DOUBLE MEURTRE DE MEDINATOUL SALAM: 7 ans après, enfin la vérité



 
7 ans après les faits, le procès des Thiantacounes va enfin avoir lieu, même si ce sera en l’absence de Cheikh Béthio Thioune, «malade» et actuellement en France. Quoi qu’il en soit, les supposés complices du guide religieux vont pouvoir être fixés sur leur sort. Retour sur une affaire gravissime qui avait fait couler beaucoup d’encre et de salive et dans laquelle est impliqué un guide religieux jusque-là presque intouchable.
 
L’attente a été longue, très longue même, surtout pour les autres Thiantacounes qui sont toujours en détention préventive mais le grand jour est enfin arrivé. A partir d’aujourd’hui, des coins du voile de ce mystère qui a jusque-là entouré la mort de Ababacar Diagne et Bara Sow vont être soulevés. Ce mystère va enfin être élucidé après près de 7 ans d’attente. 
 
Béthio Thioune, «malade» et hospitalisé, sera absent au procès
 
Le seul hic dans cette affaire, c’est que le procès risque de se tenir hors la présence de Cheikh Béthio Thioune qui ne sera pas à l’audience, puisqu’actuellement hospitalisé en France. Le 18 avril dernier, ses conseils, précisément Me Moustapha Dieng, a déposé un dossier médical qui atteste de la santé critique du guide des Thiantacounes. C’est dire que cette audience pourrait être renvoyée. Mais tout dépend du juge qui peut décider souverainement de renvoyer l’affaire ou de juger le guide religieux par contumace. En tout cas, plusieurs avocats de Cheikh Béthio Thioune sont favorables à la tenue du procès dès aujourd’hui, au motif qu’ils ne veulent pas porter préjudice aux autres Thiantacounes qui sont encore en prison. 
 
22 avril 2012-23 avril 2019
 
Le choix du 23 avril n’est peut-être pas le fruit du hasard. Car, cette affaire dite de Médinatoul Salam remonte à ce mois d’avril. Le 24 avril 2012, précisément, Cheikh Béthio Thioune a été interpellé à son domicile à Mbour, par le Procureur de Thiès de l’époque, Ibrahima Ndoye. Un coup de théâtre pour tous ceux qui pensaient que le guide religieux, qui avait fait rêver l’ancien président de la République Abdoulaye Wade d’une belle victoire à la présidentielle, avec «ses» 4 millions de talibés (disciples),  n’allait jamais être inquiété par la justice. La veille, Ababacar Diagne et Bara Sow, qui étaient aussi ses disciples, ont été tués et enterrés à Médinatoul Salam où habitait le guide religieux ; leurs corps ont été traînés à 1,5 kilomètre pour être enterrés. L’enquête révèle qu’il avait une prise de gueule la veille avec «ses» disciples et les gendarmes soupçonnent le guide religieux d’avoir commandité la mort de ces deux individus qui ont été tués par armes à feu. Les contestations de Cheikh Béthio Thioune ont été sans succès. Onze disciples ont été interpellés, en même temps, avant que d’autres ne suivent. Le guide religieux jure devant le juge n’avoir jamais donné d’instruction pour tuer les deux garçons et mieux, les coups de feu supposés tirés à partir de son domicile, il témoigne ne les avoir pas entendus. Le juge se déplace avec les avocats pour une reconstitution, accompagnés des gendarmes. L’enquête révèlera, selon ses conseils, qu’il avait raison et qu’il ne pouvait pas entendre les coups de feu à partir de sa maison. L’expertise faite sur le sang découvert dans les véhicules 4x4 appartenant à Cheikh Béthio Thioune a révélé qu’il s’agit de sang d’animaux. En fait, les corps ont été transportés à bord d’une charrette. Cette charrette a été d’ailleurs mise sous scellés. 
 
Cheikh Béthio Thioune se déplaçait en France sous bonne escorte
 
Dix mois après son arrestation, le guide des Thiantacounes va bénéficier de liberté provisoire, mais il sera placé sous contrôle judiciaire. Lorsqu’il se déplace en France, pour des soins, il s’y rend sous bonne escorte, dans un premier temps, avant que le juge ne lâche du lest. Du côté des Thiantacounes, trois autres vont bénéficier de liberté provisoire. En 2013, le juge d’instruction boucle son enquête, renvoyant Cheikh Béthio Thioune et les Thiantacounes devant une juridiction criminelle. Mais, depuis 2013, le Parquet n’avait pas enrôlé le dossier. Les présumés complices du guide religieux ont tenté par plusieurs moyens de tordre le bras au Procureur pour la tenue du procès ; certains ont tenté de se donner la mort, d’autres ont observé une grève de la faim. Il aura fallu 6 ans pour que le Parquet cède et accède à leur demande. 
 
Alassane DRAME

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