Lors du Conseil des ministres tenu hier, le Premier ministre Ousmane Sonko a fixé une feuille de route exigeante : discipline collective, transparence absolue et exécution rapide des projets structurants.
Un contexte d’héritage lourd et de ressources contraintes
Devant les ministres réunis au Palais, Ousmane Sonko est revenu sur la «situation inédite» à laquelle le Gouvernement a dû faire face dès sa formation en avril 2024. La découverte et la divulgation d’une dette cachée ont eu, a-t-il rappelé, des conséquences «fâcheuses» sur l’équilibre macroéconomique et la capacité de l’État à mobiliser des ressources. Dans un contexte où les marges budgétaires sont réduites, «il n’a pas été aisé de pourvoir aux devoirs régaliens pour assurer la continuité du fonctionnement de l’État», a expliqué le Premier ministre.
Malgré ce cadre contraignant, le Gouvernement dit avoir tenu ses obligations : sécurité, baisse des prix des denrées de première nécessité, santé publique et éducation. Des mesures d’urgence ont été engagées dans l’organisation des campagnes agricoles, la prévention des inondations et l’examen de la situation des entreprises publiques en difficulté.
Discipline collective et exemplarité exigées
Dans le prolongement des orientations du chef de l’État, Ousmane Sonko a insisté sur les principes qui doivent guider l’action gouvernementale : La cohésion dans l’application de la politique publique, la réserve et la discrétion professionnelles, la célérité et la proactivité. «Nous devons renforcer la proximité avec les populations par l’écoute active, le dialogue et la concertation», a-t-il martelé.
Le Premier ministre a fixé une ligne rouge : l’exemplarité. Chaque membre du Gouvernement doit observer et faire observer l’humilité et la rigueur dans l’exercice de ses fonctions, afin de renforcer la confiance entre les citoyens et l’État. «La boussole des interventions de chaque ministre doit porter les marqueurs de la transparence absolue», a-t-il déclaré, appelant à des comportements irréprochables face aux tentations du pouvoir.
Rationalisation et contrôle, tolérance zéro sur la gestion publique
Le Pm a rappelé l’urgence de finaliser le plan de rationalisation des structures publiques pour limiter le gaspillage et ne conserver que les entités utiles et efficaces. «Devant l’ampleur de la tâche et l’immensité des besoins dans un contexte de rareté des ressources, une stricte discipline dans leur utilisation est une exigence», a-t-il averti.
Le Premier ministre a également annoncé que les Corps de contrôle seront mobilisés pour veiller au respect des règles de rigueur. Les crédits, les avantages de fonction, le personnel et les moyens mis à disposition des ministres seront suivis de près. «Il ne peut y avoir de dérogation», a insisté Sonko.
Autre volet majeur, l’Agenda national de Transformation (Ant) et le Plan de Redressement économique et social (Pres). Pour le Premier ministre, la réussite du projet de transformation nationale repose sur «la discipline collective, la cohérence des actions et la redevabilité individuelle de chaque membre du Gouvernement».
Le Plan « Jubbanti Koom » 2025-2028, premier jalon de l’Ant, a déjà son comité de mise en œuvre, composé de quatre pôles. Sonko a demandé aux ministres de répondre «avec diligence» aux sollicitations du comité et de participer activement à ses travaux. Il attend du Gouvernement «une dynamique nouvelle» : exécution efficace des directives, appropriation des projets et rigueur accrue dans la préparation et la structuration des initiatives.
Le Premier ministre a appelé à «accorder une grande importance» aux rendez-vous économiques comme le Forum Invest in Sénégal des 7 et 8 octobre 2025. Objectif, c’est exposer la «Vitrine Sénégal» et instaurer un cadre favorable à la prospérité des entreprises. Les ministres sont invités à améliorer les relations avec le secteur privé et à rendre l’Administration «plus crédible et plus proche des préoccupations du secteur productif».
Dans ce cadre, la digitalisation et la modernisation de l’Administration publique sont élevées au rang de priorité nationale. Ports (Ndayane, Bargny Sendou, nouveau port de Dakar, Ndakhonga, Nikine, Kaolack, Ziguinchor, Saint-Louis) et infrastructures aéroportuaires doivent faire l’objet d’un suivi régulier pour en faire « des poumons durables de l’économie sénégalaise».
Sonko a également insisté sur la mise à niveau de l’Aéroport international Blaise Diagne, le redressement d’Air Sénégal et la prise en compte de la dimension environnementale dans tous les projets, notamment la protection du littoral, la lutte contre la déforestation et la restauration des sols.
Cap sur l’emploi, les filières stratégiques et le numérique
Pour booster définitivement l’économie, Ousmane Sonko a plaidé pour une forte implication du secteur privé et un suivi rigoureux de la création d’emplois. La stratégie des filières doit être mise en œuvre sans tarder, dans des secteurs à fort potentiel comme les phosphates, cuirs et peaux, coton, médicaments et numérique. Les filières en difficulté, telles que les oléagineux et la Sonacos, doivent être redressées «impérativement».
Le Premier ministre a présenté le «New Deal technologique» comme pilier essentiel pour relancer le secteur tertiaire. Il a cité la Poste nationale, l’industrie chimique et les agropoles comme leviers de l’emploi et de l’équité territoriale. Quant aux ressources minières et gazières, elles doivent faire l’objet d’une exploitation optimale pour garantir l’essor industriel.
Santé, éducation et gouvernance universitaire au cœur des priorités
Le développement du capital humain reste, selon Ousmane Sonko, une finalité essentielle des politiques publiques. La refondation du système éducatif, la gouvernance des universités et l’amélioration du système de santé figurent parmi les urgences. Les points critiques à résoudre concernent la réalisation des infrastructures et équipements. « Il convient de terminer tous les chantiers en milieu scolaire et universitaire et dans les infrastructures sanitaires», a-t-il ordonné.
Communication et transparence vis-à-vis des citoyens
Le Premier ministre a invité chaque membre du Gouvernement, en rapport avec le Secrétaire d’État chargé des Relations avec les Institutions et Porte-parole du Gouvernement, à «une prise en charge adéquate de la communication». L’objectif, informer de manière transparente les citoyens sur les actions entreprises et expliquer le sens de l’action gouvernementale.
Jeux Olympiques de la Jeunesse Dakar 2026, une priorité présidentielle
Enfin, Ousmane Sonko a abordé l’organisation des Jeux Olympiques de la Jeunesse Dakar 2026. Il a informé qu’il tiendra désormais une séance de travail bimensuelle avec l’ensemble des acteurs pour apprécier l’état d’avancement des travaux, traduisant la volonté présidentielle d’en faire une réussite nationale.
Ainsi, Ousmane Sonko a clairement fixé le cap : rigueur, discipline et résultats. Chaque ministre est sommé de se hisser «à la hauteur des exigences de sa charge » et de transformer les ambitions en «résultats tangibles». Une feuille de route qui, si elle est respectée, doit permettre de restaurer la confiance des citoyens et de relancer l’action publique.
Baye Modou SARR