LONASE – AFITECH – PAYMETRUST : L’Arcop invalide les procédures et ordonne une nouvelle contractualisation




 
Le Comité de règlement des différends (Crd) de l’Arcop a rendu, le 27 août 2025, une décision lourde de conséquences dans le dossier opposant la Lonase à son partenaire technologique Afitech, et impliquant également la société Paymetrust. Au cœur du litige se trouve la mise en service d’une seconde plateforme de supervision des jeux d’argent, jugée contraire aux règles de la commande publique.
 
L’affaire a débuté par une double saisine : d’un côté, Afitech, qui s’est tournée vers l’Arcop le 25 avril 2025 et, de l’autre, le collectif citoyen «Jub Jubal Jubanti», qui a déposé une plainte le 30 mai. Les deux recours portaient sur la légalité de la nouvelle plateforme confiée à Paymetrust. Afitech estimait que cette décision violait la clause d’exclusivité dont elle bénéficiait depuis un avenant signé en 2022, tandis que le collectif dénonçait surtout l’absence d’appel à concurrence, perçue comme une entorse grave aux principes de transparence.
 
 
L’affaire
 
 
Pour comprendre les enjeux, il faut revenir en arrière. Depuis décembre 2020, Afitech exploitait pour la Lonase une plateforme de centralisation et de surveillance des jeux, dans le cadre d’un contrat de dix ans. Ce partenariat avait été consolidé par deux avenants, dont le dernier lui garantissait une exclusivité. Cependant, en mars 2025, le climat s’est tendu. Sharp Vision, partenaire français d’Afitech, a menacé d’activer une clause de subrogation pour défaut de paiement. Face à ce risque, la Lonase a estimé que l’exclusivité n’était plus viable et a choisi d’ouvrir la porte à Paymetrust, concluant avec elle un contrat similaire.
 
 
Les dénonciations de Afitech, les arguments ‘’légers’’ de la Lonase
 
 
Les positions des parties sont alors devenues irréconciliables. Afitech a dénoncé une violation flagrante de ses droits contractuels, en insistant sur les dangers de cybersécurité et les risques de rupture de service que pouvait entraîner la coexistence de deux plateformes concurrentes. La Lonase, pour sa part, a soutenu qu’elle n’avait pas résilié le contrat initial, mais simplement levé une exclusivité devenue contraignante. Elle a justifié son choix en pointant les faiblesses techniques et juridiques du dispositif Afitech, notamment sa dépendance vis-à-vis de Sharp Vision. Pour appuyer sa position, elle a assimilé les conventions en cause à de simples contrats d’abonnement, qui selon elle, échappaient aux règles de passation formalisées.
 
 
 
Double irrégularité
 
 
 
L’Arcop n’a pas partagé cette lecture. Après instruction, le Crd a pris soin de distinguer deux volets. La question de l’exclusivité a été écartée, considérée comme un différend contractuel relevant exclusivement du juge. Mais concernant les conventions elles-mêmes, le Crd a jugé qu’elles répondaient bel et bien à la structuration juridique d’un partenariat public-privé ou d’une délégation de service public. Dès lors, elles auraient dû respecter toutes les procédures prévues par le Code des marchés publics et la loi de 2021 sur les PPP. L’argument avancé par la Lonase sur la notion d’«abonnement» a donc été jugé inopérant.
Cette analyse a conduit l’Arcop à constater une double irrégularité. La convention signée avec Afitech en 2020 n’avait pas reçu l’avis préalable de la Dcmp, ni fait l’objet d’un rapport d’opportunité. Quant au contrat avec Paymetrust en 2025, il n’avait donné lieu à aucun appel à la concurrence. Ces manquements, selon le Crd, constituent des vices substantiels qui entachent profondément les deux procédures.
 
 
L’Arcop exige la relance d’une nouvelle procédure conforme
 
Dans sa décision n°119/2025, le Crd a tiré les conséquences de ces constats. Il a rejeté la question de l’exclusivité comme étant hors de son champ de compétence, mais il a requalifié les deux conventions en délégations de service public. Sur cette base, il les a déclarées irrégulières et a enjoint à la Lonase de relancer une nouvelle procédure conforme dans un délai maximum de six mois, afin de préserver la continuité du service public tout en respectant les principes de transparence et de régularité.
Au-delà du cas d’espèce, cette décision éclaire les fragilités contractuelles de la Lonase et révèle une gestion hasardeuse de ses partenariats technologiques. Pour l’établissement, l’enjeu est désormais double : respecter l’injonction de l’Arcop et, en parallèle, faire face au risque judiciaire qu’Afitech pourrait engager pour défendre son exclusivité. Quant au marché de la supervision des jeux, il pourrait être complètement recomposé, ouvrant une nouvelle bataille entre opérateurs.
 
 
Samba THIAM
 

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