Le Secrétariat exécutif permanent du Syndicat unique des travailleurs de la santé et de l’action sociale (Sutsas) s’élève contre la nouvelle répartition des services de l’État, qui affaiblit, selon lui, la cohérence et l’efficacité du système sanitaire. Entre amputations de directions stratégiques, éclatement des structures régionales et chevauchements de compétences, le syndicat prévient son mécontentement et menace de passer à l’action.
Un espoir vite déçu
L’arrivée à la tête du département de la Santé d’un ministre docteur, géographe de la santé, avait suscité au sein du Sutsas un espoir légitime, celui de voir s’amorcer une réforme ambitieuse, orientée vers la prévention et la cohérence territoriale, en droite ligne des combats que le syndicat mène depuis sa création en 1976. Mais la publication du décret n°2025-1431 portant répartition des services de l’État est venue doucher ces espoirs. Loin de renforcer la gouvernance du secteur, cette nouvelle architecture est perçue par le syndicat comme une véritable déstructuration du ministère de la Santé et de l’Action sociale.
La Diem amputée de ses compétences stratégiques
L’un des points de crispation majeurs concerne la Direction des infrastructures et de la maintenance hospitalière (Diem), désormais amputée de ses prérogatives en matière d’infrastructures. Pour le Sutsas, cette décision est «impertinente» et rappelle une mesure similaire prise sous le magistère du président Abdoulaye Wade, avant d’être annulée à la suite d’une audience accordée au secrétaire général national du syndicat. «Les infrastructures hospitalières ou sanitaires ne répondent pas aux mêmes logiques que la construction d’une salle de classe», rappelle le SEP, soulignant que le suivi technique et la maintenance nécessitent une expertise spécifique. Cette spécialisation avait justifié en son temps la reconstitution de la DIEM, devenue Direction des équipements et de la maintenance (Dem). La décision actuelle constitue donc, selon le syndicat, un retour en arrière préjudiciable à la qualité de la gouvernance hospitalière.
Une action sociale vidée de sa substance
Le Sutsas relève également une perte de cohérence interne au sein du ministère. Si l’Action sociale a réintégré le giron ministériel, cette réintégration est largement «vidée de sa substance» par le départ de l’École nationale de développement sanitaire et social (Endss), qui jouait un rôle clé dans la formation des cadres et agents du secteur. Il ne subsiste désormais que l’École nationale des travailleurs sociaux spécialisés (Entss), ce qui affaiblit la dimension intégrée santé-action sociale que le Sutsas a toujours défendue. Cette désarticulation institutionnelle affaiblit, selon le syndicat, la capacité de réponse globale face aux défis sanitaires et sociaux du pays.
Des directions régionales éclatées et démunies
Autre inquiétude majeure, la scission des Directions régionales de la Santé et de l’Action sociale en deux structures distinctes. Présentée comme une réforme organisationnelle censée clarifier les missions, cette séparation risque, en réalité, d’accentuer la précarité des services sur le terrain. «Ces structures sont condamnées à fonctionner dans un dénuement total», alerte le SEP. Le syndicat rappelle que cette fragmentation intervient dans un contexte épidémiologique tendu, marqué par la progression de maladies comme la fièvre de la vallée du Rift ou la variole du singe, qui exigent une coordination forte et une réactivité territoriale maximale.
Confusion autour de l’hygiène publique
Le Sutsas pointe également le risque de chevauchement entre deux entités œuvrant dans le domaine de l’hygiène, le Service national de l’hygiène et la Direction de l’hygiène publique. Cette double structure pourrait générer des conflits de compétences et diluer les responsabilités, dans un secteur où la clarté de la chaîne décisionnelle est cruciale pour la prévention et la riposte sanitaire. Pour le Sep, «au lieu de renforcer la gouvernance territoriale, cette fragmentation ne fait qu’aggraver la précarité des services».
Revendiquer, protéger et mobiliser
Au-delà des critiques structurelles, le Sutsas affiche également une posture revendicative ferme. Le Secrétariat exécutif permanent exige le paiement immédiat des salaires des mois d’août et septembre aux agents concernés.
Le Sep met en garde : «en cas de non-paiement, un arrêt légal du travail sans préavis sera enclenché à compter du 8 octobre 2025, conformément au Code du travail». Le syndicat réclame par ailleurs le retour de l’Endss sous la tutelle du ministère de la Santé, ainsi que l’admission des infirmiers d’État ayant validé le programme de renforcement des capacités aux concours de Master, en conformité avec leur nouveau statut de la hiérarchie B1, équivalent à une licence.
Baye Modou SARR