Le député Thierno Alassane Sall n’a pas mâché ses mots à la suite de la publication du rapport de la Cour des comptes sur l’état des finances publiques. Dans une déclaration au vitriol, il dresse un parallèle troublant entre le fonctionnement actuel de l’administration sénégalaise et celui du Zaïre sous Mobutu ou de la République Centrafricaine sous Bokassa. L’ancien ministre de l’Énergie, qui dénonce déjà une justice sélective et inéquitable, met également en garde contre une instrumentalisation politique du rapport, estimant que certains anciens dignitaires bénéficient déjà d’une clémence coupable après avoir rejoint les rangs du nouveau régime.
Le président de la République des Valeurs est formel : «notre administration fonctionne presque comme celle du Zaïre sous Mobutu ou de la République Centrafricaine sous Bokassa.» Selon Thierno Alassane Sall, en effet, le rapport de la Cour des comptes confirme les craintes qu’il exprime depuis des années, tant dans la presse qu’à l’Assemblée nationale. Il dénonce un «carnage» dans la gestion des finances publiques, où les règles les plus élémentaires de contrôle ont été «allègrement violées» par plusieurs échelons, tant publics que privés. Les directions des finances, les services du budget, et même les banques, sont pointés du doigt pour leur manque de rigueur. Le député exige que les responsabilités soient clairement établies et que des sanctions sévères soient appliquées à tous les niveaux.
Le député s’interroge sur l’utilité de la Cour des comptes, dont le budget conséquent et les pouvoirs importants semblent peu utilisés pour un contrôle efficace et indépendant. Il rappelle que la Cour a régulièrement donné son quitus au gouvernement, y compris pour l’exercice 2022, et que le projet de loi de règlement 2023 avait été retiré in extremis de l’ordre du jour de la dernière session extraordinaire de la 14e législature. Pour Thierno Alassane Sall, cela soulève des doutes sur l’indépendance réelle de cette institution. «À quoi sert la Cour des comptes si elle n’agit de manière sérieuse que sur commande ?», s’interroge-t-il.
L’Assemblée nationale appelée à se réinventer
Le parlementaire ne ménage pas non plus l’Assemblée nationale, qu’il accuse d’avoir voté les lois de règlement «à l’aveugle», sans exercer un contrôle suffisant sur les actions du gouvernement. Il estime que l’institution doit se réinventer et assumer pleinement ses missions constitutionnelles. «Il est temps que l’Assemblée nationale soulève le couvercle de la marmite gouvernementale, qui exhalait déjà des odeurs sulfureuses», a-t-il déclaré.
Une justice sélective et inéquitable
Thierno Alassane Sall dénonce également une justice à deux vitesses, où certains bénéficient d’une clémence coupable en raison de leur ralliement au nouveau régime, tandis que d’autres sont poursuivis. Il déplore que la traque des biens mal acquis se solde souvent par des règlements de comptes médiatiques, sans récupération effective des fonds détournés. «Tant que tous les présumés fautifs ne seront pas traités avec la même rigueur, la justice n’aura pas été exercée», affirme-t-il.
Thierno Alassane Sall appelle à une réforme profonde des institutions de contrôle et à une justice impartiale pour rétablir la confiance des citoyens. Il met en garde contre les risques de répéter les erreurs des précédentes alternances politiques, où les promesses de transparence et de rigueur n’ont pas été tenues. «Cette fois encore, avec les mises en accusation sélectives, on est mal parti», prévient-il.
Pour finir, le député espère que ce rapport de la Cour des comptes ne servira pas seulement de faire-valoir au nouvel exécutif, mais qu’il marquera le début d’un véritable changement dans la gouvernance des finances publiques au Sénégal.
Sidy Djimby NDAO