MACKY SALL LORS D’UN ENTRETIEN AVEC BBC : «Si on m'avait suivi, Sonko et Karim seraient candidats… Je n'ai pas d'excuses à présenter, puisque je n'ai pas commis de faute»




 
  
 
 
 
À treize jours du terme de son mandat, le président de la République a fait le bilan de ses deux mandats à la tête du pays. Le chef de l’Etat, qui a accordé une interview à la BBC, est revenu sur les derniers évènements qui ont précédé la présidentielle du 24 mars 2024. Lors de l’entretien, le Président Sall a déclaré vouloir laisser à la postérité l'image d'un président qui s'est beaucoup déployé, qui a fait de son mieux pour développer son pays et le mettre sur la rampe de l'émergence. Macky Sall s’est également dit meurtri par les jugements de valeur qui sont faits sur sa personne. Sur la date de son départ, il a été on ne peut plus clair, réitérant sa volonté de partir le 2 avril quoi qu’il advienne. Sur l’élection présidentielle, Macky Sall a fait savoir : «si nous n'avons pas eu le temps qu'il faut pour faire la campagne, ce n'est pas de ma faute». Sur les accusations qui lui ont été faites d'avoir tenté de prolonger son mandat, Macky Sall regrette «beaucoup de procès d'intention», assurant qu’en Afrique, tout le monde aurait cinq mandats s'il le veut.
 
 
«Votre mandat prend fin dans quelques jours. Comment aimeriez-vous que l'on se souvienne de votre mandat en tant que Président du Sénégal ?». A cette question dès l’entame de l’interview, Macky Sall répond : «je voudrais laisser à la postérité l'image d'un président qui s'est beaucoup déployé, qui a fait de son mieux pour développer son pays et le mettre sur la rampe de l'émergence. Mais plus que le développement économique ou la croissance, plus que les infrastructures, l'énergie, l'éducation... ce que je veux laisser, c'est la confiance en soi que les Sénégalais peuvent avoir aujourd'hui en voyant qu'il est possible en effet de s'inscrire dans une dynamique de développement et une dynamique d'émergence».
 
 
«Je me promène toujours avec la Constitution. Je l'ai toujours en poche aux côtés de mon cœur»
 
 
Pour lui, à travers ce qu’il a pu faire sur douze années, «on peut partir avec le sentiment du devoir accompli. «Tout n'est pas fini, tout ne peut pas être fait», reconnaît-il, ajoutant qu’à propos de sa décision de reporter les élections qu'il y a beaucoup de confusion dans ce qui se passe au Sénégal. «On a dit le président a reporté les élections. Rien n'est plus faux. (…) S'il n'y avait pas eu l'Assemblée qui a voté la loi et qui me saisit, il n'y aurait pas eu de report de l'élection. Donc il est important de mentionner cela. Et tout ce qui a été fait l'a été dans le respect strict de la Constitution du Sénégal. Et vous savez, je me promène toujours avec la Constitution du Sénégal. Je l'ai toujours en poche aux côtés de mon cœur. Je l'ai toujours, pour toujours me rappeler que les actions que je dois porter en tant que président de la République doivent toujours être conformes à la Constitution», répond-t-il.
 
«En Afrique, tout le monde aurait cinq mandats s'il le veut»
 
 
Sur les accusations qui lui ont été faites d'avoir tenté de prolonger son mandat, Macky Sall regrette ‘’beaucoup de procès d'intention’’. «Moi je suis étonné. Je suis vraiment étonné et même meurtri par les jugements de valeur qui sont faits sur ma personne. Moi, si je voulais rester, je serais candidat tout simplement. En Afrique, tout le monde aurait cinq mandats s'il le veut. Si c'était ma décision, personne n'aurait pu m'empêcher, si ce n'est le peuple sénégalais qui vote, qui m'a donné deux fois sa confiance mai j'ai décidé de ne pas aller pour une prochaine élection… Nous sommes majoritaires dans ce pays. C'est ça la vérité. Donc, il ne faut pas prendre ce que les gens disent sur les réseaux sociaux ou ce qui se dit dans la presse pour en faire la réalité démocratique du Sénégal. C'est le peuple qui va élire. Et je pense objectivement que c'est le candidat de la majorité, Amadou Ba, qui présente ce meilleur profil», soutient-il.
A la question: «seriez-vous prêt à présenter des excuses pour toutes les vies humaines perdues et les dommages occasionnés ? Et pour le fait que la démocratie sénégalaise a été remise en cause ?». Réponse de Macky Sall d’un ton ferme : «non, Je n'ai pas d'excuses à faire, puisque je n'ai commis aucune faute».Il embraye : «je vous parle en tant que président de la République, je suis le responsable de ce pays jusqu'au 2 avril. Toutes les actions qui ont été posées l'ont été dans le cadre de la loi et du règlement. Aucune institution juridique ou judiciaire du Sénégal n'a remis en cause ou mis en doute la sincérité des actions qui ont été posées. Le débat est mal posé. Ce n'est pas une affaire de pardon. Il faut voir ce qui s'est passé. S'il n'y avait pas eu de contestations sur le processus des élections, sur les candidatures, il n'y aurait pas eu tout ce débat par la suite. On ne peut pas avoir un fait, on l'ignore et on parle des conséquences. C'est ça le problème», répond-il.
 
«Le 2 avril, je m'en vais, je n'entends pas rester un jour de plus»
 
 
Dans la foulée, il a réitéré son engagement de quitter le pouvoir le 2 avril prochain. «Le pays ira aux élections le dimanche s’il plaît à Dieu. Et après, le président sera élu. S'il est élu dès le 24, nous aurons la chance que je lui passe le témoin, mais s'il n'est pas élu dès le 24, moi, le 2 avril, je m'en vais, parce que c'est le terme de mon mandat et je n'entends pas rester un jour de plus comme je l'ai déjà dit», fait-il savoir.
 
 
«Si on m'avait suivi, Sonko Karim Wade ainsi que tous les autres seraient candidats»
 
 
Sur l’amnisitie, Macky Sall explique : «J'ai vu des responsables politiques qui ont prôné que le président doit être tué devant le palais et on doit sortir son corps dans la rue, comme Samuel Doe. C'est cela qu'on vient d'amnistier pour faire le pardon et la réconciliation et que le pays retrouve la paix. On ne peut pas me faire ce genre de procès. Ça, c'est ce qu'on raconte dans la rue et qu’on veut me coller à la peau. Si on m'avait suivi, il y aurait eu un processus où tous les acteurs seraient candidats. Sonko serait candidat, Karim Wade serait candidat ainsi que tous les autres. Mais on a dit le processus, il est engagé, il faut le finir. Donc si nous n'avons pas eu le temps qu'il faut pour faire la campagne, ce n'est pas de ma faute. Au besoin, on voterait à l'Assemblée de nouvelles lois qui leur permettraient de reprendre totalement leur liberté et de pouvoir compétir. Aujourd'hui, Ousmane Sonko, il fait la campagne pour son candidat, donc ce qu'il pouvait avoir pour lui-même, il peut le donner à son candidat. Donc ce n'est plus un problème pour lui».
A propos de ce qui s’est passé au Sénégal ces trois derniers mois, le président de la République assure que cela montre qu'il y a eu une campagne de désinformation qui a visé le Sénégal et qui a visé son président. «Il ne faut pas quand même qu'on nous fatigue. Le Conseil constitutionnel a parlé, la Cour suprême a parlé, l'Assemblée nationale a parlé, le président de la République a parlé. C'est ça la démocratie. Si le Sénégal n'était pas une grande démocratie, je crois qu'on n'en serait pas là. Mais dans la marche des États, il arrive des moments où il y a des crises et ce sont ces crises qui fortifient la démocratie», dit-il, ajoutant : «cette crise-là a montré que nous avons des institutions solides et plus que jamais, notre démocratie est inscrite dans le marbre».
 
 
 
Sidy Djimby NDAO avec BBC
 
 
 
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