L’Ansd a initié un outil statistique qui est un instrument de gouvernance et de pilotage au service de la régulation des marchés publics. En effet, l'indice des coûts des bâtiments et travaux publics (Ibtp) permet de prémunir des contentieux entre les autorités contractantes et les opérateurs privés. Mais aussi et surtout, de rationaliser le budget de l’Etat qui payait, chaque année, au titre des révisions et des actualisations, des montants plus importants que le budget.
Après avoir mis en place, depuis 2015, l'Indice du coût de la construction (Icc) qui se limitait aux bâtiments à usage d'habitation, l'Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) a procédé hier à la présentation de son nouvel outil statistique l'indice des coûts des bâtiments et travaux publics (Ibtp) en collaboration avec l'Autorité de régulation de la commande publique (Arcop) lors d’un atelier de dissémination de l’Ibtp ; après deux ans de travaux. Un outil indispensable, de l’avis du Directeur général de l’Ansd, au suivi et à une correcte mise en œuvre des investissements dans le secteur des Btp. « Au-delà du suivi de la conjoncture économique, c'est un instrument de gouvernance et de pilotage au service de la régulation des marchés publics et de l'amélioration des négociations contractuelles entre les acteurs du secteur des Btp », ajoute Abdou Diouf, qui fait remarquer que l’indice est suivi et collecte tous les trois mois afin d’avoir une idée claire de l'évolution des coûts des Btp.
Lutte contre la surfacturation
Pour sa part, le Directeur général de l’Arcop, Moustapha Djitté, s’est félicité de cette «initiative structurante» qui permet, dit-il, de mettre à la disposition des acteurs de la commande publique, un référentiel permettant de gérer - de la façon la plus optimale possible - les prix qui sont appliqués à l'administration. Poursuivant, le patron de l’Arcop estime qu’avec cet outil statistique, un pas a été franchi dans la lutte contre la surfacturation qui entoure l'application des prix dans le cadre des marchés publics. A l’en croire, l’Ibtp permet, lorsque les situations économiques ont évolué, que l'opérateur ne puisse pas appliquer à l'administration un prix qui ne corresponde pas à la réalité économique. «En tant que régulateur, on est régulièrement sollicité parce que les parties n'arrivent pas à se mettre d'accord sur le prix qu'il faut mettre parce qu'il n'y avait pas d'indice, chacun avait sa propre compréhension. Maintenant, on a un indice qui est le référentiel. Chaque fois qu'il faut actualiser, c'est l'indice qui imprime la démarche qu'il faudra suivre. Quand il faut réviser également, c'est l'indice qui constitue le référentiel auquel toutes les parties doivent se conformer», explique le Directeur de l’Arcop.
Élargir l’Ibtp dans l’espace communautaire
En outre, le Directeur de l’Arcop a rappelé que le Sénégal est une référence qui inspiré d’autres pays de la sous-région en matière de procédures de la commande publique. Ainsi, avec l’Ibtp, notre pays a pris de l’avance. Une occasion d’inviter le Directeur de l’Ansd à réfléchir sur la possibilité de voir comment faire en sorte que cet indice contextualisé au Sénégal soit élargi dans le cadre d'une extension vers les autres pays de l'espace communautaire où tout est harmonisé y compris la gestion des prix.
Les surcoûts des révisions et des actualisations impactent le budget de l’Etat
Le chargé des partenariats public-privé et des achats publics durables de l’Arcop, Al Hassane Diop, a précisé que les conciliations étaient très compliquées en l’absence d’indice disponible. « Il nous arrive aussi, après avoir appliqué la formule de révision, d’aller chercher un avenant parce que la formule de révision consacrée dans le contrat n’est pas la bonne », indique M. Diop qui estime que l’Ibtp vient à son heure pour régler le problème des autorités contractantes et les opérateurs privés. « L’indice sert de planification. Ce n’est pas seulement un instrument curatif, l’indice nous permet de bien planifier nos marchés. Les budgets de l’Etat souffrent à cause de ces formule de révision et d’actualisation. Ces formules impactent le budget parce que, quand on planifie un marché, on ne prévoit pas le coût de la révision et de l’actualisation. Ce qui induit des surcoûts pour l’Etat et c’est l’une des raisons pour lesquelles, les autorités sont en train de penser à une centralisation des achats. Les montants que l’État paye chaque année au titre des révisions et des actualisations peuvent même dépasser le budget. Et aucun État ne peut supporter cela. C’est pourquoi il va falloir, à côté de ces indices, essayer de voir quelle stratégie mener au niveau de la planification pour permettre aux États de pouvoir maîtriser les dépenses budgétaires au titre de ces marchés », fait remarquer Al Hassane Diop qui préconise d’indexer un coefficient d’inflation sur le marché à chaque fois que le coût d’un marché est fixé. Ce qui permettra de régler la question de la révision et de l’actualisation ; mais aussi, à l’Etat de maîtriser son budget, en plus d’éviter les contentieux.
M. CISS