PAPE GORGUI TOURE, INGENIEUR EN TELECOMMUNICATIONS: «La survie des opérateurs est menacée par la restructuration du marché»



 
 
Le secteur des télécoms a connu ces dernières années des avancées marquantes, avec l’adoption par les consommateurs des nouvelles applications comme Skype, Viber, Facebook, WhatsApp et autres, au détriment des applications traditionnelles. Même si l’arrivée de ces nouvelles applications fait le bonheur des utilisateurs, le Directeur de Tactikom invite les acteurs de ce secteur à réfléchir sur la maitrise de ces nouvelles données qui favorisent une restructuration du marché et qui peuvent causer la faillite des opérateurs de télécommunications.
 
Les trois opérateurs de téléphonie au Sénégal devraient commencer à s‘inquiéter pour leur survie. Cette mise en garde est de Pape Gorgui Touré, ingénieur en télécommunications, ancien employé de la Sonatel. Dans une présentation sur l’Etat d’avancement du secteur des télécoms, M. Touré a expliqué comment la nouvelle diversification des applications peut affecter le marché, jusqu'à causer la perte de certains opérateurs. «Il y a une nouvelle diversité dans le monde des télécommunications. Ce secteur s’est enrichi d’un nombre important de nouveaux opérateurs, de nouveaux acteurs, mais aussi de nouvelles applications, les unes traditionnelles, telles que le téléphone, les Sms, les autres venant avec des nouvelles possibilités offertes par l’internet et le haut débit. Nous avons notamment Skype, Viber, Facebook, WhatsApp», explique le Directeur général de Tactikom. Pour lui, cette nouvelle diversité engage l’ensemble des acteurs, qu’ils soient opérateurs, régulateurs, autorité de régulation et même les associations de consommateurs. Ils devraient ré-envisager, chacun en ce qui le concerne, sa façon d’aborder ce secteur  et de réagir aux soubresauts de ce secteur.
«Nous sommes à une période où les applications d’internet sont en train de prendre le pas sur les applications traditionnelles, alors que les acteurs n’en ont pas une maitrise totale. Ceci provoque, dans le secteur dans son ensemble, des perturbations importantes qui vont jusqu’à remettre en question la survie de certains opérateurs. Au Sénégal, nous venons d’accorder des licences  MVNO et c’est tout une philosophie de gérer un MVNO qui est, par définition, un opérateur privé qui offre des services mobile, mais qui s’appuie sur le réseau d’un autre opérateur. L’arrivée de ces MVNO implique des responsabilités nouvelles»,  renseigne-t-il.
 
La compétition sauvage, un autre facteur qui menace la stabilité des opérateurs
 
 A l’en croire, il y a ce qu’on pourrait appeler la compétition sauvage entre les opérateurs. «A court terme, lorsqu’il y a compétition sauvage et tant que le service est disponible, le consommateur est gagnant. Mais, il arrivera un moment où les ressources générées par cette compétition sauvage ne vont plus permettre, ni le renouvellement, ni l’augmentation des capacités dont ils ont besoin pour pouvoir communiquer et le service va commencer à se dégrader. Cette compétition sauvage peut aussi avoir un autre inconvénient. Elle peut amener les opérateurs les plus fragiles à partir en faillite», dénonce Pape Gorgui Touré, avant de lancer : «quand la concurrence est ouverte et que les tarifs ne sont pas règlementés par l’Etat, il n’y a plus de véritable compétition, les prix vont monter en flèche et le consommateurs seront les premiers affectés. Pour régler ce problème, il faut forcément repenser le marché, avec les applications qui nous viennent de l’extérieur et qui ne sont maitrisées ni par les opérateurs, ni par l’autorégulateur», dit-il. Pour M. Touré, la maitrise de ces applications, la délimitation de ce qu’on appelle les marchés pertinents, en tenant compte de  ce qui se passe sur l’internet, est une urgence absolue, puisque si on ne le fait pas, la compétition va s’éteindre. «Nous avons vu des opérateurs en faillite qui sont au  nombre de 22 aux Etats-Unis, mais aussi ailleurs, du fait de cette restructuration du marché. Pour prévenir ce genre de situation, c’est maintenant qu’il faut agir, parce que ce qui est arrivé ailleurs peut aussi nous arriver et beaucoup plus rapidement qu’on ne le pense», conclut-il.
Ndeye Khady D. FALL

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