DÉNONCIATION ET LUTTE CONTRE LE VOL D’ÉLECTRICITÉ : Une hémorragie financière de 100 milliards que la Senelec veut stopper net




 
Chaque année, la Senelec enregistre des pertes estimées à près de 100 milliards de francs Cfa du fait des branchements clandestins et du vol d’électricité. Une situation intenable qui plombe les efforts de la société nationale dans sa quête d’une électricité fiable, accessible et à moindre coût pour tous. Lors de sa rencontre annuelle avec le Comité national de dialogue avec la clientèle (Cndc), la Senelec a tiré la sonnette d’alarme, mettant en garde contre les lourdes sanctions pénales encourues par les fraudeurs et appelant à une mobilisation générale pour combattre ce fléau.
 
Vol d’électricité, une plaie ouverte dans les comptes de la Senelec
 
La rencontre annuelle entre la Senelec et le Comité national de dialogue avec la clientèle (Cndc), tenue hier, a été l’occasion de revenir sur les défis majeurs qui freinent l’atteinte d’un accès universel à l’électricité. Si les discussions ont mis en lumière plusieurs avancées, comme la baisse des plaintes sur les coupures et les efforts de modernisation du réseau, un sujet a largement dominé les échanges, le vol d’électricité. Selon les estimations de la Senelec, ce phénomène constitue une perte sèche d’environ 100 milliards de francs Cfa chaque année, soit près de 10% de l’énergie distribuée.
Un gouffre financier qui ne cesse de se creuser au fil des années, impactant non seulement la viabilité économique de la société, mais aussi les tarifs appliqués aux clients honnêtes. Car, comme l’a souligné le secrétaire général de la Senelec, Thierno Oumar Kane, «les kilowatts volés sont, en fin de compte, payés par tous les autres consommateurs», les pertes étant répercutées dans le calcul du prix de revient.
 
Fraudeurs, des coupables au regard de la loi
 
Au-delà du préjudice économique, le vol d’électricité est désormais traité comme un crime économique équivalent à la soustraction de deniers publics. La Senelec, en collaboration avec les forces de sécurité et la justice, a mis en place un dispositif rigoureux de détection, de constatation et de répression des cas de fraude. Les fraudeurs s’exposent à des poursuites pénales pouvant mener à des condamnations fermes. «Nous utilisons tous les leviers juridiques pour que ceux qui volent de l’électricité soient traduits en justice et sanctionnés à la hauteur de leur faute», a martelé le Secrétaire général de la société.
En plus de sanctions judiciaires, des redressements financiers sont appliqués. Ces redressements comprennent le paiement rétroactif de l’électricité consommée frauduleusement, assorti de pénalités lourdes. Ce message fort, soutenu par le Cndc, vise à dissuader les fraudeurs et à protéger les clients qui respectent les règles.
 
Des marchés à haut risque
 
Autre sujet évoqué avec gravité par le Cndc, les incendies récurrents dans les marchés causés par les branchements anarchiques. Selon Mbaye Ndiaye, représentant du Cndc, ces sinistres, souvent dramatiques, trouvent leur origine dans des installations électriques sauvages. Il a ainsi plaidé pour une intervention plus systématique de la Senelec dans les marchés, avec l’installation de compteurs légaux et la suppression des branchements illicites. Il a également demandé un renforcement des mesures d’accompagnement afin d’éviter que les commerçants, souvent non assurés, ne soient laissés pour compte après les sinistres. Un appel entendu par la Senelec, qui a déjà entamé des partenariats pour sécuriser l’alimentation électrique dans plusieurs marchés stratégiques du pays.
 
L’appel à la responsabilité citoyenne
 
Face à l’ampleur des pertes, la Senelec mise aussi sur la vigilance des usagers. Chaque client est invité à devenir un agent de veille et de dénonciation, afin de signaler les branchements clandestins et les cas de vol. «Il faut que chaque citoyen comprenne qu’en laissant faire, il contribue à l’augmentation de sa propre facture», a insisté Thierno Oumar Kane.
 
 
Vers une électricité accessible et durable
 
Malgré ces obstacles, la Senelec ne perd pas de vue ses ambitions. Elle travaille, selon son secrétaire général, à la réduction durable du coût de l’électricité, notamment par l’exploitation future du gaz naturel et le recours aux énergies renouvelables. L’objectif est clair : "fournir une électricité fiable, partout au Sénégal, à un prix abordable". Cette mission, toutefois, ne pourra être accomplie sans la lutte résolue contre le vol, qui reste la principale menace sur la stabilité financière de la société. En ce sens, la rencontre avec le Cndc est apparue comme un moment charnière pour refonder le pacte de confiance entre la Senelec et sa clientèle, autour des valeurs de civisme, de légalité et de responsabilité collective.
 
 
Baye Modou SARR
 
 
 
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