Comme la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, la dernière sortie de l’ancien ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, sur la disparition de Fulbert Sambou et de Didier Badji, a fait réagir leurs familles. Ils exigent la lumière aux nouvelles autorités et demandent la comparution de IMF dont, selon leurs avis, la déclaration à la télévision est révélatrice.
L’ancien ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, a réveillé la colère des familles des disparus Didier Badji et Fulbert Sambou. Accompagné et assisté par Amnesty International, le comité de gestion de crise des ressortissants des îles du Bliss Casa de la Casamance, qui réclame la lumière sur la disparition de leurs parents, demande la comparution de l’ancien ministre de la Justice. «Qui est-ce qui s’est réellement passé ? Qui est-ce qu’ils ont fait à Didier et à Fulbert ?», s’interroge Vincent Sambou, ami d’enfance de Fulbert Sambou.
Pour eux, Ismaïla Madior Fall en sait beaucoup de leur disparition. «Le silence des autorités judiciaires et militaires ont plongé ces familles, même des collègues militaires dans une souffrance inouïe. Tout le monde veut savoir pourquoi cela est arrivé. Nous osons espérer que la Justice prendra toutes les dispositions nécessaires pour qu’Ismaïla Madior Fall soit entendu. Et qu’il soit dans les dispositions de se faire entendre pour éclairer la lanterne des familles», laisse entendre ce membre d’Amnesty International Sénégal.
Pour sa part, Alain Diédhiou exige la lumière sur cette affaire qui a plongé tout un village dans le désarroi et l’émoi. Il dénonce le mutisme des autorités militaires, de la gendarmerie et de la Présidence où servaient les deux hommes. «Nous ne réclamons que justice. Les interrogations que nous avons restent en l’état. Nous endurons une souffrance depuis plus d’une année. On n’a entendu ni la Dirpa, ni le Haut Commandement de la Gendarmerie, ni la Présidence en parler, parce que Didier était détaché à l’IGE qui dépend du Palais», dit-il. Qui poursuit : «depuis la disparition de nos frères, nous sommes restés sans aucune information venant de l’Etat. Ce sont des militaires en activité. Nous attendons toujours l’ouverture du procès après l’ouverture d’une information judiciaire annoncée par le procureur», indique-t-il.
Fulbert raconté par son ami
Vincent Sambou, binôme de Fulbert, raconte la journée qu’il a passée à la recherche de son frère et ami. «J’ai mal parce que je l’ai fréquenté, il a été mon témoin à la mairie et j’ai donné son prénom à mon fils. Je fais partie des gens qui sont partis voir le corps et qui ont fait des recherches. Sa femme m’a demandé où est papa comme elle avait l’habitude de l’appeler, je lui ai fait savoir que le matin, il m’avait envoyé un message pour me souhaiter bonne journée. Vers 17 heures du vendredi, un de ses collègues m’appelle pour me le demander. J’ai essayé d’appeler Didier sans succès, car son téléphone était toujours sur boîte vocale», raconte-t-il, en larmes. «C’est à 23h qu’on m’appela pour me dire qu’ils ont retrouvé les affaires de Fulbert et de Didier. Il y avait des points d’interrogation dans ma tête. Je ne comprenais pas. Le lendemain j’ai appelé son grand-frère à 5h du matin, il me demande de le joindre à Malika plage. Nous sommes partis au Cap Manuel. Quand nous sommes arrivés, j’ai senti quelque chose. On a cherché jusqu’à 19h, on n’a rien trouvé», raconte Vincent.
La femme de Didier Badji morte parce que…
Alain Diédhiou regrette dans la foulée la disparition de la femme de Didier Badji. Selon lui, la dame n’en pouvait plus de supporter la souffrance née de la disparition de son époux. «Vous savez tous que madame Didier Badji est partie parce qu’elle n’a pas pu encaisser cette souffrance. Aujourd’hui, ses enfants sont sans père, sans maman. Et tout cela à cause de cette souffrance que nous avons endurée depuis le début de cette affaire», confie-t-il.
Amnistie s’est inscrite dans la logique de les assister. Elle a commis des avocats pour accompagner les familles. Elle va continuer à accompagner les familles, elle va continuer la mobilisation et déterminer à l’avenir les moyens d’actions pour sensibiliser l’opinion et amener les nouvelles autorités à rendre justice à ces familles. «Nous fondons un espoir que les nouvelles autorités nous disent ce qui s’est passé parce que nous avons donné à l’Etat du Sénégal des enfants en service dans le renseignement et dans la gendarmerie. Des gens disparaissent et c’est l’omerta total. Nous sommes meurtris», confient-ils.
Baye Modou SARR