OUMAR SARR : «Je n’ai pas trahi Wade…»



Oumar Sarr est formel ! Personne ne peut l’accuser d’avoir trahi ou lâché Me Abdoulaye Wade qu’il dit être son père. Dans l’entretien qu’il nous a accordé avant-hier, tard dans la soirée, il dit être resté un an sans parler à Wade. Au sujet de Abdou Aziz Diop qui, malgré leurs relations, préfère rester au Pds plutôt que de le suivre dans l’aventure, Oumar Sarr minimise et dit que ça ne va rien changer entre eux, parce qu’il sait bien que si Aziz n’avait pas un mandat du Pds, il serait avec eux. Il a aussi évoqué l’appel de Karim Wade quand il était interné pour cause de Covid-19, celui de Macky Sall et des autres chefs de partis, majorité comme opposition.

Les Echos : Il nous revient qu’Abdoul Aziz Diop ne vous suivra pas dans votre nouvelle aventure politique. Comment appréciez-vous sa position, vu les relations fortes qui vous unissent ?

Oumar Sarr : Je n’ai pas échangé avec Aziz sur ça, mais bon…un député qui démissionne de son parti perd son mandat naturellement. Ça c’est la loi. Mais ça ne change rien entre nous. Je sais bien que s’il n’avait un mandat du Pds, il serait avec nous. Il a mandat du Pds, il est obligé de le respecter et pour cela, il n’y a pas de problèmes.

Cela ne vous gêne donc pas qu’il puisse rester en dehors de votre combat ?

Non ! Non, non…mais tout Richard-Toll, tous les militants de Richard-Toll, tous les militants du département de Dagana sont avec nous. Lui, il a un mandat du Pds qu’il est obligé de respecter. Sinon, il perd son mandat de député. A part ça, tous les militants sont avec nous.

D’après la déclaration d’annonce de création de votre parti politique, beaucoup de militants du Pds seraient sur le point de vous rejoindre. Qui sont-ils ?

Oui, il y en a beaucoup dans les capitales régionales et départementales. On fera une conférence de presse quand on va présenter les statuts et tout ça. On montrera département par département qui nous représente et on verra que dans l’écrasante majorité des départements, nous sommes très présents. Il y a d’autres qui ne sont pas du Pds, qui n’ont jamais milité au Pds et qui sont avec nous, comme on a dit dans le texte. On verra de nouvelles têtes… on est présent dans les 45 départements, ça c’est clair.

Vous envisagez le lancement quand ?

Bon, on doit se rencontrer pour voir comment finaliser les différents textes. Avec le Covid-19, c’est un peu compliqué. Il faut faire des réunions ; ensuite élargir. Je pense qu’on a une quinzaine de jours pour régler tout ça. De toute façon, l’ensemble des départements seront là. Avec la Tabaski, si on veut que tous les départements viennent, ce sera compliqué. Si on veut vraiment l’organiser, il faut prendre une semaine et l’organiser, département par département.

On parle de plus en plus des élections locales. Comment comptez-vous l’aborder ? Vous irez seul ou en coalition ?

On ne sait toujours pas quand est-ce qu’il y aura les élections locales. Personne aujourd’hui ne le sait. Il y a eu beaucoup de retards dû au fait qu’il y a le Covid-19, retards dans les audits, des retards pour les inscriptions, des retards à tous les niveaux pratiquement. C’est difficile de se projeter. Mais ce qu’on voudrait, c’est être présent dans toutes les collectivités locales. Maintenant sous quelle forme ? Je parle de manière théorique : il y a des communes où nous serons leaders, d’autres communes où nous ne serons pas leaders, mais ce qui est sûr, c’est qu’il y aura des coalitions au niveau local. La difficulté, c’est qu’on ne sait toujours pas quand est-ce qu’il y aura les élections locales. Pour bien théoriser, il faut connaître la date. Mais ce qui nous préoccupe, c’est implanter tout de suite et immédiatement le parti dans les coins les plus reculés du pays. Qu’on reconnaisse nos couleurs, qu’on reconnaisse nos emblèmes, notre bulletin…. C’est vraiment un travail que nous voulons faire d’ici les élections locales.

Certains pensent que toute cette agitation, c’est juste pour vous rapprocher de Macky Sall…

Mais pourquoi quand on crée un parti, on dit que c’est pour… Nous, on était au Pds. Personnellement, j’ai été exclu du Pds. Je suis le seul à être exclu par une personne du Pds. C’est illégal, mais nous n’avons pas voulu porter plainte. J’ai été exclu du Pds ; les autres sont de fait exclus du Pds, parce qu’ils ne sont convoqués à aucune réunion, ne sont associés à aucun fait majeur. Si on veut continuer à faire de la politique, est-ce qu’on devrait encore rester les bras croisés ou se cacher sous le lit ? Il faut bien, si on veut continuer à faire de la politique, apparaître au grand jour. Maintenant, les gens peuvent dire ce qu’ils veulent. Nous sommes au dialogue national, pas au Force Covid-19. Le Pds est au Force Covid-19, pas au dialogue national. Est-ce qu’on va dire que le Pds est proche du régime ? Ou que le Pds négocie avec le régime parce qu’il est présent ? Non ! Nous pensons que chacun doit regarder son association. A mon avis, c’est même insensé de poser cette question. Nous, nous sommes au dialogue ; eux, ils ne sont pas au dialogue. Eux, ils sont au Force Covid, nous, nous n’y sommes pas. Donc…

Avec votre projet de création de parti, reconnaissez quand même que vous avez lâché Wade ?

Non, je n’ai pas lâché Wade. Wade reste un père, mon guide politique. Par contre, on l’a dit et je le répète, je ne peux pas accepter qu’il y ait une dévolution monarchique dans le parti. C’est-à-dire que le poste de secrétaire général, le poste de chef de parti soit un poste que l’on hérite. Que ce poste aille de père en fils, ce n’est pas acceptable. C’est contre les statuts du parti. Si on l’avait dit au départ, je n’allais jamais adhérer au Pds. Il faut de la démocratie dans les partis. Dès que ça a été clair que le Pds est un héritage de père en fils, j’ai pris ma responsabilité, malgré tout le respect que je dois au Président Abdoulaye Wade. Je n’ai plus de place dans un parti comme ça.

Justement, à quand remonte votre dernière conversation avec Wade ?

Avec Wade, ça fait plus d’un an. Il ne peut pas considérer que je l’ai trahi parce qu’on ne s’est pas parlé depuis plus d’un an. On n’a pas échangé depuis plus d’un an.

Et pour ce qui est de son fils ? Il parait qu’il vous a appelé au téléphone quand vous étiez à l’hopital…

Oui, il m’a appelé. Il a fait un communiqué pour dire qu’il m’a appelé. Mais bon, combien de responsables m’ont appelé. Le Président Macky Sall m’a appelé. Tous les chefs de parti de l’opposition et de la majorité présidentielle, même les maires m’ont appelé. Je les ai tous remerciés pour cet acte-là. C’est passé ! En tout cas, je ne pense pas que ce soit un acte politique de la part de Karim Wade.

Après plus de 20 ans, vous êtes encore candidat pour la mairie de Dagana ?

On ne sait pas quand est-ce qu’il y aura les élections locales. C’est difficile de se projeter si on n’a pas la date exacte…

Pour reparler de votre parti, où en sont les démarches ? Vous avez déposé pour votre récépissé ?

Il faut un délai pour avoir les différents papiers ; mais nous sommes en train de nous préparer cela. Je pense que nous l’aurons bientôt. Nous serons un parti légalement constitué. Nous serons un parti démocratique. Maintenant pour le nom lui-même, on va discuter encore avec tout le monde, avec nos différents membres, mais ce sera un parti qui s’inspirera vraiment des règles de la démocratie. Nous allons travailler sur le règlement, les statuts, le programme. Nous espérons que d’autres partis, des mouvements vont venir avec nous. Nous sommes en train de travailler avec beaucoup de gens. Nous pensons vraiment construire un grand parti qui va occuper sa place dans l’échiquier politique.

Madou MBODJ

LES ECHOS

Dans la même rubrique :