Le projet de loi n°17/2025 portant modification du Code général des impôts : nouvelle fiscalité qui va tout changer. Elle vise à renforcer la souveraineté budgétaire, réduire le déficit public et adapter la fiscalité aux nouvelles réalités économiques et sociales.
Une réforme qui cible les jeux de hasard
L’un des volets phares du projet concerne la taxation des jeux de hasard et de divertissement. L’État introduit une taxe de 20% sur les revenus des opérateurs ainsi qu’un prélèvement de 20% sur les gains versés aux joueurs. Cette mesure se justifie par la volonté de limiter l’addiction aux jeux et de protéger la jeunesse, particulièrement exposée. Toutefois, certains analystes craignent que cette double imposition n’encourage le développement de circuits parallèles et de paris informels échappant au contrôle fiscal.
Nouvelles taxes sur les transferts d’argent
Dans un pays où les transactions financières par mobile money et transferts rapides connaissent une forte croissance, le gouvernement propose une taxe de 0,5% sur les transferts d’argent, plafonnée à 2000 F Cfa par transaction. Ce prélèvement vise à mobiliser de nouvelles recettes tout en incitant à l’utilisation de canaux formels et sécurisés.
Cependant, la mesure suscite déjà des interrogations sur son impact social. Une partie importante de la population dépend des envois d’argent de la diaspora ou de petites transactions quotidiennes. Une taxation répétée, même faible, pourrait peser sur les ménages à faibles revenus et freiner la bancarisation, objectif pourtant affiché par l’exécutif.
Alcool, tabac et véhicules importés dans le viseur
Dans une logique de santé publique et de régulation de la consommation, le taux de la taxe sur les boissons alcoolisées importées est porté à 65%, tandis que celles produites localement passeront à 40%. Quant au tabac, la taxation grimpe à 100%, confirmant une volonté ferme de dissuasion.
Le texte prévoit également d’étendre la taxe spécifique appliquée aux véhicules de tourisme à l’ensemble des véhicules importés. Si cette mesure devrait accroître les recettes fiscales et limiter certaines importations massives, elle risque d’alourdir le coût d’acquisition des véhicules pour les particuliers et les petites entreprises de transport.
Un droit de timbre généralisé
Autre innovation majeure : le droit de timbre de 1% est désormais applicable à tous les paiements en espèces, sans seuil. Les dépôts bancaires et certaines transactions officielles seront frappés d’un droit forfaitaire de 200 F Cfa. L’objectif est de favoriser la traçabilité des flux financiers et de réduire la dépendance au cash. Mais cette disposition pourrait alourdir le coût de la vie pour les acteurs informels qui représentent encore une large part de l’économie nationale.
Les enjeux d’une réforme à double tranchant
Si le projet de loi répond à une nécessité budgétaire pressante et à une volonté de réguler certaines pratiques jugées nocives, il comporte aussi des risques. La taxation accrue des jeux de hasard pourrait réduire les recettes réelles si les joueurs se tournent vers des offres clandestines. La taxe sur les transferts d’argent, bien qu’encadrée et plafonnée, pourrait décourager l’utilisation des circuits formels au profit de pratiques informelles. Quant au renchérissement des produits importés et des véhicules, il pourrait affecter le pouvoir d’achat des ménages déjà fragilisés par l’inflation.
Un équilibre à trouver
Entre impératif de mobilisation des recettes et nécessité de préserver le tissu social et économique, cette réforme fiscale représente un tournant. Elle traduit une ambition claire : élargir l’assiette fiscale et responsabiliser les comportements de consommation et de transaction. Mais son succès dépendra de sa mise en œuvre, de la capacité de l’État à assurer un recouvrement efficace, et surtout de la manière dont les populations et les acteurs économiques s’approprieront ces nouvelles règles.
Samba THIAM