Les joueurs de l’équipe nationale ont une tâche difficile à la Can : celle de défendre leur place de premier d'Afrique, selon le classement Fifa sous la houlette du coach national Aliou Cissé. Or, un maillon de cette belle chaîne préparatoire risque de faire défaut : l’absence du coach mental. Le coaching mental est considéré par les professionnels comme l'un des 4 piliers de la performance. Comment expliquer le coaching mental à nos acteurs sénégalais ? La session organisée en octobre dernier par le Syndicat des entraîneurs de football du Sénégal (Sefs) avec le Dr Zakaria Ben Farés Benomar contribue-t-elle à hisser le football sénégalais au rang de leader en Afrique ? Ce dernier nous donne des réponses.
Les Echos : Qui est Dr Zakaria Farés Benomar ?
Dr Farés : Je suis coach mental, consultant et formateur. Je suis le Directeur général du Centre de recherche en leadership, coaching et management «Venus». Je suis aussi le président de l’Académie marocaine de coaching mental et sportif. J’ai une formation de management en développement personnel, communication et en ressources humaines.
Qu'est-ce que le coaching mental ?
Le coaching mental permet à un ou plusieurs joueurs de progresser et de s’exprimer pleinement en compétition en mettant à leur disposition différents moyens et techniques nécessaires à la réalisation de performance sportive. Le coaching mental est organisé et hiérarchisé par des procédures d’entraînement mental qui visent au développement et à la bonne utilisation des qualités mentales du sportif. Cet accompagnement doit subsister de façon permanente aux différents stades de l’entraînement mental et sportif et se mettre au service des aspects technico-tactiques prioritaires de l’activité pratiquée.
Vous avez donné une session de formation récemment à des coachs sénégalais. Quelle analyse en faites-vous ?
Tout d'abord, je suis heureux et honoré d’avoir contribué, en collaboration avec le Syndicat des entraîneurs de football du Sénégal, à l’organisation de cette session de sensibilisation de 3 jours en octobre dernier au profit de 67 entraineurs nationaux. Bien que la durée soit insuffisante, cette première rencontre, qui je l'espère ne sera pas des moindres, fut une opportunité de se familiariser avec le coaching mental et ce, à travers divers concepts et ateliers pratiques.
Ils ne sont cependant pas encore spécialisés dans le coaching mental, que faut-il faire pour que ce soit un métier à part entière au Sénégal ?
En me basant sur ma riche expérience sportive en tant que coach mental, le seul moyen de faire progresser le football sénégalais est d’étoffer le staff technique par des coachs mentaux formés et expérimentés en la matière. Pour ce faire, la fédération doit encourager cette initiative et en faire un projet phare et primordial de rayonnement permanent du football sénégalais.
Sur le plan sportif comment peut-on aider un joueur blessé, à quelques jours d'une grande compétition comme une Can, à se reprendre mentalement ?
Le coaching mental est un accélérateur de performance.Il aide à la construction d’outils en lien avec le mental du joueur. Pour un joueur blessé, l’accompagnement mental est capital dans le processus de réathlétisation et la reprise de l'entraînement, voire la compétition. La meilleure façon d’opérer est d’aider le blessé à dépasser le choc mental provoqué par l'incident. Pour cela, le coach mental se doit de fixer de nouveaux objectifs et de guider son sujet vers une reprise saine de la compétition.
Pour un sportif qui est souvent sur la touche et qui est quand même sélectionné, comment peut-on l'aider mentalement pour qu'il soit dans l'ambiance d'un bon état d'esprit ?
Dans cette situation précise, disons que les méthodes régulièrement employées gravitent souvent autour de l’imagerie mentale, de la PNL (programmation neuro linguistique), de la relaxation ou encore de la sophrologie. L’essentiel du travail est basé sur l’échange, l’entretien et le débriefing de situations vécues pour garder le joueur en activité permanente et prêt au grand saut.
Enfin, que peut apporter le coaching mental dans un groupe qui enregistre l’absence de certains de ses cadres?
Tout d’abord, un coach mental a pour but premier de permettre à l'ensemble de l'équipe de se sentir bien sur le terrain. On le sait, le plaisir est la principale clé du succès... Le plaisir est une source de motivation et d'expression du potentiel permettant au corps de libérer de la dopamine dans le cerveau et de se déployer de manière adéquate. Ainsi, tout ce processus permet une expression de la technique sans blocage par des contractions musculaires.
L'équipe dans son ensemble est sujette à des dynamiques complexes, et dont les principaux enjeux sont d’une part, la cohésion dans l'équipe qui reste paradoxalement problématique en football. En effet, il arrive que les enjeux individuels prennent trop de place, ce qui délétère la performance de l'équipe comme des joueurs. A noter que la stabilité de l’équipe favorise un sentiment de sécurité et de familiarité à l'ensemble de ses joueurs qui a immanquablement un impact positif sur la cohésion. D’autre part, il s'agit pour le groupe d’être capable de se centrer sur ses objectifs communs sans se laisser distraire par des évènements ou relations extérieures au jeu. Enfin, la communication positive et efficace au sein du groupe participe à une ambiance et convivialité au sein de l’équipe et freine les périodes de crise tant au niveau du groupe qu’à celui des joueurs individuellement.
Pour conclure, le coaching mental demeure inéluctablement l'un des piliers de la cohésion d'équipe qui favorise une collaboration positive et efficace entre tous les acteurs du club.