Présidentielle, état de la démocratie, gestion familiale, manipulation de la justice: Wade attaque, cogne et menace Macky Sall



Wade a parlé ! Et c’est pour déverser sa bile sur Macky Sall qui, pour lui, a éliminé «les deux candidats les plus sérieux» qui pouvaient lui «faire ombrage» et le «battre». Il s’y ajoute le parrainage et le fichier électoral truqué, pour le faire passer au premier tour avec 55% à 60% des suffrages. Déroulant un tapis d’impairs, en plus de l’invalidation de la candidature de son fils, Me Wade promet de faire face, à travers un plan d’actions avant, durant et après le scrutin, que le Pds compte empêcher, à tout prix. A côté du recul démocratique instauré par Macky Sall, le patron des libéraux dénonce sa gestion qui met en avant «ses parents et ses affidés, avec une gloutonnerie financière sans précédent dans l’histoire du Sénégal». La vassalisation de la justice est également condamnée par Wade. 
 
 
 
«Nous avons décidé de nous opposer à la tenue d’une élection qui est entièrement fabriquée dans le seul but de réélire le candidat sortant, en l’espèce Macky Sall», a martelé Me Wade, pour qui, le chef de l’Etat sortant «a prouvé son mépris des règles de la démocratie, son mépris du peuple sénégalais». Poursuivant, le pape du Sopi affirme que la présidentielle du 24 février, pour laquelle Karim Wade et Khalifa Sall, qu’il qualifie de «concurrents les plus dangereux», ont été, à son avis, «ignominieusement éliminés», comme l’ont été d’autres candidats, «ne peut pas être appelé élection». Dès lors, son parti ne saurait la cautionner. «Nous ne l’accepterons pas», assène-t-il. Et d’ajouter que les Sénégalais doivent dénoncer haut et fort, et surtout «manifester leur réprobation de cette élection qui n’est qu’un instrument de confiscation du pouvoir». 
 
«Mise en place immédiate d’une Commission nationale de transition démocratique»
 
 
Convaincu que le jeu de la présidentielle du 24 février prochain est biaisé et que le pays est assis sur une poudrière, Me Wade appelle le président sortant à revoir sa copie. «Il est important pour Macky Sall d’ouvrir les yeux et de discuter avec l’opposition», dit-il. Ce qui permettrait d’avoir «une élection présidentielle soumise à des règles et pratiques qui ne rejettent pas le Sénégal au ban des nations». Ce qui, le cas échéant, sera pour Me Wade «une honte pour notre pays». Fort de cela, il souligne que son parti, le Pds, «a proposé à ses alliés du front de l’opposition, la mise en place immédiate d’une Commission nationale de transition démocratique». Cela, pour «revoir le Code électoral», et le débarrasser de «tous les ajouts de Macky Sall». Mais aussi, pour permettre la remise des cartes dont 1.500.000, selon lui, sont retenus par le ministre de l’Intérieur, pour empêcher, surtout le jeunes, de voter.  
 
 
 
«Macky Sall doit prendre conscience de son aveuglement et surmonter son entêtement»
 
Prêt à en découdre avec Macky Sall et son régime, Me Wade lui conseille d’arrêter de foncer tête baissée, avant qu’il ne se cogne la tête contre le mur, emportant le pays avec lui dans sa course folle. «Macky Sall doit prendre conscience de son aveuglement et surmonter son entêtement. Il est encore temps pour lui de se ressaisir», conseille l’ancien chef de l’Etat. Qui met en garde : «s’il s’y refuse, il endossera, devant notre peuple et devant l’histoire, une écrasante responsabilité, dont il ne pourra jamais se débarrasser ; celle d’avoir torpillé la poursuite de la marche du Sénégal vers la démocratie véritable et d’avoir anéanti l’exigence de liberté acquise de haute lutte par notre peuple». 
 
«Un programme en trois phases, qui a pour objectif de faire en sorte qu’il n’y ait pas de scrutin…»
 
Déterminé à en découdre avec Macky Sall, s’il ne change pas de fusil d’épaule, Me Wade annonce la mise en place d’un plan de lutte, pour lui tordre le bras. «Nous sommes en train de travailler sur un programme d’actions qui se déroulera en trois phases. D’ici le 23 février, actions dans la journée du 24 février, et actions au-delà du 24 février, après la proclamation des résultats», révèle-t-il. Et le pape du Sopi de souligner que ce programme d’actions en gestation sera discuté entre les partis du front (de l’opposition), et les autres partis qui voudraient bien les rejoindre dans la lutte. Se voulant plus précis, le leader libéral soutient, à propos dudit plan d’actions, que «son objectif est de faire en sorte qu’il n’y ait pas de scrutin, fondé sur la violation des règles les plus élémentaires de la démocratie». Et pour ceux qui seraient tentés de voir en cet avertissement un appel à la violence, Me Wade souligne : «Je précise que notre action sera pacifique et respectueux de la loi et des règles et de la loi. Mais qu’il soit entendu que nous exercerons pleinement nos droits sans aucune concession». En définitive, il lance la balle dans le camp du chef de l’Etat sortant. «Si Macky Sall prend des dispositions pour une élection normale, le Sénégal pourra s’offrir des élections et que le vainqueur gagne, et sous cette réserve, l’opposition est prête à définir avec Macky Sall une carte électorale qui n’est pas celle qu’il veut nous imposer». Et «si cela est nécessaire, qu’il renvoie les élections», Me Wade accepte de «discuter avec lui». 
 
 
 
«L’élection est déjà verrouillée, depuis l’élimination, par Macky Sall, des deux candidats qui pouvaient lui porter ombrage, à savoir Karim Wade et Khalifa Sall»
 
 
Me Wade et d’autant plus fondé à jeter le processus électoral à la poubelle que, pour lui, «l’élection programmée par Macky Sall est déjà verrouillée, depuis l’élimination des deux candidats qui pouvaient lui porter ombrage, à savoir Karim Wade et Khalifa Sall». Et c’est si vrai, pour lui, que certains proches du chef de l’Etat «affirment qu’il est déjà élu à 50%, voire 60%, et au premier tour». En plus d’avoir éliminé «les deux candidats les plus sérieux, qui auraient pu assurer l’alternance, c’est-à-dire le battre», en manipulant la justice, il a, souligne le patron du Pds, éliminé plusieurs autres, par le parrainage, dont la forme utilisée est unique au monde. «Il a instauré un système de parrainage pour éliminer des candidats, et il l’a annoncé, pour arriver à 5 candidats, qu’il choisit. (…). Le parrainage n’est pas une mauvaise chose. Ça existe en France, mais on demande 500 signatures d’élus. Mais Macky Sall demande une liste de plus de 60.000 parrains. Cela n’existe nulle part au monde. Je sais qu’ils sont très prompts à nier, mais qu’ils nous disent où leur système existe au monde. En plus, il est arrivé le premier (au dépôt des parrainages). Comment il a fait pour arriver avant tous ces candidats ? Il a bénéficié de trucages».
 
 
«Macky Sall a créé de graves dangers de déstabilisation du Sénégal»
 
Pour justifier sa déclaration et sa décision de rentrer au pays, Me Abdoulaye Wade explique que «de nombreux Sénégalais, de toutes conditions, de toutes opinions et de toutes convictions» lui ont fait parvenir  «des messages pressants», en ce sens. Afin qu’il aide le pays  à «sortir de la crise profonde dans laquelle il est plongé depuis». Et le secrétaire général du Pds de confirmer que «Macky Sall a créé de graves dangers de déstabilisation du Sénégal» qui, pense-t-il, risque de basculer dans la violence. Et la situation est d’autant plus grave, pour lui, que «ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire avec plus de 3000 morts, au Burundi avec plus 2000 morts, en Guinée avec 150 mots, au Togo entre 400 et 500 morts…», peut bien arriver au Sénégal. Dès lors, soutient-il, «penser que ce qui est arrivé ailleurs ne peut pas arriver au Sénégal, procède d’une touchante naïveté». Poursuivant, il rappelle que «les Sénégalais sont un peuple pacifique, mais il peut être violent, très violent». Et il en veut pour preuve, «ce qui s’est passé avec la Mauritanie (en 1989)». Avertissant qu’on ne peut pas tout faire subir aux Sénégalais, Me Wade trouve que «Macky Sall s’est trompé, en achetant des chars anti-émeutes et autres matériels, pour écraser les contestataires». A en croire Me Wade, le chef de l’Etat sortant, qui mise tout sur le bras de fer et le forcing, rame à contre-courant de ses prédécesseurs. «Les présidents Senghor et Diouf avaient adopté le principe du dialogue permanent avec l’opposition, de façon à trouver des solutions consensuelles avant l’explosion», se souvient-il. Tout en ajoutant que c’est cette souplesse de Senghor et Diouf qui a conduit, par exemple, au code consensuel qui a régi les élections au Sénégal depuis 25 ans, et qui est le code qui a permis à Macky Sall, lui-même, d’être aujourd’hui président de la République. 
 
«Macky Sall gouverne seul, avec ses parents et ses affidés, avec une gloutonnerie financière sans précédent dans l’histoire du Sénégal»
 
 
Jugeant la gouvernance de son successeur à la tête de l’Etat, Me Wade trouve que «depuis 7 ans, le pouvoir est concentré entre les mains d’un petit nombre de personnes». Pire, pour lui, «les libertés sont bafouées, en commençant par la liberté de manifestation, la liberté de réunion». Dès lors, affirme-t-il, que Macky Sall a pris «le chemin contraire» et «il gouverne seul, avec ses parents et ses affidés, avec une gloutonnerie financière sans précédent dans l’histoire du Sénégal». Reprochant au président sortant d’avoir placé ses parents aux postes que les Sénégalais appellent les «mangeoires». Wade cite le cas de la Caisse des dépôts et consignation, qu’il a créée et qui avait réuni 56 milliards de F Cfa, au moment où il quittait le pouvoir. Une caisse qui, aujourd’hui, note-t-il, est confiée au «frère utérin» de Macky Sall. Son frère Aliou Sall qui, rappelle-t-il, «s’était illustré dans le pétrole». Poursuivant, Me Wade affirme que «les détournements de deniers sous Macky Sall nous ont privé d’énormes possibilités d’élargir et d’améliorer notre système éducatif». 
 
Macky Sall, «les juges couchés» et la «justice instrumentalisée et verrouillée»
 
Convaincu que Macky Sall a «tourné le dos» à tous les principes démocratiques et a plongé le pays dans un chaos économique et social, son prédécesseur déplore également la manière dont il a phagocyté la justice. «Macky Sall a modifié profondément la magistrature, de façon à avoir des juges à sa dévotion. Ce qu’on appelle, chez nous, les juges couchés, pour mettre en œuvre, sans état d’âme, une justice instrumentalisée et verrouillée», dénonce Me Wade.
 
Mbaye THIANDOUM
 
 
 

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