables. En effet, plusieurs routes structurellement déficitaires - New York, Marseille, Lyon, Milan, Barcelone, Douala et Libreville - ont été arrêtées. Cette décision a permis une économie moyenne de 3,4 milliards F Cfa par mois. Air Sénégal a repositionné ses dessertes en introduisant la 5ᵉ liberté sur plusieurs axes régionaux, permettant de transporter 85.666 passagers et de générer 9,4 milliards F Cfa sur ces nouvelles liaisons.
Assainissement financier
Un montant de 25 milliards F Cfa a été mobilisé auprès d’une banque locale pour apurer une partie des dettes urgentes. L’État a par ailleurs réglé l’intégralité de la dette envers les structures publiques, tout en renforçant les fonds propres de la compagnie.
Rationalisation de la flotte
La résiliation des contrats de location des quatre Airbus en leasing a mis fin à des coûts de maintenance jugés incontrôlables. En clair, Air Sénégal prévoit également : la mise en service d’un second ATR en novembre 2025, l’intégration de quatre LET L410 NG dans sa filiale Air Sénégal Express, l’exploitation simultanée de ses deux A330 Neo pour assurer la stabilité de la ligne Dakar–Paris.
Des résultats visibles dès le premier semestre 2025
Malgré un volume d’activité inférieur à celui de 2024 (51.564 passagers et 579 vols de moins), la compagnie a enregistré une hausse de 5,7% de son chiffre d’affaires, soit 3,3 milliards F Cfa supplémentaires. Cette performance inattendue s’explique par : une nouvelle stratégie tarifaire, une amélioration du revenu moyen par billet, une optimisation du remplissage grâce aux dessertes multi-tronçons. D’ailleurs les indicateurs opérationnels ont connu une transformation spectaculaire. Une nette progression dans la ponctualité : de 35% en juin 2024 à 91,5% en décembre 2024 ; sans oublier la régularité : de 40% à 100% sur la même période.
Baisse significative des charges
Les dépenses d’exploitation sont passées de 92,1 milliards F Cfa à 74,4 milliards F Cfa, soit une réduction de 19,14%. Les plus fortes baisses concernent : les frais passagers (-79%), les frais équipage (-57%), le carburant (-41%), la sûreté (-38%), la location d’avions (-32%). Grâce à ces efforts combinés, la dette opérationnelle a chuté de 118 milliards F Cfa à 37 milliards F Cfa en une année.
La restructuration engagée apparaît, à ce stade, comme un virage décisif pour Air Sénégal.
Avec une dette réduite, une flotte rationalisée, un réseau plus efficace et des performances opérationnelles enfin stabilisées, la compagnie semble entrer dans une phase de reconquête.
Les prochains mois seront déterminants pour confirmer ce redressement, mais une chose est sûre : Air Sénégal montre désormais les signes d’une transformation profonde et méthodique, tournée vers la performance et la durabilité.
Samba THIAM