ABUS DE CONFIANCE: L’agent commercial dissipe plus de 19 millions de la société chinoise MH, évoque une agression et écope 2 ans ferme



 
Contrairement au 6 mois de prison qu’avait requis le procureur à son encontre, le juge du tribunal des flagrants délits de Dakar a infligé une peine de 2 ans de prison ferme à l’agent commercial Arona Dione. Ce dernier a comparu, hier, pour avoir dissipé plus de 19 millions au préjudice de la société chinoise MH spécialisée dans le textile. Ce, même s’il a crié urbi et orbi jusqu’à la barre avoir été agressé. Mais, en plus de cette peine sévère, il doit payer le montant de 22 millions à la partie civile.
 
 
Durant 5 ans de collaboration, avec un salaire mensuel de 100.000 F, l’agent commercial Arona Dione, poursuivi pour abus de confiance par son employeur, la société chinoise MH, spécialisée dans la confection de tissus et autres accessoires, a dissipé 19.170.000 F au préjudice de ladite boite. Devant le tribunal des flagrants délits de Dakar où il a été trainé, hier, il a avancé la thèse d’une agression pour tenter de convaincre les juges. Agression ou détournement de capitaux, on ne saurait le dire et Dieu seul sait ce qui s’est réellement passé dans cette histoire.
En effet, selon l’accusation, le 17 août dernier, quelques jours avant la Tabaski, vers 21h, après avoir fini son recouvrement, il attendait que son patron vienne le chercher avec un véhicule vu les sommes importantes qu’il détenait par-devers lui à cette heure tardive. Mais, son employeur l’a appelé au téléphone à plusieurs reprises pour qu’ils partent ensemble, en vain. Et il a fallu que les agents enquêteurs aillent le cueillir chez lui pour qu’il s’explique.
 
 
Arona raconte une histoire à dormir debout
 
 
 
Interrogé sur les faits, Arona Dione a soutenu avoir affrété un taxi qui devait passer par Castors pour déboucher sur l'autoroute et le conduire au centre-ville chez son patron. Mais, il est descendu en cours de route pour en trouver un autre. Une fois aux abords de l’entreprise EMG Universal auto, 4 individus à bord d’une moto se sont rués sur lui, l’ont roué de coups et lui ont fracturé les doigts avant d’emporter le sac qui contenait l’argent et un portable Samsung. C’est après avoir bénéficié de soins, ajoute-t-il, qu’il a saisi les éléments de Grand-Yoff qui l’ont renvoyé à ceux des Hlm où il a fait sa déposition.
 
 
 
Les faits qui ont démonté la version du prévenu
 
 
Hélas, pour lui, les réquisitions de la Sonatel ont prouvé que ledit téléphone qui fonctionnait était retrouvé sur les «lieux du crime» et qu’il n’a pas été emporté par les assaillants, comme il a voulu le faire croire aux agents. De même, les gardiens qui se trouvaient sur les lieux du forfait ont déclaré lors de l’enquête n'avoir jamais constaté de cas d'agression ce jour-là. A cela, il s’ajoute que les deux certificats médicaux qu’il a produits dans le dossier l’ont trahi, car, malgré qu’ils aient prouvé que ses doigts étaient cassés, leurs conclusions diffèrent, parce que l’un atteste qu’il est blessé à sa main droite et l’autre dit à sa main gauche.
Hier, devant la barre des flagrants délits de Dakar, l’un des représentants de l’entreprise qui devait l’accompagner ce jour-là a donné sa version. Mais, il a précisé que beaucoup d’entre eux l’ont appelé, vainement. Avant d’ajouter qu’il s'est présenté à lui avec des blessures à la main ainsi qu’aux doigts.
 
 
 
Le procureur au prévenu : «Arona xaalis bi anamu ?»
 
Pour sa part, le prévenu a maintenu la thèse de l’agression. Malheureusement pour lui, le procureur ne l’a pas cru. Ce dernier de lui dire : «est-ce que daanélo sa bopp sax. Si on regarde les certificats médicaux dans le dossier, je ne vois aucune trace d'égratignure. Avec quoi on t'a frappé ? Pour moi, tout ce que tu dis là, ce ne sont que des prétextes», a-t-il pesté avant de l’acculer à nouveau : «Arona xaalis bi anamu ?».
 
 
Me Jacques Faye, partie civile : «dans la supposée agression, les agents ont noté 9 cas d'incohérence»
 
 
Du même avis, l’avocat de la partie civile, Me Jacques Faye, a évoqué sa mauvaise foi, avant de formuler ses demandes. «Il essaie de trouver une excuse en prétendant une agression et cette thèse ne peut prospérer. Car, c’est une mise en scène. Parce que dans le Pv, les agents ont noté 9 cas d'incohérence», a fulminé Me Faye, qui a réclamé 25 millions avant de demander à titre subsidiaire la somme dissipée. Le parquet d’enfoncer le prévenu : «si agression il y a, il a contribué à la faciliter en demandant au chauffeur de passer par cette route. Ce qui est aberrant, c’est qu’il dit avoir été  agressé, alors qu'il y a toujours des agents sur place et des individus qui pouvaient lui venir en aide. De plus, il dit n'avoir pas crié. Tout cela a été  fomenté, Il a créé un scénario pour nous faire croire qu'il y a une agression. Il n'y  a pas d'excuse. Je sollicite de le condamner à 6 mois de prison ferme», a sollicité le parquetier.
 
 
 
Me Keita : «Il faut débouter le plaignant, les Chinois sont des exploiteurs
 
Pour la défense, Me Djiby Diagne, pour qui la thèse de l'agression peut tenir, a souhaité le renvoi des fins de la poursuite sans peine, ni dépens, parce que la faute est involontaire, selon lui. Me Keita a abondé dans le même sens et sollicité de débouter le plaignant. Pour lui, les Chinois sont des exploiteurs qui ne respectent pas les conditions des travailleurs dont ils ne se soucient guère. Car, précise-t-il, son client n'a pas été mis dans des conditions meilleures pour ne pas à subir cet aléa. Au terme des débats, le tribunal lui a infligé une peine sévère de 2 ans, contrairement à ce qu’avait sollicité le parquet. Aussi, il doit payer 22 millions à la Société MH.
 
Fatou D. DIONE 

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