Derrière de fausses promesses d’emploi, un système bien rodé de manipulation, d’extorsion et de mise en danger de vies humaines. La Division spéciale de lutte contre la cybercriminalité tire la sonnette d’alarme.
La cybercriminalité change de visage, mais conserve un objectif immuable, exploiter la vulnérabilité des citoyens en quête de travail. Cette fois, ce sont les espoirs de centaines de jeunes en quête d’emploi qui ont servi de levier à un réseau de faux recrutements en ligne, récemment démantelé par la Division spéciale de lutte contre la cybercriminalité (Dsc). À l’issue d’une enquête minutieuse déclenchée par une plainte citoyenne, les limiers de la Dsc ont procédé à l’interpellation d’un individu présenté comme l’un des cerveaux d’un système aux méthodes jugées particulièrement inquiétantes, mêlant usurpation d’identité, escroquerie numérique et risques graves pour l’intégrité physique des victimes.
Le mode opératoire des mis en cause révèle un degré élevé de sophistication. Se faisant passer pour des responsables des ressources humaines ou des dirigeants d’entreprises bien connues, les suspects entraient en contact avec des demandeurs d’emploi via des appels téléphoniques ou des plateformes professionnelles telles que LinkedIn. Une fois la confiance établie, de fausses offres d’emploi attractives étaient proposées, assorties d’entretiens d’embauche. Certains rendez-vous étaient programmés dans des zones isolées, parfois à la périphérie de grandes agglomérations, faisant planer de sérieux soupçons de tentatives d’escroquerie aggravée, voire de kidnapping.
L’affaire a pris une tournure décisive grâce à la vigilance du responsable d’une plateforme d’aide à l’emploi. Contacté par de prétendus recruteurs se réclamant d’une clinique, il avait transmis les Cv de deux jeunes femmes. Mais la fixation d’entretiens physiques dans une zone excentrée et peu sécurisée, en périphérie de Kaolack, a éveillé ses soupçons. La supercherie rapidement démasquée, les malfaiteurs ont changé de tactique. Fini les rendez-vous physiques : place aux entretiens en ligne, utilisés comme écran pour extorquer de l’argent ou collecter des données personnelles sensibles.
Des victimes ciblées, majoritairement des femmes
Les investigations menées par la Dsc ont mis en lumière l’existence de plusieurs profils fictifs soigneusement élaborés, usurpant l’identité de cadres RH et de dirigeants d’entreprises. Les victimes, pour la plupart des femmes, étaient appâtées par des promesses d’embauche avant d’être poussées à transmettre des documents confidentiels : attestations de travail, certificats médicaux, copies de permis de conduire, voire des informations bancaires.
À ce stade de l’enquête, plus d’une dizaine de victimes ont été formellement identifiées. Le préjudice financier provisoire dépasse déjà le million de francs Cfa, un montant appelé à augmenter au fil des révélations.
Le principal suspect interpellé a été déféré devant le parquet. L’enquête se poursuit afin d’identifier d’éventuels complices et de remonter l’ensemble de la chaîne criminelle. À travers cette opération, la Dsc réaffirme sa détermination à protéger les citoyens contre les nouvelles formes de criminalité numérique, de plus en plus insidieuses et dangereuses.
Baye Modou SARR