Rejets massifs, exigences changeantes et absence de mesures d’accompagnement : la certification des assistants infirmiers au ministère de la Santé provoque une onde de choc dans les écoles privées et plonge des centaines de candidats dans l’incertitude, après deux années de formation coûteuse.
La situation est jugée alarmante par de nombreux acteurs du secteur de la formation en santé. Cette année, beaucoup d’élèves assistants infirmiers issus des écoles privées ont été rejetés lors de la phase de validation des dossiers les empêchant de se présenter aux examens d’État, malgré le paiement intégral de leur formation.
Selon plusieurs responsables d’établissements, ces rejets s’appuient sur des motifs administratifs et pédagogiques contestés : nombre de stages jugé insuffisant, dossiers déclarés incomplets ou encore nouvelles exigences introduites tardivement, sans concertation préalable. «Chaque année, des règles apparaissent au moment du dépôt des dossiers, rendant la conformité presque impossible», confie un responsable d’école sous couvert d’anonymat.
Exigences variables et règles instables
Parmi les points les plus décriés figure l’exigence du certificat de nationalité, tantôt tolérée, tantôt rendue obligatoire selon les années. Une règle héritée d’un ancien système, lorsque les diplômés intégraient automatiquement la fonction publique. Aujourd’hui, alors que le contexte a profondément évolué, cette exigence continue de bloquer des étudiants, y compris ceux régulièrement inscrits et formés.
Des stages irréalisables dans les conditions actuelles
Autre difficulté majeure : les exigences en matière de stages, jugés irréalisables. Les étudiants doivent valider jusqu’à 13 stages, auxquels s’ajoutent les stages ruraux, dans un contexte marqué par la rareté des terrains de stage, l’absence d’accompagnement institutionnel et des coûts élevés supportés par les apprenants et les écoles sans aucune subvention de l’Etat.
Pour les écoles, le système actuel n’a jamais fait l’objet d’une évaluation rigoureuse, alors qu’il génère des exclusions massives et compromet l’avenir professionnel de milliers de jeunes.
Frais d’examen et zones d’ombre
La question des frais d’examen, fixés à 20.000 F Cfa par étudiant, alimente également les interrogations. Depuis 2023, le circuit de versement de ces fonds a changé, sans qu’un bilan public détaillé ne soit systématiquement communiqué. Plusieurs acteurs appellent désormais à un audit, afin de garantir la transparence dans la gestion de ces ressources.
Des examens annoncés à la dernière minute
La gestion du calendrier des examens fait également débat. Les dates des épreuves ont été communiquées à peine quinze jours avant leur tenue, laissant les écoles et les étudiants dans une grande impréparation. Une méthode jugée incompatible avec les standards de bonne gouvernance et de planification académique.
Un sentiment d’injustice généralisé
Pour les acteurs du secteur, la situation est d’autant plus grave que des étudiants ayant suivi deux années complètes de formation se voient privés de l’examen final, sans solution alternative ni mesure transitoire. «Le rejet devrait être une exception. Aujourd’hui, il est devenu la règle», déplore un formateur.
Face à ce qu’ils qualifient de résultats catastrophiques, les responsables d’écoles appellent à une réforme urgente du dispositif de certification, à plus de souplesse, de concertation et d’humanisme, afin d’éviter que la formation sanitaire ne devienne un parcours d’exclusion plutôt qu’un levier de développement.
Khadidjatou D. GAYE