Dans une déclaration au vitriol, le Front pour la défense de la démocratie et de la République (Fdr) a fustigé le dernier réaménagement gouvernemental, qu’il qualifie de manœuvre politicienne visant à installer un «Parti-État» sous la houlette de Pastef. L’opposition annonce une mobilisation populaire face à ce qu’elle considère comme une dérive liberticide et une menace directe pour la démocratie sénégalaise.
Le réaménagement ministériel du 6 septembre 2025 continue de susciter des vagues. Après les réactions mesurées d’une partie de la classe politique et les justifications livrées par les soutiens du régime, l’opposition regroupée au sein du Front pour la défense de la démocratie et de la République (Fdr) a choisi la voie de la fermeté.
Dans une déclaration rendue publique à Dakar le 10 septembre, la coalition a fait part de sa « profonde déception », estimant que ce remaniement n’apporte aucune réponse aux préoccupations vitales des Sénégalais. Inondations, flambée des prix, chômage, blocage de l’économie : autant de maux auxquels, selon elle, le gouvernement reste sourd.
Pour le Fdr, loin d’être un outil de relance ou de réajustement stratégique, ce réaménagement s’apparente à une simple manœuvre politicienne. «Bien au contraire, il s’est agi d’un remaniement purement politicien qui s’inscrit dans un projet désormais clairement affiché d’institutionnaliser l’État-Sonko sous l’appellation de Parti-État», accuse le texte signé par la Conférence des leaders. Un ton sans détour, qui met en avant le risque d’une «dictature» en gestation.
Le cœur des critiques se concentre sur les changements intervenus au ministère de la Justice et à l’Intérieur. Pour le front, ces deux postes stratégiques deviennent des instruments au service d’une «politique de persécution des opposants» entamée depuis plus de quinze mois. L’opposition redoute un effacement progressif des garde-fous juridiques, une remise en cause de l’indépendance de la justice et, à terme, un contrôle total des processus électoraux par un seul parti. «Un seul parti, Pastef, va pouvoir contrôler le fichier électoral, la validation des candidatures, l’organisation des élections et même le traitement des recours judiciaires», alerte la déclaration.
Le Pres est antisocial
Au-delà du champ institutionnel, le Fdr s’attaque aussi à l’orientation économique du pouvoir. Le Plan de redressement économique et social (Pres) est jugé antisocial, notamment en raison de la hausse du coût de l’énergie et de la taxation du mobile money. Ces mesures, selon l’opposition, risquent d’«étrangler durablement les ménages et tous les secteurs économiques, le secteur informel notamment». Un discours qui cherche à relier la bataille démocratique à la réalité quotidienne des Sénégalais, touchés de plein fouet par les difficultés de subsistance.
Mobilisation populaire
Face à ce qu’il qualifie de «dérive autoritaire», le Fdr ne se limite pas à la dénonciation. Il appelle à la mobilisation populaire. Des comités d’organisation unitaires doivent être installés «dans les communes et dans les villes», en lien avec «l’ensemble des forces vives». Objectif : préparer des actions de résistance, qui passeront notamment par des manifestations à Dakar dès le mois prochain. Une stratégie de confrontation directe, assumée, qui veut peser dans la rue après avoir épuisé les canaux institutionnels.
Les revendications posées par le front sont claires : retrait des mesures antisociales, création concertée d’un organe électoral indépendant, adoption d’une loi consensuelle sur les partis politiques, respect des décisions de justice, fin du harcèlement judiciaire contre opposants et journalistes, et libération immédiate des prisonniers politiques et d’opinion. Une plateforme politique qui s’apparente à un véritable contre-programme, visant à redessiner les règles du jeu démocratique.
Sidy Djimby NDAO