PASTORALISME AU SENEGAL : Stabilité relative et des vulnérabilités à surveiller




 
 
 
Le bulletin de surveillance pastorale n°40, couvrant la période d’avril à mai 2025, vient d’être publié par Action contre la faim (Acf), en collaboration avec le Réseau Billital Maroobé (Rbm) et le Secrétariat exécutif du Conseil national de sécurité alimentaire (Se-Cnsa). Ce rapport met en lumière une situation globalement stable dans les zones agropastorales du pays, mais révèle également des poches de vulnérabilité qui appellent à la vigilance.
 
 
 
 Une couverture végétale correcte, mais des déficits préoccupants au nord
 
 
 
D’une manière générale, la couverture végétale se maintient à un niveau satisfaisant, avec un taux national moyen de 57%, supérieur à la moyenne historique estimée à 54%. Toutefois, en y regardant de plus près, des déficits significatifs apparaissent dans le Nord du pays, notamment dans les régions de Saint-Louis et Louga, où les taux actuels de couverture sont inférieurs aux moyennes saisonnières. Cette situation pourrait freiner l’accès aux pâturages et exacerber les mouvements de transhumance vers des zones plus favorables.
 
 Une disponibilité en eau contrastée selon les régions
 
 
En parallèle, les ressources en eau demeurent globalement satisfaisantes grâce à une utilisation massive des forages, qui représentent la principale source d’approvisionnement pour le bétail. Cependant, des disparités existent. Certaines localités, comme Galoya (Saint-Louis) ou Bondji (Tambacounda) font état d’une insuffisance notable. À l’inverse, des excédents en eau de surface sont observés dans des départements comme Linguère, Matam ou encore Tambacounda, grâce à des conditions hydrologiques plus favorables.
 
 
 Un embonpoint inégal des animaux selon les zones
 
 
 
Concernant la condition physique des animaux, le rapport souligne que l’embonpoint des petits et gros ruminants est globalement passable à bon. Néanmoins, plusieurs zones, notamment à Louga et Saint-Louis, rapportent un état médiocre à critique, traduisant un stress alimentaire qui pourrait s’accentuer si la situation pastorale ne s’améliore pas. Cette tendance est particulièrement inquiétante à l’approche de la saison des pluies.
 
 Santé animale : peu de maladies, mais des cas localisés préoccupants
 
 
 
Du point de vue sanitaire, peu de maladies animales ont été signalées au niveau national. Toutefois, des cas de distomatose et de peste des petits ruminants ont été relevés à Ndiayagal (Saint-Louis) et Kothiary (Tambacounda). Par ailleurs, des mortalités liées aux maladies ou à des accidents ont été enregistrées dans plusieurs localités, ce qui justifie un renforcement de la surveillance zoo-sanitaire, notamment dans les zones de forte concentration du bétail.
 
 
 Vols de bétail : un fléau récurrent dans toutes les régions
 
 
 
En matière de sécurité, les vols de bétail continuent de sévir dans l’ensemble du pays. Toutes les régions suivies sont concernées, avec des cas particulièrement alarmants dans les régions de Louga, Tambacounda et Kaffrine. À Darou Mouhty, par exemple, près de 80 petits ruminants et 8 bœufs ont été volés. Cette insécurité persistante fragilise considérablement les moyens de subsistance des éleveurs.
 
 
 
 Marché du bétail et des céréales : des prix à la hausse et variables selon les produits
 
 
 
Sur le plan économique, les prix des animaux de bétail évoluent de manière contrastée. Tandis que le prix des caprins mâles enregistre une légère baisse de 3%, le bovin mâle connaît une hausse marquée de 12%, atteignant une moyenne nationale de 475.000 F Cfa, et jusqu’à 487.500 F Cfa à Louga. En revanche, les prix des bovins femelles baissent de 5%, notamment à Kaffrine.
Quant aux céréales, le riz reste la céréale la plus onéreuse, avec un prix moyen de 402 F Cfa/kg, soit une hausse de 16% par rapport à la moyenne saisonnière. Le mil demeure stable, tandis que le sorgho affiche une baisse significative, mais des variations importantes persistent selon les régions.
 
 
 
 Perspectives : vers une concentration accrue des troupeaux dans le Sud
 
 
 
À mesure que l’hivernage s’installe, les ressources pastorales devraient diminuer au nord, entraînant une poursuite des mouvements de transhumance vers le Centre et le Sud du pays. Cette dynamique pourrait accentuer la pression sur les ressources locales, compromettre la cohabitation pacifique entre éleveurs et agriculteurs, et détériorer davantage l’état corporel du bétail. Une hausse des prix des ovins mâles est également attendue, ainsi que des pénuries localisées d’aliments pour bétails.
 
 Une stabilité fragile à consolider
 
 
 
En somme, le bulletin met en évidence une situation relativement stable, mais marquée par des disparités régionales importantes, des menaces sécuritaires récurrentes et une pression croissante sur les ressources. Pour éviter une dégradation à l’approche de la saison humide, une coordination renforcée entre autorités, Ong, communautés locales et services techniques est indispensable.
 
Samba THIAM
 
 
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