MANIGANCES OU CORRUPTIONS, CONTESTATIONS, UNE POURSUITE JUDICIAIRE ET LE CRASH DE SENGHOR : Les mots et les maux d’une élection de 24h chrono




 
 
 
Le décor de cette élection n’avait rien d’une formalité administrative. L’ambiance était électrique dès l’ouverture des travaux, entre débats houleux sur le mode de scrutin et intervention musclée des forces de l’ordre pour calmer les esprits. La salle, divisée entre partisans d’un vote global et adeptes d’un scrutin poste par poste, a été le théâtre d’un vrai bras de fer politique. A la suite du premier tour, des accusations de corruption, des contestations et des décisions décalées ont volé en éclat.
 
 
 
Processus vétuste, des bulletins photographiés…
 
 
 
Il a fallu attendre 20h ce samedi 2 août pour voir les premiers bulletins de vote tomber dans l’urne. La cause : des débats houleux sur le mode de scrutin qui ont poussé la commission électorale à se réunir encore et encore. S’en est suivi une éternité pour le décompte des bulletins ainsi que le dépouillement. Les premiers résultats n’ont été proclamés que vers 2h30 du matin. Le second tour a donc démarré 2h plus tard pour prendre fin ce dimanche matin. La commission a ainsi proclamé les résultats avec le nouveau président Abdoulaye Fall et les membres de son Comité exécutif. Mais la longueur de ce processus électoral impose la question sur la vétusté du mode de vote. L’urgence serait de moderniser en utilisant les nouvelles technologies pour limiter non seulement les déplacements des acteurs venus de contrées lointaines du pays mais aussi en gain de temps.
Mais avant, le camp de Mady-Senghor avait émis des contestations. Cela concernait des possibilités de corruption avec des photos des bulletins de vote ainsi que des vidéos. La commission électorale avait pourtant interdit formellement l’usage des téléphones portables dans l’isoloir, afin de garantir la transparence et la confidentialité du scrutin. Cependant, à la grande surprise de nombreux observateurs, certains votants ont photographié leur bulletin de vote.
Cette pratique, contraire aux règles établies, a donc naturellement soulevé des contestations du côté de Mady Touré, Augustin Senghor et leurs collaborateurs. Ils ont dénoncé une possible pression exercée sur les électeurs, voire une tentative de manipulation du processus électoral.
 
 
 
Une poursuite judiciaire annoncée par Mady Toure, Abdoulaye Fall balaie d’un revers de main…
 
 
 
Frustré par la procédure électorale, Mady Touré a pris la parole pour dénoncer vigoureusement les manigances qu’il avoue avoir lui-même vues de ses propres yeux, mais aussi avec des preuves l’appui. Il a fait une forte déclaration devant la presse avant de décamper avec son équipe.
 « En 2013, j’étais candidat, comme en 2021, et quand j’ai été vaincu, j’ai félicité Augustin Senghor. Je suis revenu en 2025 pour être candidat, mais je trouve ça scandaleux. Je n’ai pas pu continuer les élections parce qu’il y a eu corruption. Il y a eu de la corruption de la part du camp d’Abdoulaye Fall. Je lance un appel à l’État du Sénégal de prendre toutes ses responsabilités. Je suis très touché par ce qui s’est passé aujourd’hui pour mon pays, c’est très grave. Le Sénégal ne mérite pas ce genre de choses, notamment dans des élections. C’est une tache d’huile. Je suis vraiment désolé de vous le dire. Je laisse la responsabilité à la justice de trancher, elle a été saisie », a-t-il lâché. Ses accusations jettent une ombre sur la légitimité du processus, même si les résultats ont été entérinés par la Commission électorale de la Fsf.
Abdoulaye Fall, de son côté, n’a pas voulu aller loin avec cette question. « Je ne veux pas me prononcer là-dessus. On a travaillé sérieusement pendant des années pour en arriver là », a-t-il réagi d’emblée avant de poursuivre : « ce qui compte aujourd’hui, c’est la victoire. Les clubs ont parlé, et dans leur majorité, ils ont fait leur choix ». Il poursuit : « dans le football national, tout est urgent. Il y a beaucoup à faire ».
 
 
 
Augustin Senghor, le crash malheureux
 
 
 
Dans toute cette succession d’évènements, le véritable tournant, c’est la dégringolade du président sortant Augustin Senghor, qui a occupé le poste de 2009 à 2025. Malgré son palmarès étoffé – Can 2021, deux Coupes du monde consécutives, et un renforcement de l’institution – Me Senghor n’a pas résisté à l’appel du changement. Son score modeste de 92 voix sonne comme un désaveu.
La défaite de Me Augustin Senghor symbolise la fin d’un cycle. Vainqueur sur le plan sportif mais fragilisé politiquement, l’homme fort de Gorée n’a pas su convaincre pour un nouveau mandat. Son successeur hérite d’un héritage lourd, mais aussi d’un football sénégalais en pleine ascension.
Le coup d’envoi est désormais donné pour Abdoulaye Fall. Reste à voir s’il saura transformer son plébiscite en résultats concrets sur le terrain, dans les clubs, les ligues et jusqu’aux plus hautes sphères du football mondial. Une chose est sûre : le match du renouveau est lancé, mais la barre reste aussi haute.
 
 
 
 
LES ECHOS

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