REVELATIONS DE CHEIKHOUNA KEITA: Ce que le candidat Macky Sall avait demandé aux policiers retraités de faire pour lui en 2011



 
 
Le président du Mouvement national des policiers à la retraite du Sénégal a rendu visite au journal «Les Echos». Une occasion saisie par Cheikhouna Keïta de revenir sur le compagnonnage de leur mouvement avec le Président Macky Sall. Un compagnonnage qui date de 2011, quand le candidat à la présidentielle Macky Sall, ancien ministre de l’Intérieur, les a convoqués chez lui pour leur dire ce qu’il voulait et attendait d’eux. Candidat à la présidentielle de 2012, qu‘il a finalement remportée au second tour contre Me Wade, Macky Sall, dans sa quête de voix et de soutiens, avait fait appel aux policiers à la retraite, à travers leurs mouvement national. «Quand Macky Sall se présentait comme candidat, un jour, je sortais de chez moi, vers 11h, en 2011, quand mon téléphone a sonné. Je décroche. Il se présente : ‘’c’est monsieur Macky Sall’’. Je me suis dit même c’est quel Macky Sall ? Il me dit : ‘’c’est Macky Sall, ancien ministre de l’Intérieur, ancien président de l’Assemblée nationale. Je voudrais causer avec vous. Si vous êtes disponible, vous me trouvez à mon domicile au quartier Mermoz’’», rappelle Cheikhouna Keïta. Le patron des policiers à la retraite ira au rendez-vous, en compagnie de son collègue Gabriel Diop.
«Au moment où Marième Faye Sall ouvrait la porte, mon téléphone a sonné, c’était un haut gradé du ministère de l’Intérieur…»
Poursuivant son récit, Cheikhouna Keïta révèle que le jour de la rencontre, à peine étaient-ils entrés dans la demeure de Macky Sall, qu’un haut gradé du ministère de l’Intérieur l’a appelé pour savoir ce qu’ils faisaient là-bas. «Je vais vous dire quelque chose d’inédit. Quand je suis arrivé chez lui (Macky) et que j’ai sonné, au moment juste où sa dame Marième Faye Sall ouvrait la porte, mon portable a sonné. C’était le ministère de l’Intérieur. On m’a dit : ‘’on vient de nous signaler que vous êtes devant le portail de M. Macky Sall, qu’est-ce que vous faites là-bas ?’’ C’était un haut gradé du ministère. Je lui ai répondu qu’il nous a convoqués, que je vais aller répondre et s’il nous propose quelque chose d’intéressant, nous allons dire oui. Nous sommes entrés et on nous a reçus, en présence de Mbaye Ndiaye», explique-t-il.
«Il a demandé qu’on vote et fasse voter pour lui, qu’on lui donne des renseignements, qu’on infiltre son cortège… »
Revenant sur les discussions avec celui qui sera finalement élu Président et surtout sur ce qu’il attendait d’eux, le patron des policiers à la retraite affirme : «On a discuté pendant 3 heures et il a demandé qu’on le soutienne. Il a dit qu’il sait que notre association est importante. Il voudrait que ses membres votent pour lui et fassent voter leurs familles, ainsi que les familles de nos collègues décédés. Et au-delà de ça, il a demandé qu’on lui donne des renseignements par rapport à ce que l’Etat va faire. Par exemple, s’il n’y aura pas de fraude. Il a aussi demandé qu’on infiltre son cortège, pendant la campagne, surtout dans les zones troubles, pour le sécuriser par notre expérience de policiers. Et après le vote de 2012, il a demandé que nos éléments restent sur place pour sécuriser les bureaux, pour qu’il n’y ait pas de fraude. Et tout cela nous l’avons fait», témoigne l’ancien flic.
«On ne lui avait pas demandé de postes, mais juste qu’on applique ce que les lois et décrets nous donnent»
Après avoir écouté le candidat Macky Sall, Cheikhouna Keïta et Cie lui ont fait savoir qu’ils voulaient, en contrepartie de leur engagement à ses côtés, que Macky Sall leur fasse recouvrer leurs droits une fois élu Président. «On ne lui avait pas demandé de postes, mais qu’on nous applique ce que les lois et décrets nous donnent et qu’on a jamais eu. Par exemple, c’est la pension civile qu’on nous octroie, au lieu de la pension militaire. Les radiés qui sont là depuis des années n’ont pas droit à une pension complète, parce qu’ils n’ont pas pu cotiser pendant les 7 ans qu’ils sont restés radiés. Il y a aussi le nouveau statut, mais qui est incohérent. Nous avons demandé qu’on nous rétrocède les cités police et camps de gardes…», explique le président Keïta.
«Depuis l’audience de 2015, nous sommes à 32 mois et absolument rien n’est fait»
Alors qu’ils avaient placé beaucoup d’espoir en Macky Sall, le responsable du Mouvement national des policiers à la retraite ne cache plus sa désillusion. Surtout qu’après une audience, il y a plus de 2 ans, le chef de l’Etat avait pris des engagements fermes, mais jamais tenus depuis lors. «En nous recevant en audience, le 22 mars 2015, nous avons remis les pendules à l‘heure, en lui réitérant les mêmes doléances. Il a dit : ‘’oui, je ferai installer une commission par le ministre de l’Intérieur dans les 72h, qui comprendra le ministère de l’Economie et des Finances, le ministère des Forces armées, pour les pensions militaires et vous-mêmes, pour discuter de tout ça. Dans les 72h, un compte-rendu me sera fait, et je prendrais toutes les dispositions requises dans un délai d’un mois’’», rappelle Keïta.
Qui s’empresse d’étaler sa déception et celle des siens : «Aujourd’hui, nous sommes à 32 mois et absolument rien n’est fait. Jusqu’à présent, on ne voit rien venir. La commission en question n’a jamais été mise en place». S’agissant de l’annonce par le chef de l’Etat de 2 milliards mis dans la corbeille, les anciens policiers disent ne pas avoir vu la couleur de l’argent. «Il n’y a que 2 milliards qui ont été versés, comme il l’a annoncé. Mais ça pose problème. Ils disent que c’est versé, mais si c’est versé, on devrait pouvoir faire compléter les pensions des radiés et les indemniser. On a annoncé 2 milliards, mais on ne voit rien, c’est encore deux milliards sur le papier», regrette le patron du mouvement, très déçu.
Mbaye THIANDOUM
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