L'UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP ÉTOUFFE ENCORE : La colère née des bourses impayées plonge le campus dans une intifada




 
 
 
La prestigieuse université s’est embrasée dans une spirale de violence inédite. Blessures graves, fumée toxique, véhicules incendiés et bâtiments saccagés : la tension entre étudiants et forces de l’ordre a atteint son paroxysme. Au cœur du chaos, une seule exigence, le paiement immédiat de douze mois de bourses en souffrance.
 
 
Université Cheikh Anta Diop, chaudron de jets de pierres et de lacrymogènes chaque mois qu’il y a front des étudiants. C’est le cas depuis une semaine dans ce temple du savoir. L’affrontement entre étudiants et forces de l’ordre a duré plus d’une semaine et le bilan est lourd, 16 blessés dont 6 graves chez les étudiants et 4 blessés parmi les forces de l'ordre. Ces blessures s'expliqueraient, selon les témoignages dans les réseaux sociaux, par l'utilisation de lance-pierres électroniques ou pistolets à billes par les étudiants. Ce bilan enregistré mardi avait précipité le conseil de l’université à se réunir. La rencontre a autorisé le recteur à faire recours aux forces de l’ordre pour rétablir l’ordre au sein du campus. Une décision foncièrement dénoncée par les étudiants qui ont accentué l’affrontement avec le renfort d’autres étudiants observateurs.
Hier, la tension est montée d'un cran à cause de l’entrée des fourgonnettes de la police dans le campus. Un affrontement qui a duré toute la journée. Le campus est ainsi transformé en un champ de bataille. La fumée causée par les lacrymogènes a fini d’envahir l’université, polluant ainsi l’atmosphère. Face à cette situation causée par la violation des franchises universitaires, certains étudiants ont préféré quitter le campus par mesure de sécurité. C’est ainsi que «ce champ» de bataille a été occupé par les policiers et les étudiants grévistes qui ne protestent que contre le retard des bourses. 
 
 
 
Conséquence de la colère estudiantine
 
Ces affrontements ont causé d’énormes dégâts matériels, car la situation était indescriptible et le visage du campus complètement déformé. Pis, pour manifester leur colère, les étudiants ont mis à sac l’Office du baccalauréat dans la nuit du mardi 2 décembre. Les locaux ont été saccagés et des véhicules stationnés à proximité ont été incendiés causant la paralysie du service ce mercredi sous le regard médusé des usagers qui étaient obligés de rentrer. La médiation menée par deux guides religieux, n’a pas permis aux étudiants de fléchir car ils exigent sans condition le retrait immédiat des forces de l’ordre de l’enceinte universitaire.
Vu la situation indescriptible du campus, les réactions fusent de partout. Parmi elles, le professeur Bouba Diop, ancien médiateur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), intervenant sur les ondes d’iRadio, il appelle au calme et à la sérénité. « Cet engrenage de violences doit s’arrêter. Je désapprouve toutes les formes de violences qui proviennent aussi bien des étudiants ou des gens qui ne sont même pas des étudiants et des forces de l’ordre. Je préconise l’ouverture de discussions et je réitère mon appel à la retenue et au dialogue », fait-il savoir.
Un autre porteur de voix s’en mêle. Le président du Forum du justiciable, Babacar Bâ, appelle le ministre de l’Intérieur, Bamba Cissé, «à ordonner le retrait immédiat des forces de sécurité de l’espace universitaire».
A l’hémicycle, les parlementaires en séance plénière ont fait retentir leur voix. Thierno Alassane Sall a dénoncé la gestion de la crise. «La politique de répression et d'intimidation qui vise à étouffer toute contestation est vouée à l'échec. Les méthodes utilisées par les autorités pour réprimer les manifestations sont inacceptables. Le Premier ministre Ousmane Sonko manque d'empathie envers les étudiants ». S’adressant aux étudiants, il lance : «j’appelle les étudiants à recourir à des formes de lutte pacifiques pour éviter les risques de blessures et de violences, et le gouvernement à tout entreprendre pour ramener la sérénité dans les campus. La loi doit être appliquée avec pédagogie et empathie. Le choc psychologique chez de nombreux jeunes et leurs familles est immense et que les bonnes consciences qui, sous l'ancien régime, élevaient la voix dans de pareilles situations devraient s'exprimer aujourd'hui avec la même vigueur», souligne le parlementaire.
 
 
Baye Modou SARR
 
 
LES ECHOS

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