Rien ne sera plus comme avant. Du moins c’est ce que la Maison Blanche a fait savoir à travers le document dénommé «US Strategy toward Sub-Saharan Africa» (La stratégie américaine en Afrique subsaharienne) publié lundi par le «White House». L’Administration Biden y décline les priorités dans sa relation avec les pays africains, notamment ceux au sud du Sahara comme le Sénégal. Les États-Unis poursuivront en Afrique subsaharienne quatre objectifs, qui se résument endémocratie et Etat de droit ;relance de l’économie post pandémie ; défense et sécurité ; ainsi que la promotion de sociétés africaines plus ouvertes.
En l’espace d’une semaine, la diplomatie américaine a envoyé ses plus prestigieux représentants en Afrique pour des tournées diplomatiques très stratégiques. La plus récente est celle du secrétaire d’Etat Antony Blinken, dont la visite qui est en cours avait été précédée par celle de l’Ambassadrice des Us à l’Onu, Lynda T Greenfield, la semaine dernière. Mais quelle relation ces mouvements de délégations diplomatiques ont-ils avec la publication,lundi,du document d’une vingtaine de pages intitulé «La stratégieaméricaine pour l’Afrique Subsaharienne » ?Les grandes lignes dudit document nous en font savoir un peu plus puisqu’émanant de la Maison Blanche, qui en quelque sortedéfinit les priorités aux différents départements et autres agences fédérales de l’Administration Biden.
Renforcementde la lutte contre L’Etat islamique, Al-Qaïda en Afrique et surveillance du groupe Wagner
Selon la Maison Blanche, les conflits armés et les crises humanitaires au Cameroun, en République démocratique du Congo, en Éthiopie, au Mozambique, au Nigeria, en Somalie et dans tout le Sahel empêchent les pays d'Afrique subsaharienne de soutenir les priorités mondiales communes. En plus de ces blocages, les Américains rappellent que ces conflits nécessitent le financement de multiples missions de maintien de la paix et d'aide humanitaire. De plus, le document souligne que la fragilité qui en résulte offre un terrain fertile à l'expansion des activités terroristes. Car, selon la Maison Blanche, l'Etat islamique et Al-Qaïda maintiennent une présence dans de nombreux pays africains, menant des attaques qui ont tué des milliers de personnes et constituant une menace pour les personnes et les intérêts américains.
Mise en évidence des «risques d'activités négatives de la Chine et de la Russie»
C’est pourquoi, conformément à la stratégie de défense nationale 2022, le Départementaméricain de laDéfensese dit prêt à s'engager avec des partenaires africains pour exposer et mettre en évidence les risques d'activités négatives de la Chine et de la Russie en Afrique. «Nous tirerons parti des institutions de défense civile et élargirons la coopération en matière de défense avec des partenaires stratégiques qui partagent nos valeurs et notre volonté de favoriser la paix et la stabilité mondiales», ont-il signifié dans le «US Strategy Toward Sub-Saharan Africa». Cette nouvelle approche de l’Administration Biden en matière de défense est totalement différente de celle de son prédécesseur. En effet, pour le cas du Sénégal, le secrétaire d’Etat Mike Pompeo avait annoncé en 2019, lors de sa visite à Dakar, que les Usa comptent fermer la plupart de leurs bases militaires et retirer leurs troupes du continent. Aujourd’hui, la présence de la Russie sous le groupe Wagner, ainsi que le changement de régime aux Etats-Unis ont fait revoir les priorités américaines en termes de défense sur le continent.
Priorité sur la lutte pour le droit des personnes Lgbt, et contre les gouvernants qui tentent de modifier illégalement des constitutions ou de voler des élections
Les États-Unis se disent prêts à soutenir les pays africains à tirer parti de manière plus transparente de leurs ressources naturelles, y compris les ressources énergétiques et les minéraux essentiels, pour le développement durable tout en aidant à renforcer les chaînes d'approvisionnement diversifiées, ouvertes et prévisibles. En outre, les États-Unis travailleront en étroite collaboration avec des partenaires africains et multilatéraux à lutter contre les moteurs de l'insécurité alimentaire et stimuler la production alimentaire, afin d'atténuer le risque de malnutrition et de famine qui, selon les estimations de l'Onu, touche près de 800 millions d'Africains. «Je suis fière d'annoncer près de 150 millions de dollars de nouveaux financements humanitaires et d'aide au développement, en approbation du Congrès (américain), pour l'Afrique»,a déclaré vendredi dernier Linda Thomas Greenfield, en visite au Ghana. Toutefois, l’Administration américaine pense que la priorité est aussi de mettre davantage l'accent sur l'Etat de droit, la justice, en soutenant des systèmes judiciaires indépendants qui servent de rempart contre le recul démocratique, «notamment en contraignant les dirigeants qui tentent de détourner des fonds, de modifier illégalement des constitutions ou de voler des élections», a souligné le document.
D’autres thèmes ont aussi été développés dans le document, comme le soutien au journalisme d’investigation ou le droit des personnes Lgbt.
Ahmadou B.C. KANE
(Correspondant permanent à New York)