Pour une marche autorisée, le peuple est sorti en masse pour une forte mobilisation sans heurts sur les deux voies de Liberté 6. Seulement, cette procession prévue pour être silencieuse était trop bruyante pour exiger, du chef de l’Etat, l’organisation des élections et la passation de service avant le 2 avril, fin de son mandat. La libération de Sonko, Diomaye et des détenus politiques étaient aussi au menu.
La plateforme «Aar Sunu élection» a réussi une grande mobilisation, ce samedi, sur les deux voies qui mènent au rond-point Liberté 6, conjointement encadrée par la police et la gendarmerie. En plus des volontaires de la sécurité de ladite plateforme pour éviter tout débordement, un monde fou a assisté à cette procession compacte et colorée qui a pris départ à l’échangeur du rond-point Sipres. Des banderoles avec les inscriptions sur fond noir «Aar Sunu élection», «Terminus 2 avril» ont campé le décor de la première rangée. De nombreuses pancartes étaient aussi brandies par les marcheurs avec ce message «pot de départ» sur fond noir. Ainsi, la marche silencieuse annoncée s’est transformée en une marche bruyante avec des slogans, des refrains de chants accompagnés de klaxons des conducteurs de scooters qui escortaient la foule. Au terminus de la marche, près du rond-point Liberté 6, c’était l’apothéose avec des chants en l’honneur du leader de l’ex Pastef, Sonko et son candidat Diomaye, tous deux incarcérés. Déjà, à hauteur de la prison du Camp pénal, les marcheurs ont scandé : «libérez les otages politiques» pendant un moment, sous le regard indulgent des gardes pénitentiaires, avant que la procession ne reprenne son cours à la demande des responsables.
Présidentielle et passation de service avant le 2 avril
Une occasion également pour les organisateurs et autres responsables politiques et de la société civile de lancer un message au chef de l’Etat. «Je suis heureux de prendre part à cette marche. C’est un jour important pour la démocratie sénégalaise», lance Malick Gakou qui espère que le président de la République va respecter la décision du Conseil Constitutionnel d’organiser les élections et de faire la passation du pouvoir avant le 2 avril. Déthié Fall a aussi abondé dans le même sens pour se féliciter de la mobilisation des Sénégalais. «A chaque fois qu’une manifestation est autorisée, les Sénégalais se mobilisent dans la paix», dit-il. L’ancien député Marème Soda Ndiaye, qui a porté le maillot de l’équipe nationale à cette occasion, a rappelé que le peuple sénégalais est un peuple de paix, mais qui ne peut accepter l’injustice. «A partir du 2 avril, Macky Sall ne sera plus président de la République et tous les acteurs sont unanimes sur cette question. On n’a pas besoin d’homme fort, mais d’institutions fortes. Et les Sénégalais savent combattre l’injustice dans le respect des lois», ajoute Marème Soda.
Libération de Sonko, Diomaye, Me Moussa Diop et les autres détenus politiques
Pour sa part, le candidat du Pur, Aliou Mamadou Dia, s’est désolé du temps perdu, persuadé que les élections devaient se tenir le 25 février. Après s’être réjoui de la forte mobilisation du peuple, il invite le chef de l’Etat à tenir les élections dans les meilleurs délais et de procéder à la passation de service avant le 2 avril, fin de son mandat ; pour que le Sénégal, dit-il, retrouve la paix, la sérénité et qu’on retourne au travail. En outre, il est d’avis que pour l’organisation de la présidentielle, le Président Sall n’a pas besoin de dialoguer. «Cette mobilisation est un combat pour le respect de la Constitution, pour le respect de l’Etat de droit, mais aussi pour remettre le Sénégal sur le chemin du développement», embraye le député Ayib Daffé qui estime que le peuple veut s’exprimer dans la paix.
Venu représenter Me Moussa Diop à cette mobilisation, Amadou Ba juge «historique» la décision du Conseil constitutionnel qui, à l’en croire, restaure la République. Il a aussi plaidé pour la libération de Me Moussa Diop, Sonko et Diomaye. Poursuivant, il révèle que son leader croupit de façon illégale en prison parce qu’envoyé par le procureur alors que c’est le rôle du Procureur général en sa qualité d’avocat. «C’est une procédure viciée», dit-il.
Dr Bousso, Aliou Sané, Simon …
Le Dr Abdoulaye Bousso qui a crevé l’écran durant la période de la Covid-19 a aussi participé à la marche. «Je suis fier du Sénégal. Le peuple est en train de montrer son attachement à la République et au respect de la Constitution. On salue cette décision du Conseil constitutionnel ; maintenant, il faudra que le président de la République puisse passer à la dernière étape et convoquer le corps électoral pour qu’on puisse avoir des élections et que la passation de service se déroule avant le 2 avril», prescrit Dr Bousso. Moundiaye Cissé de l’Ong 3D parle de jour symbolique et historique du peuple sénégalais pour dire non à toute manipulation de la Constitution et au report des élections. A peine élargi de prison, le coordonnateur de Y’en a marre, Aliou Sané précise que les Sénégalais n’ont plus de temps à perdre pour des dialogues. «Le président a violé la Constitution avec ceux qui le soutiennent, le Conseil constitutionnel a dit le droit. Ce qui lui reste, c’est d’organiser les élections le 3 ou le 10 mars et pour cela, dit-il, on n’a pas besoin de dialogue ; mais des concertations peut-être pour s’entendre sur la date du scrutin. Il a aussi plaidé pour la libération des détenus anonymes, ainsi que de Sonko et Diomaye. A l’en croire, ce qui a valu leur détention découle d’un «montage grossier», d’une «grosse farce».
Le rappeur Simon d’ajouter : «les Sénégalais restent debout pour défendre la démocratie. Les politiques nous prennent en otage et ce n’est pas normal. On veut travailler. Qu’on organise les élections et que chacun puisse vaquer à ses occupations », déclare le rappeur membre de Y’en a marre. Non sans demander la libération des prisonniers politiques, mais aussi l’ouverture de l’Université Cheikh Anta Diop. «Si on touche à la Constitution du pays, on touche tous les Sénégalais. C’est normal que le peuple réclame ce qui lui revient de droit. C’est nous qui allons choisir le prochain président et personne n’a le droit de changer une virgule de la Constitution. Le 2 avril, Macky Sall ne sera plus président. Donc, il doit organiser des élections et donner le pouvoir à son successeur avant cette date», martèle Docta Graff, le Graffeur sénégalais.
M. CISS