SEANCE D’INFORMATION SUR LA PROPOSITION DE LOI INTERPRETATIVE DE LA LOI D’AMNISTIE : Amadou Ba dénonce les manipulations et reprécise sa pensée




 
Les députés de Pastef, après un séminaire sur la proposition de loi interpretative, ont organisé une conférence de presse hier pour s’expliquer sur les véritables raisons qui sous-tendent cette initiative parlementaire. Amadou Ba, l’auteur de ladite proposition de loi, a mis en garde le peuple contre les manipulations des opposants et autres commentateurs qui tentent de semer le doute dans la tête des populations. Elle cherche simplement à faire la part des chose entre le droit de manifester que nous confère la Constitution et le «  droit de   tuer » que certains se sont arrogé durant les événements de mars 2021 et mars 2024.
 
C’est le president du groupe parlementaire Pastef les Patriotes qui a ouvert la séance d’explication des députés de la majorité concernant la proposition de loi interpretative de la loi d’amnistie. Ayib Daffé a tenu, en guise  d’introduction, à lever les équivoques sur le vrai sens d’une proposition de loi interpretative que certains « opposants et commentateurs » définissent comme une abrogation partielle de la loi d’amnistie. M. Daffé précise par ailleurs que cette conférence de presse n’a pas pour but de se justifier, mais plutôt d’informer les populations sur la portée de cette proposition de loi. «Nous n’agissons que dans l’intérêt du peuple alors personne ne peut nous menacer ou nous faire chanter, ou encore nous intimider», prévient-il.
 
«Nous sommes relativement à l’aise avec l’abrogation mais…»
 
Amadou Ba fait savoir pour sa part qu’il y a ceux qui sont de bonne foi et qui ne comprennent pas réellement la proposition de loi et ceux qui la  comprennent bien, mais qui ont choisi de semer le doute dans la tête des Sénégalais avec leurs manipulations. «  Le Senegal a vécu des atrocité dont nous tous sommes témoins entre 2021 et  2024. Ces faits ne peuvent être effacés d’un trait de plume, comme on a voulu le faire avec cette loi d’amnistie. L’ancien régime, après avoir essayé par tous les moyens de nuire à Pastef, en vain, s’est résolu à créer une loi d’amnistie pour couvrir ses arrières », a déclaré l’auteur de la proposition de loi. Amadou Ba de rappeler que lorsque la loi d’amnistie a été présentée aux députés de la XIVème législature, ceux de Pastef ont spécifiquement demandé si les actes de torture et les crimes de sang sont pris en compte par la loi d’amnistie ; et Aïssata Tall Sall, qui défendait ladite loi, avait répondu par la négative. «  Néanmoins, lors de la plénière, on s’est rendu compte que le texte ne faisait aucune distinction. Alors que nous, notre position depuis le début, c’est que les torturer et crimes de sang ne doivent pas en faire partie », souligne Amadou Ba, qui pense qu’il faut impérativement que ceux qui ont tiré sur les victimes paient leur crimes, mais qu’ils identifient surtout leurs commanditaires.
A l’en croire, on ne peut simplement pas absoudre tous ces crimes et tortures, parce que le Senegal a signé des conventions internationales qui ne lui permettent pas d’amnistier des actes de torture et les atteintes graves aux droits fondamentaux de l’homme. « Je rappelle que les victimes de tortures et les familles qui ont perdu un membre dans ces manifestations peuvent saisir les juridictions internationales. Si ces derniers saisissent la Cedeao, celle-ci va condamner le Sénégal avec une forte amende. Il y va donc de l’image du Sénégal », dit-il.
 
« La Constitution nous donne le droit de manifester mais elle ne donne à personne le droit de tuer »
 
Amadou Ba  s’est aussi expliqué sur son choix de faire une proposition de loi interprétative en lieu et place d’une abrogation. « Ceux qui s’agitent ne semblent pas connaître la définition d’abroger. Une abrogation concernerait simplement ceux qui n’ont pas été encore traduits en justice ; or les militants de Pastef dont on fait allusion ont été pour la plupart jugés et condamnés pour manifestation interdite, aucun militant de Pastef n’a été poursuivi pour assassinat ou incendie volontaire. Les arrestations étaient devenues ciblées et arbitraires, c’était devenu des rafles », renseigne l’auteur de la proposition de loi, selon qui, contrairement à ce qu’on veut faire croire au peuple, si l’objectif de Pastef était de se chercher des dérogations, il aurait procédé à l’abrogation de la loi. « Nous sommes relativement à l’aise avec l’abrogation. Celui qui a soulevé le débat pensait que si on abroge la loi d’amnistie, le président de la République et le Premier ministre allaient retourner au Cap Manuel », soutient-il avant d’affirmer qu’il y a des faits qu’on peut amnistier ; cela toutes les juridictions en sont d’accord, mais la Cedeao, la Cour européenne et les Nations-Unies sont aussi toutes d’accord pour dire que l’amnistie ne peut couvrir des  assassinats, des actes de torture etc. « Alors nous avons décidé d’interpréter le texte.  Ceux qui s’agitent, de quoi ont-ils peur ?  Laissons la justice déterminer l’origine des fameuses forces occultes. C’est la Constitution qui nous donne le droit de manifester, mais elle ne donne à personne le droit de tuer. Il y a beaucoup de morts relatifs au manifestations, parce qu’il n’y a jamais eu d’enquête à ce sujet. Ils veulent nous mettre en mal avec les forces de l’ordre, alors que nous savons qu’autant nous avons le droit de manifester, autant ils ont le droit de nous empêcher de manifester parce qu’ils reçoivent des ordres ».
 
« Il faut d’abord sanctionner les coupables, réparer pour pouvoir pardonner »
 
Ce qui intéresse Amadou Ba, ce sont les commanditaires politiques d’actes délictueux. «Si l’on ne corrige pas cette loi d’amnistie, nous courons le risque d’avoir encore des morts dans les manifestations à l’avenir. Il nous faut pacifier définitivement le champ politique. Et pour y arriver, nous devons jouer cartes sur table. Nous devons savoir que si jamais on compte des morts dans des manifestations sous notre régime, nous serons poursuivis par la justice. Oui pour le pardon, mais il y a un préalable : situer les responsabilités et faire appliquer la loi. Il faut que l’on juge les coupables, il faut sanctionner, il faut aussi réparer pour enfin pardonner», soutient-il.
Selon le député, cette initiative parlementaire servira même à protéger les coupables des crimes et actes de tortures, puisque si l’amnistie les sauve au Sénégal, ils peuvent être poursuivis à l’étranger.
Ndèye Khady D. FALL
 
 
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