En attendant le message tant attendu du chef de l’Etat, Ousmane Sonko a décrypté à sa manière ce que dira Macky Sall sur la question du troisième mandat, découlant d’un processus «masqué» par un dialogue national, selon ces termes. Face aux Sénégalais, le leader des Patriotes a appelé une fois de plus la population sénégalaise à se soulever si jamais Macky Sall l’arrêtait et cette fois-ci, que ce soit le combat final. Pour lui, Macky Sall n’a aucune base légale pour l’arrêter. A la France et à la Turquie, Sonko a adressé des messages clairs.
C’est un homme déterminé et ragaillardi par les messages de soutien de ses partisans qui s’est présenté hier sur l’écran des Sénégalais. Emmuré dans un silence depuis sa mise en résidence surveillée, Ousmane Sonko, mis à part la sortie de veille de Tabaski, a brassé l’actualité sénégalaise marquée par sa condamnation et les évènements du mois de juin, sans oublier le message du chef de l’Etat sur la question du troisième mandat. Pour lui, Macky Sall a réuni au Palais, lors de l’ouverture du dialogue national, des hommes qui ont leur avenir politique derrière eux. «Vous avez tous remarqué qu’il n’y avait pas de jeunes dans le dialogue. Il n’y avait que des hommes qui ont leur avenir politique derrière eux. Raison pour laquelle ils se sont réunis bien avant le dialogue pour dérouler leur stratégie en 4 phases. D’abord il y a les réunions pour étaler leur complot, ensuite ils vont organiser un dialogue pour montrer aux gens qu’ils sont en train de discuter alors que leur seul objectif est que tous les autres puissent se présenter sauf moi», dira-t-il. «Dans le dialogue, il a été convenu que certains seraient graciés et la question du troisième mandat sera du ressort du Conseil constitutionnel», dit-il.
La troisième phase, selon Ousmane Sonko, c’est le message que va délivrer Macky Sall aux Sénégalais «pour étaler leur complot déjà ourdi et pour finir bientôt ils vont convoquer l’Assemblée nationale qui va avaliser leur deal».
Ousmane Sonko prévient les Sénégalais qu’il y a une certaine classe politique qui croit que la réalité d’hier est celle d’aujourd’hui. «Les Sénégalais ne peuvent plus être manipulés. Aujourd’hui, soit Macky Sall dit qu’il est candidat ou qu’il ne l’est pas. Si toutefois il dit qu’il est candidat, cela veut dire que leur deal sera cristallisé en acceptant la candidature des autres sauf celui de Ousmane Sonko. C’est un complot pour écarter un candidat qui semble être le mieux placé pour remporter l’élection présidentielle. Ou bien il peut dire qu’il ne sera pas candidat, cela voudrait dire qu’il va prendre conscience que le Sénégal est suivi de partout et qu’à l’international, sa candidature pose problème. Là aussi, il va isoler Ousmane Sonko et le Pastef. Voilà les calculs du dialogue national qui n’a qu’un seul objectif : que le président Ousmane Sonko ne soit pas candidat», dit-il.
«Macky Sall n’a aucune base légale pour m’arrêter»
Toujours dans les prédictions de ce qui suivra le discours de Macky Sall aujourd’hui, Sonko de révéler : «immédiatement après cela, je ne serai pas surpris qu’il déclenche une fois de plus la machine judiciaire. Si vous voyez que mon quartier est toujours barricadé, c’est qu’il attend juste que mes souteneurs prêtent le flanc pour m’arrêter. Mais, je dis aux Sénégalais que Macky Sall ne peut pas m’arrêter». Pour argumenter ses propos, il convoque l’article 341 du code pénal qui fait savoir que toute personne jugée par contumace, si jamais cette personne réapparait, la loi demande immédiatement que le premier jugement soit repris car il est nul.
Selon Ousmane Sonko, «le procès doit être repris. Le juge d’instruction a fait une ordonnance de renvoi, je suis sous contrôle judiciaire (ce qui ne peut être annulé puisque le juge d’instruction a été dessaisi du dossier), le procureur ne peut déposer un mandat de dépôt contre moi. À cette étape, seul le président du tribunal, après que la date du procès a été fixée, peut décider ou non de me retenir le temps du procès».
Sonko appelle la population à se soulever pour le combat final, s’il est arrêté
«Donc s’il annonce mon arrestation et qu’il ne me relâche pas à la minute qui suit, j’appelle la population à se lever comme vous l’aviez fait au mois de mars 2021. Cette fois-ci, nous allons terminer le combat. N’ayez crainte, car les évènements du mois de juin sont un message pour Macky Sall. Il n’a plus le courage d’engager des nervis. Aux maires reçus par Macky Sall, sachez que vous êtes en danger si vous faites face aux manifestants». Très déterminé à faire face, Ousmane Sonko menace même les juges. «Il y a 7 juges qui ont tué les Sénégalais et nous allons sortir leurs photos et leurs noms », dit-il. Et de poursuivre : «n’arrêtez pas la résistance. Continuez. Ceux qui sont morts dans ce combat vous auraient dit la même chose. J’en suis persuadé», a ensuite déclaré le leader de Pastef. Avant de faire une confession à l’endroit des disparus. «Je crois avec conviction qu’ils sont désormais sans péchés. Ce sont ceux-là qui les ont tués qui vont désormais les endosser. Ils se présenteront donc devant Dieu comme lorsqu’ils venaient de naître. C’est ma conviction», clame-t-il.
Pour Ousmane Sonko donc, les victimes des dernières manifestations sont des martyrs. Toutefois, il invite à la prière car «le musulman doit toujours prier Dieu pour Sa clémence. Si c’était dans un Etat normal, ces familles auraient dû être indemnisées même si cela ne remplacera jamais une vie. Mais nous avons un Etat méchant qui pense que faire peur aux gens c’est de les tuer afin que ces jeunes ne sortent plus pour revendiquer leurs droits. Dépassez la barrière psychologique de la peur. Je demande des manifestations dans tout le Sénégal. N’attendons pas qu’on m’arrête, mais on doit se battre pour les détenus politiques».
Ousmane Sonko a aussi lancé un appel à l’international en demandant à la France d’arrêter toute implication dans les affaires du Sénégal durant les 7 prochains mois, mais aussi à Erdogan, le président de la République de Turquie, à cesser d’approvisionner en armements le régime de Macky Sall. «Autrement vous serez tenu comme complice des actes de Macky Sall», a-t-il lancé.
Samba THIAM