Pour la première fois dans l’histoire du Sénégal, l’article 86 alinéa 6 de la Constitution a été utilisé pour l’adoption de la loi de finances initiale 2025, compte tenu des délais courts en cette période de fin d’année. Seulement, la correspondance envoyée par le chef du gouvernement pour engager la responsabilité du gouvernement a été diversement appréciée. L’opposition a exigé la présence du Premier ministre en pareille occurrence.
Comme annoncé, l’article 86 alinéa 6 de la Constitution a été mis en brande pour l’adoption de la loi de finances initiale 2025, ce samedi, à l’Assemblée nationale. Ce, suite à la délibération du texte en conseil des ministres et son adoption en commission. Par cette démarche, il n'y aura pas de prolongation des débats en plénière. Une première dans l’histoire parlementaire du Sénégal. En effet, le Premier ministre a saisi d’une correspondance le président de l’Assemblée nationale pour engager la responsabilité du gouvernement. «Par lettre 04642/Pr du 11 décembre 1024, Monsieur le Président de la République vous a transmis le projet de loi de finances pour l’année 2025. En application de l’article 86 alinéa 6 de la Constitution et après délibération du conseil des ministres du 18 décembre 2024, j’ai décidé d’engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote de ce projet de loi de finances», a écrit le chef du gouvernement, rapporté par le président de l’Assemblée nationale qui commente, dans la foulée, les dispositions de l’article 86 alinéa 6 de la Constitution. « Le Premier ministre peut, après délibération du conseil des ministres, engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi des finances. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté sauf si une motion de censure est déposée dans les 24 heures qui suivent et votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Le Premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session», a ajouté El Malick Ndiaye.
Une violation de la Constitution, selon Abdou Mbow
De ce constat, il en déduit l’adoption de la loi de finances 2025, sans débat. Une décision dénoncée par le député Abdou Mbow, qui fait remarquer que la démarche adoptée est une violation de la Constitution. A l’en croire, le chef du gouvernement devait être présent à l’hémicycle pour engager la responsabilité du gouvernement, au lieu d’envoyer le ministre des Finances et du Budget. Ce qui lui fait dire que le président de l’Assemblée fait ce qu’il considère de «forcing antidémocratique». Devant son insistance qui perturbe le président de l’Assemblée nationale, Abdou Mbow a été rappelé à l’ordre avant d’être menacé d’expulsion de l’hémicycle. «Est-ce que vous pouvez vous taire. Si vous insistez, vous sortez de la salle», intime El Malick Ndiaye, avant de confirmer l’adoption de la loi de finances en se fondant sur la lettre du Pm. Pour rappel, la loi de finances a déjà été adoptée en commission à la majorité des députés présents.
Djimo Souaré : «le Pm devait être présent»
Au terme de la plénière, le député Djimo Souaré est d’avis que le Premier ministre Ousmane Sonko devait être présent à l’Assemblée nationale. A l’en croire, en engageant la responsabilité du gouvernement, il se devait d’être présent. «J’aurais bien aimé qu’on aille jusqu'au bout du processus démarré en travaux de commissions. Nous avons certes démarré tardivement, mais l’Assemblée s’était organisée de telle sorte que chaque ministère puisse passer devant la commission pour exposer son budget. Le même procédé devait être reconduit en plénière et nous devrions recevoir tous les ministères pour prolonger le débat», explique le député de Takku-Wallu. Même son de cloche chez le député non inscrit Mbaye Dione. «Je m’attendais à voir le Premier ministre devant le parlement et engager physiquement la responsabilité du gouvernement. J’ai parcouru aussi bien le Règlement intérieur que la Constitution dans l’article qui permet d’engager la responsabilité du gouvernement article 86 alinéa 6, mais il n’y a aucune disposition qui dit que le Premier ministre peut déléguer cet engagement à un ministre fut-il le ministre des Finances et du Budget», martèle le maire de Ngoudiane.
Samba Dang : «Les députés ont entièrement confiance en leur Pm»
«L’article 86 alinéa 6 de la Constitution permet au gouvernement, après le conseil des ministres, de faire prévaloir sa motion de confiance. Et les députés ont entièrement confiance en leur Premier ministre parce qu’’après la Dpg, on ne pouvait pas ne pas adopter cette loi de finances initiale. On a entièrement confiance à la vision du chef de l’Etat», explique pour sa part le député de Pastef, Samba Dang.
M. CISS